« Qui aime bien, châtie bien ! »

           Après quelques décennies où l’on n’a plus parlé ni du péché, ni du démon, ni de l’enfer, et où les psychologues ont largement dénoncé les traumatismes dus aux sanctions, voilà qu’aujourd’hui, ils découvrent que l’absence de sanctions, elle aussi, peut être traumatisante, et qu’elle pourrait bien être un facteur de délinquance, les enfants étant privés des repères dont ils auraient tant besoin !

 

  Nous élevons nos enfants pour les conduire vers leur vie éternelle. Notre rôle de parents est de leur montrer le chemin qui mène à Dieu tout en les écartant des obstacles qui les en détournent. Mais leur apprendre à faire le bien et à éviter le mal n’est pas si facile. Nous avons constamment à choisir entre deux voies : l’une douce et plus facile, sans contraintes et l’autre, à l’inverse, dans un effort constant contre le péché, ce qui suppose d’apprendre à réprimer ses mauvaises tendances pour s’en libérer.

  C’est dans ce choix que Dieu nous a créés libres, Il ne nous impose rien, mais nous donne sa grâce pour nous lancer sur la voie qui mène à Lui : celle qui sera faite d’efforts, de combats contre les défauts pour accéder à la vraie liberté. Tout ceci devra être entrepris très tôt, les mauvaises tendances existent, ne disparaîtront pas toutes seules, mais seulement sous l’effet de contraintes fermes, patientes et régulières.

  Voilà la raison d’être d’une bonne discipline, de règles claires et précises, de punitions justes, le tout destiné à contrecarrer, dès le jeune âge, l’inclination au mal qui vient du péché originel.

  Tout ce travail sera facilité si l’enfant sait que ses parents agissent pour son bien, et qu’il est heureux et confiant de se savoir aimé d’eux.

C’est aux parents de définir pour leurs enfants ce qui est « permis » et ce qui est « défendu » (avant 4 ans) ; puis, après 4 ans, ce qui est « bien » et ce qui est « mal ». Bien sûr, il faudra d’abord annoncer « le règlement » que les parents veilleront à appliquer. C’est là, qu’au besoin, on aura recours à des sanctions appropriées.

 

  La sanction est là pour amener l’enfant au bien. Si l’on veut qu’elle porte, elle doit être indiscutable : « ce qui est dit est dit, on ne revient pas dessus ». Ce point est fondamental en éducation et nécessite de ne pas parler à la légère et de réfléchir avant d’établir la règle à respecter, la sanction qui y correspond, tout en la dosant :

– en fonction de l’âge, de la maturité, des capacités d’un enfant.

– en fonction de la gravité objective du mal. Il est beaucoup moins grave de casser un vase de cristal par maladresse, qu’un verre de cuisine par colère !

On ne sévira pas de la même manière si l’enfant a menti ou désobéi gravement, ou s’il a simplement fait une tache sur sa chemise.

 

  Pour qu’une sanction soit bonne, surtout dans le cas d’une punition, elle doit être :

 

Effective :

  On avait annoncé une punition en cas de désobéissance, il faut maintenant passer à l’acte. C’est « automatique », papa ou maman l’avait dit. L’enfant, perpétuellement menacé de punitions qui n’arrivent jamais, n’en fera toujours qu’à sa tête. Sans parler d’une perte de confiance en ce que disent ses parents, et d’un manque de respect en leur parole s’ils ne la tiennent pas.

En revanche, celui qui sait à quoi il s’expose très certainement, trouvera un frein à sa désobéissance.

 

Juste :

  La punition doit :

– être conforme à la raison

– être proportionnée à ce qui a été fait

– tenir compte du degré de responsabilité de l’enfant (un tout petit peut faire une grosse bêtise, mais du fait de son jeune âge, il reste inconscient du mal qu’il a pu faire…)

 

  Il faut trouver le bon équilibre entre un excès de sévérité, et une attitude « laxiste » où on laisse tout passer… Attention aussi à faire la différence entre « erreur » et « faute » ; une faute doit être punie. Punir pour une simple erreur, ou une maladresse, serait une injustice.

Le but d’une sanction est d’amener l’enfant à vivre selon la « justice » (sainteté) : obéir dès qu’on l’appelle, dire la vérité, se maîtriser, retenir le mot méchant, etc. Il ne faut donc pas qu’il puisse croire que vous l’avez puni, non parce qu’il le méritait, mais parce que vous étiez en colère.

 

  Il est conforme à la justice que le tort soit réparé. Pour être réellement éducative, la punition doit donc avoir ce caractère de réparation.

– pour un vol : la restitution de l’objet

– pour un mensonge, la rectification de ce qui a été dit

– pour une dispute ou un mot méchant : la réconciliation

 

  S’il l’a vraiment méritée, l’enfant accepte très bien d’être grondé, il sait qu’il mérite une punition et peut comprendre que c’est pour son bien. Si cette réparation n’est pas faite, il ressentira inconsciemment comme un manque : il n’a pas eu les repères dont il a besoin et qu’il attend de ses parents. Ces règles sont aussi valables lorsqu’il s’agit d’une récompense : elle doit rester proportionnée à ce qui l’a mérité, ni trop, ni trop peu.

 

Calme :

  Si l’on punit un enfant sous l’effet de la colère, la punition devient excessive, disproportionnée : elle perd alors toute son efficacité ! Si nous punissons un enfant, c’est parce que nous l’aimons et que nous voulons son « vrai » bien. L’enfant doit le savoir, il ne s’y trompe pas. La punition portera d’autant plus qu’elle sera donnée en toute objectivité, calmement, « à froid ». Cela n’empêche pas d’avoir parfois à hausser le ton, mais que cela reste conscient, contrôlé.

 

Immédiate :

  L’enfant vit dans l’instant présent, il est donc nécessaire de ne pas laisser de délai entre le fait et la sanction. « Tu as désobéi, tu es puni » : on administre la sanction, c’est dans l’ordre, et après, c’est fini, on n’en parle plus. On essuie les larmes et on s’embrasse : l’enfant retrouve la paix d’une bonne conscience et son sens de la justice est satisfait !

 

  Dieu a créé l’homme par amour. Il l’a d’abord créé pour sa gloire, et pour le rendre heureux. C’est en Dieu, en lui seul qu’il faut chercher ce bonheur, en lui seul qu’on peut le trouver. Notre vocation, ce à quoi nous sommes appelés, nous et nos enfants, c’est la sainteté : nous devons la désirer et prendre les moyens pour y arriver. Voilà dans quel sens nous devons élever nos enfants, voilà l’exemple qu’ils doivent avoir devant eux pour pouvoir, à leur tour, avancer vers le bon Dieu.

Oui, donnons-leur une éducation fondée sur l’Amour !           

Sophie de Lédinghen

 

Inspiré de « Éduquer pour le bonheur. La formation morale de l’enfant » (Monique Berger)

 

Marquise au chocolat

Préparation : 30 minutes

Réfrigération : 4 heures 

 

Ingrédients pour 12 personnes :

– 300 g de Nestlé dessert

– 175 g de beurre mou 

– 4 œufs 

– 100 g de sucre glace 

 

Préparation :

Au bain-marie, faire fondre le chocolat.

Dans un saladier, mélanger le beurre (crème blanche) et ajouter le sucre glace puis mélanger.

Séparer les blancs des jaunes.

Incorporer les jaunes un par un dans le mélange beurre / sucre. 

Ajouter le chocolat fondu et laisser refroidir.

Battre les blancs en neige très ferme  puis les mélanger à la préparation.

Verser dans un moule et mettre au frais.

Démouler et garnir le gâteau d’écorces d’orange et de sucre glace.

 

Chaud froid de poulet

 

 Ingrédients :

– 1 poulet

– 1 sachet de gelée au Madère 

– 2 à 3. cuillères à soupe de crème fraîche 

– Sel, poivre, éventuellement bouquet garni 

 

Préparation :

Faire cuire le poulet et couper la chair en morceaux pas trop gros.

Préparer la gelée selon les indications avec seulement 1/3 de litre d’eau et non 1/2.

Dès qu’elle est moins chaude, y mélanger la crème fraîche et assaisonner.

Déposer les morceaux de poulet dans un moule en verre.

Verser la gelée sur le poulet et mettre au réfrigérateur pendant plusieurs heures.

On peut en plus, si on le souhaite faire une décoration au fond du moule. 

Quand la gelée est prête, avant d’y ajouter la crème, en verser une fine couche au fond du moule et mettre au frigo ou même au congélateur si on est pressé. 

Quand elle commence à prendre, disposer dessus de petits morceaux de légumes (tomate, persil …) quand la gelée a pris, déposer dans le moule, sur la décoration, le poulet.

Bon appétit. Délicieux et très pratique car ce plat peut se faire à l’avance.

 

« La vie est belle »-« Heureux »-« Frères, le temps s’est fait court. « 

La vie est belle

 Elle est belle lorsqu’une rai de lumière au matin nous fait signe et, nous montrant les tâches qui s’amoncellent, nous met à « notre place ».

Elle est belle au long des heures qui s’égrènent, parce que chacune étant riche d’amour est sanctifiée.

Elle est belle lorsque le jour n’est plus que souvenirs rassemblés au cours de la nuit venue.

Elle est belle lorsque notre printemps n’est plus, et quand notre été a donné ses fruits.

Elle est belle lorsque l’automne frappe à l’huis de notre vie, et que derrière lui l’hiver guette.

Elle est belle lorsque nous nous penchons vers l’éternelle aurore.

Elle est belle parce qu’elle va vers son Seigneur, comme le fleuve dans l’océan se perd. 

 

« Heureux! »

                     Heureux ceux qui s’aiment assez, qui veulent assez se plaire, qui se connaissent assez, qui s’entendent assez, qui sont assez parents, qui pensent et sentent assez de même, assez ensemble en dedans, chacun séparément, assez les mêmes chacun côte à côte…

Heureux ceux qui s’aiment assez, pour savoir se taire ensemble, dans un pays qui sait se taire.

Charles Péguy

 

          « Frères, le temps s’est fait court. « 

           Méditons souvent la parole de Saint Paul : « Frères, le temps s’est fait court. » Quand nous l’aurons bien compris, quand notre foi sera ce qu’elle doit être, nous regarderons d’un autre œil l’avenir. Nous comprendrons qu’il ne faut pas nous laisser endormir dans la prospérité de notre famille. Nous n’oublierons jamais que nous ne sommes en ce monde que des voyageurs. Nous imiterons les oiseaux du ciel, qui accrochent leur nid à l’arbre pour un printemps et sont prêts à partir quand vient l’hiver. Nous comprendrons qu’il est important de nous préparer aux épreuves qui s’abattront un jour sur nous, afin que nous ne soyons pas écrasés par elles, mais que nous puissions, au contraire, les transformer en fruits de sainteté. Nous verrons qu’il importe dès maintenant, de nous mettre à l’œuvre, de pratiquer un vrai détachement, d’être vigilants et généreux.

  Qu’ils avancent résolument dans la voie large et généreuse de l’amour. Qu’ils se refusent à laisser pénétrer dans leur foyer l’esprit du monde, avec ses vaines ambitions de termitière. Que leur famille soit vraiment pour eux l’œuvre de Dieu. Que celui qui entre dans leur maison puisse y déposer son accablant fardeau de soucis, qu’il y trouve la paix et que le tumulte du dehors s’évanouisse. L’âme y redécouvrira le sens profond de sa vie qu’en proie aux vaines agitations, elle avait perdue. Elle y trouvera la stabilité de ceux qui ont mis en Dieu toute leur espérance. Et rien ne ravira leur joie.

A . Christian – Ce sacrement est grand

 

La vengeance

           L’homme, de par sa nature sociale, ne peut vivre sans suivre une certaine règle morale, que cette dernière soit divine (les dix Commandements), sociale (la loi, les coutumes), ou simplement personnelle (les principes de vie,…). Transgresser l’une ou l’autre de ces règles revient à nuire à l’ordre établi, et demande réparation du dommage causé ainsi que la punition du fautif, afin de le corriger et de prévenir tout autre écart de sa part ou de celle de ses semblables. Cette réparation, ce châtiment des fautes commises est à proprement parler appelé « vengeance1 », et peut relever du droit public, comme du droit privé, et bien sûr du droit divin. Saint Thomas s’est penché à différents endroits de sa Somme Théologique sur la question du juste châtiment, de la nécessité ou non d’infliger une punition, des défauts qui peuvent y être liés, et de divers aspects qu’il peut être intéressant d’aborder pour mieux comprendre le principe évangélique du pardon.

 

Vengeance et Vindicte

  La première question que se pose saint Thomas au sujet de la vengeance2, est celle de sa licéité, de sa moralité : peut-on demander réparation d’une offense quand Dieu lui-même, dans l’Ecriture, dit « A moi la vengeance et la rétribution3 », et quand Jésus-Christ prescrit de « Tendre l’autre joue » quand l’on a été offensé ? A cela le Docteur Angélique répond en distinguant vertu de vengeance et vengeance de haine.

 

  La vertu de vengeance, que l’on peut nommer vindicte, est la « poursuite et punition des crimes par l’autorité légale » (Dictionnaire La Langue Française). Elle s’exerce par les institutions de l’Etat, telles que les tribunaux et les forces de police, et fait partie de ses pouvoirs régaliens4, puisqu’il lui appartient d’assurer la sécurité de ses citoyens, entre autres moyens par le châtiment de ceux qui contreviennent à la Loi et à l’ordre public. C’est là une prérogative élémentaire du pouvoir civil et des princes, « Ministre[s] de Dieu pour tirer vengeance de celui qui fait le mal5 ». La vengeance, ou vindicte, fait dans ce cas partie de la justice commutative, dont le but est de régler les relations, les échanges entre personnes. L’Etat n’en est pas le seul garant, mais partage ce rôle de juge avec toute autre autorité naturelle, de celle du père de famille à celle du chef d’entreprise ou du président d’une association, ces derniers étant, à leur niveau, responsables de la société dont ils sont à la tête. C’est pour cette raison qu’ils peuvent chacun infliger une punition à ceux qui leur sont subordonnés, en vue du bien commun. Aucun n’usurpe ici un droit qui n’appartiendrait qu’à Dieu, mais tous en usent par délégation, toute autorité venant de Dieu.

 

  Différente est la vengeance, au sens où nous l’entendons couramment. Il s’agit alors du châtiment infligé par une personne privée à une autre personne en raison d’une injustice commise, que cette dernière soit réelle ou imaginée. L’expression courante que l’on retient est « se faire justice », mais il existe un principe très simple en Droit : l’on ne peut à la fois être juge et partie. L’offensé a naturellement tendance à surestimer le mal dont il est la victime, et donc à infliger une punition disproportionnée. L’homme qui se ferait justice, – en plus de s’arroger un droit réservé à l’autorité et donc de créer un désordre – , déclenche une spirale de violence pouvant très vite tourner au chaos. Si, en effet, j’ai le droit de punir mon voisin pour un dommage qu’il m’aurait causé, qu’est-ce qui l’empêcherait à son tour de chercher à se venger de moi ? Quel serait l’arbitre, où serait la limite ? C’est là tout le problème de la vendetta, véritable coutume encore présente en Sicile ou dans la région des Balkans : l’offense reçue doit être réglée entre les deux rivaux sans en référer au pouvoir légal, et il revient aux fils de venger leurs pères. Il s’ensuit des décennies de guerre entre familles, la vengeance appelant la vengeance. A rebours de cela, l’Evangile nous apprend à « Vaincre le Mal par le Bien6 » et à pardonner « comme Dieu nous a pardonné7 ». Saint Thomas expose en ces mots l’immoralité de la vengeance privée : « Ce n’est pas une excuse que de vouloir du mal à celui qui nous en a causé injustement, de même qu’on n’est pas excusé de haïr ceux qui nous haïssent ».

 

Cruauté et faiblesse

  Infliger une peine en réparation d’un mal commis demande, de la part de l’autorité, une vision claire du bien commun et un respect évident de la morale, sans quoi elle risque de tomber dans deux vices liés à la vengeance, selon saint Thomas : le premier vice par excès, à savoir la cruauté, le second par défaut, à savoir la faiblesse, ou la mollesse.

  La cruauté désigne tant une trop grande sévérité dans la punition d’une faute, qu’un châtiment infligé sans raison valable. L’autorité peut se montrer coupable d’une excessive sévérité pour plusieurs raisons. La première pourrait être de « faire un exemple », en frappant les esprits et en terrifiant les membres de la société, afin de les empêcher d’agir contre la Loi. Le but peut être louable, mais empêcher un désordre par un tel moyen reste en soi un désordre, et donc ne peut être en aucun cas justifié et moralement bon. La « Raison d’Etat » ne saurait être un prétexte au mal, une autorité devant toujours protéger la justice.

  Une autre raison de l’excessive sévérité d’une autorité serait de forcer l’obéissance, ou plutôt la soumission de ses subordonnés, à une loi stupide, sans réel fondement ou même immorale. Le mot Draconien fait référence au tyran Dracon homme d’Etat de l’Antiquité grecque à l’origine d’un code de lois dont la plupart des transgressions, mineures comme majeures, étaient punies de mort. L’Histoire regorge d’exemples de cette sorte, et la période actuelle ne fait pas exception.

Pour ce qui est du châtiment infligé sans raison réelle, il s’agit bien souvent d’une vengeance aveugle, désignant comme victime toute personne partageant un quelconque lien avec un offenseur réel ou présumé : c’est le célèbre « Si ce n’est toi, c’est donc ton frère », de la fable de la Fontaine8. La cruauté désigne également la violence gratuite, mais cette partie concerne moins notre propos actuel.

 

  La faiblesse dans le châtiment est le second défaut lié à la vengeance. L’autorité peut s’en rendre coupable par peur, ou par désintérêt. Le principe « Tous égaux devant la Loi », a en effet connu maintes dérogations, en fonction de l’importance du contrevenant ou de la puissance de ses relations sociales. Cela peut être totalement justifié quand la condamnation publique causerait plus de mal que de bien, il faut alors tolérer sans pour autant approuver, mais ces cas sont assez rares, concernant principalement la faute d’une autorité elle-même : « Il faut fermer les yeux si le châtiment de sa faute doit causer du trouble parmi le peuple9 ». L’on a trop souvent pu faire le constat d’un pouvoir « fort contre les faibles, faible contre les forts ». Le résultat est inévitablement une hardiesse plus forte des fauteurs ainsi qu’une exaspération de leurs victimes, tentées alors de se faire elles-mêmes justice, créant un nouveau désordre.

  L’autre cause de cette mollesse dans la vengeance est plus souvent le fait de l’autorité paternelle, ne s’appliquant pas à son devoir de correction parce qu’accaparée par d’autres occupations (vie professionnelle, divertissements) ou simplement désintéressée du bien de sa famille. A ce sujet, l’Ecriture dit « Celui qui ménage la baguette hait son fils10 ». Manquer, par excès ou défaut de sévérité, au devoir de vengeance imposé par la justice, entraîne dans l’un et l’autre cas le délitement de l’ordre social. A l’opposé de ces vices, les vertus de clémence et de mansuétude permettent de renforcer une société, et favorisent l’harmonie et la concorde entre ses membres.

 

Clémence et mansuétude

  Clémence et mansuétude règlent respectivement la vindicte exercée par l’autorité et la vengeance des individus. Elles permettent de modérer les passions et d’éviter d’infliger une punition disproportionnée.

 

  La clémence est donc propre à l’autorité. Elle est, selon la définition de Sénèque, « La douceur du supérieur à l’égard de l’inférieur11 ». Son effet est de limiter la peine prévue, de punir en deçà de ce qui est édicté par la Loi, voire même d’annuler le châtiment. Il ne s’agit pas là du vice de faiblesse ou de mollesse dont nous avons parlé précédemment, la clémence s’inspirant toujours de la droite raison pour mieux corriger le fautif et l’emmener plus sûrement à la vertu, si ses dispositions s’y prêtent. Dans Cinna de Racine, l’empereur Auguste pardonne au personnage éponyme malgré la volonté de ce dernier de l’assassiner. Cinna, touché par la douceur de l’empereur, lui voue sa fidélité et sa vie. De manière plus commune, la clémence « [] diminue les peines, comme discernant que l’homme ne doit pas être puni davantage », en prenant en compte les circonstances particulières et la possibilité d’amendement du fautif. Elle est donc diamétralement opposée à une certaine « bureaucratisation » de la Justice, qui appliquerait à tous les mêmes peines, sans distinction.

 

  La mansuétude, elle, vise à réprimer la colère qui est un désir de vengeance causé par l’injustice, et à la remplacer par la bienveillance envers l’offenseur. C’est là proprement l’attitude du chrétien, animé par l’amour surnaturel du prochain enseigné par Jésus-Christ : « Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres12 ». Il s’ensuit, nous dit saint Thomas, que le chrétien doit, « dans la mesure où l’offense est purement personnelle, la supporter avec patience ». Il faut ici appuyer sur le « purement personnelle », la réparation d’une offense étant nécessaire quand, à travers soi, est attaqué Dieu, la religion ou bien l’autorité que l’on représente. On ne châtie alors pas pour soi, mais pour quelque chose qui nous dépasse, qui est au-dessus de nous. Ne pas demander réparation d’une injure faite à Dieu serait, par exemple, une marque d’ingratitude et d’infidélité : « Rester insensible aux offenses faites à Dieu, c’est le comble de l’impiété13 ». Moïse, saisi d’une sainte colère à la vue des Hébreux adorant le Veau d’or, brisa les Tables de la Loi et fit périr par l’épée trois milles des impies. Autres temps, autres mœurs…

 

  La vengeance peut donc autant désigner une vertu qu’un vice, selon les dispositions de celui qui l’applique : rétablir la justice et corriger le fautif, ou bien satisfaire sa colère. Dans le premier cas, elle est une prérogative de l’autorité et ne peut être exercée par les individus, même en cas de défaillance de sa part. Dans le second cas, elle n’est tout simplement pas permise, le mal ne devant pas entraîner le mal. La Loi ancienne, celle du Talion, « Œil pour œil, dent pour dent », a définitivement été remplacée par la Loi nouvelle, celle de la Charité. A nous de nous appliquer à acquérir cette douceur et cette patience qui font l’admiration du monde et la gloire de l’Eglise, et qui sont la marque des amis de Dieu : « Bienheureux les Doux, car ils recevront la terre en héritage, Bienheureux les assoiffés de justice, car ils seront rassasiés, Bienheureux les Pacifiques, car ils seront appelés fils de Dieu14 ».

   

Un animateur du MJCF



1 Du latin Vindicta : Punition, Vengeance

2 Somme Théologique, 2nda, 2ndae, Q.108

3 Deutéronome, 32-35

4 « Se dit des fonctions politiques et administratives (police, défense, etc.) qui dépendent directement de l'État ou de son représentant suprême », Larousse

5 Saint Paul, Rom.,13.4

6 Saint Paul, Rom. 12,21

7 Cf Foyers Ardents n°25 : « Le Pardon »

8 Le Loup et l’Agneau, Livre 1er, fable 10

9 Somme Théologique, 2nda, 2ndae, art.1 : cette tolérance n’est évidemment plus valable quand la faute de l’autorité est pire que le scandale causé par le châtiment de sa faute (excommunication de Rois responsables de crimes, d’adultères publiques, …)

10 Proverbes, 13, 24. Il s’agit là, bien évidemment, de punir en vue de la correction, de la progression dans la vertu, non de violence gratuite.

11 De Clementia, Sénèque

12 Jean, 13.34

13 Saint Jean Chrysostome

14 Mat. 5, 4-9



Les insomnies

           La retraite peut être un moment rêvé depuis des années, idéalisé et attendu comme un soulagement, ou au contraire, redouté et source d’inquiétude et d’angoisses : car avec la retraite, tous les maux de la vieillesse commencent à se manifester ou à s’intensifier, et parmi eux, non le moindre, l’insomnie…

Certains en souffrent déjà depuis longtemps, mais peu sont arrivés à l’apprivoiser ou même à la désirer, comme l’a fait le Bienheureux Charles de Foucauld dans sa retraite d’ermite.

Voici ce qu’il disait de ses nuits de veille, illuminées par sa profonde vie spirituelle. Quelle richesse pour nos pauvres âmes !

 

  Notre-Seigneur, prie seul, prie la nuit. C’est une habitude chez Lui… Bien des fois, l’Evangile nous répète : « Il se retira seul pendant la nuit pour prier » … Aimons, chérissons, pratiquons à son exemple, la prière nocturne et solitaire… Quand tout sommeille sur la terre, veillons et faisons monter nos prières vers notre Créateur… S’il est doux d’être en tête-à-tête avec ce qu’on aime au milieu du silence, du repos universel et de l’ombre qui couvre la terre, combien est-il doux d’aller en ces heures, jouir du tête-à-tête avec Dieu ! Heures d’incomparable félicité, heures bénies qui faisaient trouver à saint Antoine les nuits trop courtes… Heures où, pendant que tout se tait, tout dort, tout est noyé dans l’ombre, je vis aux pieds de mon Dieu, épanchant mon cœur dans Son amour, autant qu’il me chérit… Nuits fortunées que mon Dieu me permet de passer en tête-à-tête avec Lui… O mon Seigneur et mon Dieu, faîtes-moi sentir comme je le dois, le prix de pareils moments ! Faîtes-moi « delectare in Domino » … Faîtes-moi, à Votre exemple, n’avoir pas de plus chers moments, pas de plus vrai repos, pas d’heures plus suaves et plus enviées que ces heures de prières nocturnes et solitaires !

 Ecrits spirituels. Charles de Foucauld

 

Rusalka (Roussalka)- Le chant à la lune (acte 1)

Notre citation pour janvier et février :

Un Savetier chantait du matin jusqu’au soir :
C’était merveilles de le voir,
Merveilles de l’ouïr ; il faisait des passages,
Plus content qu’aucun des Sept Sages. 
Son voisin au contraire, étant tout cousu d’or

Chantait peu, dormait moins encor (…)
Jean de la Fontaine

Le Savetier et le Financier, Livre VIII, fable 2

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 Opéra en trois actes créé en 1901 – Livret en tchèque de Jaroslav Kvapil .

L’héroïne, Rusalka, ondine, aime un prince jeune et beau. Elle confesse à la lune son désir d’en être aimée à son tour dans ce larghetto devenu célèbre. L’histoire ressemble à celle de la Petite Sirène d’Andersen, mais sa fin tragique est différente : c’est le prince qui perd la vie et rejoint Rusalka dans la mort. L’œuvre a été ressentie dès sa création à Prague comme un opéra national. Certains passages sont en effet similaires à des mélodies folkloriques, avec des harmonies typiques de la musique tchèque.

Mĕsíčku na nebi hlubokém,

Svĕtlo tvé daleko vidí,

Po svĕtĕ bloudíš širokém,

Díváš se v příbytky lidí (bis)

 

Mĕsíčku postůj chvíli,

Řekni mi, řekni, kde je můj milý ? (bis)

 

Řekni mu, stříbrný mĕsíčku,

Mé že jej objímá rámě,

Aby si alespoň chviličku,

Vzpomenul ve snĕní na mne, (bis)

 

Zasvět’ mu do daleka, zasvět’ mu,

Řekni mu, řekni, kdo tu naň čeká, (bis)

 

O mně-li duše lidská sní,

Ať se tou vzpomínkou vzbudí,

Mĕsíčku, nezhasni, nezhasni,

Mĕsíčku, nezhasni !

Petite lune si haute dans le ciel,

Ta lumière transperce le lointain,

Tu vas de par le vaste monde,

Tu vas jusque chez les humains.

 

Arrête-toi un instant,

Dis-moi, dis où est mon amour ?

 

Dis-lui, lune argentée,

Que pour moi, tu l’entoures de tes bras,

Tu luis, pour qu’au moins un instant

Il se souvienne de moi en songe.

 

Et dis-lui que je l’attends,

Éclaire-le là-bas, très loin,

 

Et si j’apparais en songe à cette âme humaine,

Fasse qu’elle s’éveille avec ce souvenir !

Lune, ne te cache pas, ne te cache pas,

Lune, ne te cache pas !

https://www.olyrix.com/oeuvres/25/rusalka/videos/787/lair-le-chant-a-la-lune-de-rusalka-avec-renee-fleming

 

Réflexions sur le bon usage des études scolaires en vue de l’amour de Dieu

           Préambule 

           Nous publions ce texte qui possède une véritable valeur intellectuelle et pédagogique. Simone Weil a beaucoup écrit sur l’importance de « l’attention ». Elle indique ici comment tous les efforts d’attention qu’on demande aux enfants dans leur scolarisation devraient être finalisés par l’attention que l’on doit à Dieu et favorisent l’attention dans la prière. On peut admirer cette profondeur et cette hauteur de vue. Toutefois, on ne doit certes pas tirer de ce texte une précision de pensée réellement théologique. Relevons en particulier qu’on ne peut pas dire de l’attention qu’elle « est la substance de la prière ». Saint Thomas cite l’attention comme une condition nécessaire à la prière. En effet, l’attention est une prédisposition de l’esprit pour s’appliquer à quelque chose, et donc, par exemple, à la prière (même si la faiblesse de l’esprit humain peut faire que, involontairement, l’attention se relâche). De même, il n’est pas vrai que « le désir seul oblige Dieu à descendre ». Ce serait faire de la grâce un dû. Or la grâce est gratuite. Mieux vaut donc cette autre formule de Simone Weil : « c’est Dieu seul qui vient saisir l’âme et la livre ». Il nous a paru nécessaire de faire ces remarques pour publier ce texte.

 

  La philosophe Simone Weil a écrit en mai 1942 à l’attention d’un dominicain de Marseille, le père Perrin, un texte remarquable sur la véritable finalité des études scolaires pour tout jeune élevé dans la foi chrétienne. Ces réflexions ont un sens très actuel car elles mettent l’accent sur l’importance de préserver et faire grandir une faculté de l’intelligence humaine que la vie moderne épuise constamment : la faculté d’attention. D’innombrables sollicitations accablent aujourd’hui la jeunesse au moyen d’écrans, de communications, de publicités et d’occasions de toutes sortes qui ont toutes pour conséquence de capter leur attention au profit du monde, ce qui veut dire au détriment de leur relation à Dieu dans la prière et d’études scolaires sérieuses qui forment leur intelligence à cette fin. C’est pourquoi nous proposons aux lycéens, aux étudiants et à leurs parents et éducateurs de découvrir des extraits de ces réflexions de Simone Weil1.

 

Louis Lafargue

 

  « La clef d’une conception chrétienne des études, c’est que la prière est faite d’attention. C’est l’orientation vers Dieu de toute l’attention dont l’âme est capable. La qualité de l’attention est pour beaucoup dans la qualité de la prière. La chaleur du cœur ne peut pas y suppléer. Seule la partie la plus haute de l’attention entre en contact avec Dieu, quand la prière est assez intense et pure pour qu’un tel contact s’établisse ; mais toute l’attention est tournée vers Dieu. Les exercices scolaires développent, bien entendu, une partie moins élevée de l’attention. Néanmoins, ils sont pleinement efficaces pour accroître le pouvoir d’attention qui sera disponible au moment de la prière, à condition qu’on les exécute à cette fin et à cette fin seulement.

  Bien qu’aujourd’hui on semble l’ignorer, la formation de la faculté d’attention est le but véritable et presque l’unique intérêt des études. La plupart des exercices scolaires ont aussi un certain intérêt intrinsèque ; mais cet intérêt est secondaire. Tous les exercices qui font vraiment appel au pouvoir d’attention sont intéressants au même titre et presque également.

  Les lycéens, les étudiants qui aiment Dieu ne devraient jamais dire : « Moi, j’aime les mathématiques », « Moi, j’aime le français », « Moi, j’aime le grec ». Ils doivent apprendre à aimer tout cela, parce que tout cela fait croître cette attention qui, orientée vers Dieu, est la substance même de la prière.

  N’avoir ni don, ni goût naturel pour la géométrie n’empêche pas la recherche d’un problème ou l’étude d’une démonstration et de développer l’attention. C’est presque le contraire. C’est presque une circonstance favorable.

  Même, il importe peu qu’on réussisse à trouver la solution ou à saisir la démonstration, quoiqu’il faille vraiment s’efforcer d’y réussir. Jamais, en aucun cas, aucun effort d’attention véritable n’est perdu. Toujours il est pleinement efficace spirituellement, et par suite aussi, par surcroît, sur le plan inférieur de l’intelligence, car toute lumière spirituelle éclaire l’intelligence.

  Si on cherche avec une véritable attention la solution d’un problème de géométrie, et si, au bout d’une heure, on n’est pas plus avancé qu’en commençant, on a néanmoins avancé, durant chaque minute de cette heure, dans une autre dimension plus mystérieuse. Sans qu’on le sente, sans qu’on le sache, cet effort en apparence stérile et sans fruit a mis plus de lumière dans l’âme. Le fruit se retrouvera un jour, plus tard, dans la prière. Il se retrouvera sans doute aussi par surcroît dans un domaine quelconque de l’intelligence, peut-être tout à fait étranger à la mathématique. Peut-être un jour celui qui a donné cet effort inefficace sera-t-il capable de saisir plus directement, à cause de cet effort, la beauté d’un vers de Racine. Mais que le fruit de cet effort doive se retrouver dans la prière, cela est certain, cela ne fait aucun doute.

[…] Il faut donc étudier sans aucun désir d’obtenir de bonnes notes, de réussir aux examens, d’obtenir aucun résultat scolaire, sans aucun égard aux goûts ni aux aptitudes naturelles, en s’appliquant pareillement à tous les exercices, dans la pensée qu’ils servent tous à former cette attention qui est la substance de la prière. Au moment où on s’applique à un exercice, il faut vouloir l’accomplir correctement ; parce que cette volonté est indispensable pour qu’il y ait vraiment effort. Mais à travers ce but immédiat l’intention profonde doit être dirigée uniquement vers l’accroissement du pouvoir d’attention en vue de la prière, comme lorsqu’on écrit on dessine la forme des lettres sur le papier, non pas en vue de cette forme, mais en vue de l’idée à exprimer.

  Mettre dans les études cette intention seule à l’exclusion de toute autre est la première condition de leur bon usage spirituel. La seconde condition est de s’astreindre rigoureusement à regarder en face, à contempler avec attention, pendant longtemps, chaque exercice scolaire manqué, dans toute la laideur de sa médiocrité, sans se chercher aucune excuse, sans négliger aucune faute ni aucune correction du professeur, et en essayant de remonter à l’origine de chaque faute. La tentation est grande de faire le contraire, de glisser sur l’exercice corrigé, s’il est mauvais, un regard oblique, et de le cacher aussitôt. Presque tous font presque toujours ainsi. Il faut refuser cette tentation. Incidemment et par surcroît, rien n’est plus nécessaire au succès scolaire car on travaille sans beaucoup progresser, quelque effort que l’on fasse, quand on répugne à accorder son attention aux fautes commises et aux corrections des professeurs.

 

  Surtout la vertu d’humilité, trésor infiniment plus précieux que tout progrès scolaire, peut être acquise ainsi. À cet égard, la contemplation de sa propre bêtise est plus utile peut-être même que celle du péché. La conscience du péché donne le sentiment qu’on est mauvais, et un certain orgueil y trouve parfois son compte. Quand on se contraint par violence à fixer le regard des yeux et celui de l’âme sur un exercice scolaire bêtement manqué, on sent avec une évidence irrésistible qu’on est quelque chose de médiocre. Il n’y a pas de connaissance plus désirable. Si l’on parvient à connaître cette vérité avec toute l’âme, on est établi solidement dans la véritable voie.

  Si ces deux conditions sont parfaitement bien remplies, les études scolaires sont sans doute un chemin vers la sainteté aussi bon que tout autre. Pour remplir la seconde il suffit de le vouloir. Il n’en est pas de même de la première. Pour faire vraiment attention, il faut savoir comment s’y prendre. Le plus souvent, on confond avec l’attention une espèce d’effort musculaire. Si on dit à des élèves : « Maintenant vous allez faire attention », on les voit froncer les sourcils, retenir la respiration, contracter les muscles. Si après deux minutes on leur demande à quoi ils font attention, ils ne peuvent pas répondre. Ils n’ont fait attention à rien. Ils n’ont pas fait attention. Ils ont contracté leurs muscles. On dépense souvent ce genre d’effort musculaire dans les études. Comme il finit par fatiguer, on a l’impression qu’on a travaillé. C’est une illusion. La fatigue n’a aucun rapport avec le travail. Le travail est l’effort utile, qu’il soit fatigant ou non. Cette espèce d’effort musculaire dans l’étude est tout à fait stérile, même accompli avec bonne intention. Cette bonne intention est alors de celles qui pavent l’enfer. Des études ainsi menées peuvent quelquefois être bonnes scolairement, du point de vue des notes et des examens, mais c’est malgré l’effort et grâce aux dons naturels ; et de telles études sont toujours inutiles.

 

  La volonté, celle qui au besoin fait serrer les dents et supporter la souffrance, est l’arme principale de l’apprenti dans le travail manuel. Mais contrairement à ce que l’on croit d’ordinaire, elle n’a presque aucune place dans l’étude. L’intelligence ne peut être menée que par le désir. Pour qu’il y ait désir, il faut qu’il y ait plaisir et joie. L’intelligence ne grandit et ne porte de fruits que dans la joie. La joie d’apprendre est aussi indispensable aux études que la respiration aux coureurs. Là où elle est absente, il n’y a pas d’étudiants, mais de pauvres caricatures d’apprentis qui au bout de leur apprentissage n’auront même pas de métier.

  C’est ce rôle du désir dans l’étude qui permet d’en faire une préparation à la vie spirituelle. Car le désir, orienté vers Dieu, est la seule force capable de faire monter l’âme. Ou plutôt c’est Dieu seul qui vient saisir l’âme et la lève, mais le désir seul oblige Dieu à descendre. Il ne vient qu’à ceux qui lui demandent de venir ; et ceux qui demandent souvent, longtemps, ardemment, Il ne peut pas s’empêcher de descendre vers eux.

L’attention est un effort, le plus grand des efforts peut-être, mais c’est un effort négatif. Par lui-même il ne comporte pas la fatigue. Quand la fatigue se fait sentir, l’attention n’est presque plus possible, à moins qu’on soit déjà bien exercé ; il vaut mieux alors s’abandonner, chercher une détente, puis un peu plus tard recommencer, se déprendre et se reprendre comme on inspire et expire. Vingt minutes d’attention intense et sans fatigue valent infiniment mieux que trois heures de cette application aux sourcils froncés qui fait dire avec le sentiment du devoir accompli : « J’ai bien travaillé. »

  Mais, malgré l’apparence, c’est aussi beaucoup plus difficile. Il y a quelque chose dans notre âme qui répugne à la véritable attention beaucoup plus violemment que la chair ne répugne à la fatigue. Ce quelque chose est beaucoup plus proche du mal que la chair. C’est pourquoi, toutes les fois qu’on fait vraiment attention, on détruit du mal en soi. Si on fait attention avec cette intention, un quart d’heure d’attention vaut beaucoup de bonnes œuvres.

  […] Heureux donc ceux qui passent leur adolescence et leur jeunesse seulement à former ce pouvoir d’attention. Sans doute ils ne sont pas plus proches du bien que leurs frères qui travaillent dans les champs et les usines. Ils sont proches autrement. Les paysans, les ouvriers possèdent cette proximité de Dieu, d’une saveur incomparable, qui gît au fond de la pauvreté, de l’absence de considération sociale, et des souffrances longues et lentes. Mais si on considère les occupations en elles-mêmes, les études sont plus proches de Dieu, à cause de cette attention qui en est l’âme. Celui qui traverse les années d’études sans développer en soi cette attention a perdu un grand trésor. […] Les études scolaires sont un de ces champs qui enferment une perle pour laquelle cela vaut la peine de vendre tous ses biens, sans rien garder à soi, afin de pouvoir l’acheter2. » 

 

1 Le texte complet de ces réflexions de Simone Weil peut être lu sous le titre De l’attention, préface de Jean Lacoste, édition Bartillat, 2018 (prix : 7€).

2 Matthieu 13, 44 : parabole du trésor caché dans un champ.

 

Le Dieu mendiant

           Triste novembre s’en est allé. Ce long mois qui apporte avec lui la nuit et le froid, le voilà enfin parti. C’est lui qui nous plonge dans l’hiver, lui qui tue le jour à petit feu et fait régner les ténèbres. Lui qui emporte la joie de l’été et des jours ensoleillés dans la tombe. Triste novembre…

           Et pourtant … si on y regarde mieux, novembre est l’aboutissement de toute l’année avant un nouveau cycle. L’aboutissement en effet. On ramasse les derniers fruits du verger. Les châtaigniers laissent choir les châtaignes, les arbres sèment la semence de l’avenir. Le geai chapardeur enfouit les glands sous les feuilles mortes. Le paysan laboure et sème le blé nouveau qui attendra au creux des sillons les jours nouveaux, tandis que la nuit étend son règne, rien ne semblant pouvoir l’arrêter. Tout semble terne. Et soudain, au détour d’un chemin, surgit un arbre flamboyant : ses feuilles sont revêtues de pourpre, d’or et d’ambre. Quoi ? Alors que la mort est en train de lui donner son ultime baiser, le voilà qui s’habille de sa plus belle livrée ? Et il n’est pas le seul ! Le long du ruisseau, les hauts peupliers processionnent tels des rois couronnés d’or, les chênes rutilants s’embrasent, les hêtres se prosternent dans leurs robes ambrées, les charmes s’illuminent, et les érables revêtent le soleil lui-même, comme s’ils capturaient sa lumière dans leurs feuillesaa agonisantes. Voilà que les arbres s’habillent pour mourir ! Les bourrasques de novembre emportent pourtant leurs feuilles avec elles, les jetant au sol, ne laissant bientôt que les branches nues. Nues ? Vraiment ? Le cycle se termine, mais les bourgeons sont déjà là, portant en leur sein la promesse que la lumière reviendra.

  Dans un cimetière, une famille meurtrie se penche une dernière fois sur le trou béant où repose un frère, un père, un fils. Les cœurs saignent. Tandis que le soir tombe sur la terre, les chants supplient, les dernières prières implorent, les flots de larmes ravagent les visages. Du fond de l’abîme j’ai crié vers toi Seigneur. Ecoute ma prière, sauve-moi de mes ennemis, sans toi, je suis perdu. Que la lumière qui ne s’éteint pas luise sur nos morts. Les arbres s’habillent pour mourir ! Et les hommes ? Les arbres sont de Dieu. Ils ont porté leurs bourgeons dans la nuit froide de l’hiver, espérant contre toute espérance, portés par les antiques prophéties, dans l’attente du Messie. Puis ils ont fleuri au printemps pour honorer sa mort et clamer sa Résurrection. Enfin, ils ont porté du fruit après la Pentecôte, les fruits du Saint-Esprit qui sanctifie les âmes. Enfin, ils ont semé et se sont habillés pour le jugement dernier à l’automne. Et les hommes ? Que font-ils ?

  Beaucoup se ruent dans les magasins, d’autres désespèrent face à leur monde qui devient fou, de dose en dose, de variant en variant. D’autres vouent toutes leurs forces au péché, ceux qui tuent les enfants dans le sein de leur mère, ceux qui adorent les idoles et les démons, ceux qui s’enivrent de la luxure et du plaisir. La nuit vient, elle semble tout emporter. Quelques hommes pourtant vont prier pour leurs morts, ouvrir les portes du Purgatoire pour remplir le Ciel, faire que Dieu soit glorifié. Enfin décembre. La nuit avance. Et pourtant, au solstice, le jour cessera de reculer, peu à peu, il va reprendre ses droits sur la nuit. Bientôt, Il sera là. Douce espérance.

  Dans le cœur des maisons où l’on aime Dieu, on fait la crèche. Les enfants s’en donnent à cœur joie. Mousse, terre, herbes, cailloux, sable, santons, petits chemins et petites rivières… Peu à peu un paysage apparaît. Au milieu, une simple étable, un peu de paille, un bœuf et un âne. La mère de Dieu est là, accompagnée de saint Joseph. La mangeoire est vide. Tout semble figé, prêt de s’animer d’un seul coup… La crèche s’animera à Noël. Enfin l’Avent ! Les prophéties de l’Ancien Testament nous l’ont promis. Depuis plus de 4000 ans… Les arbres flamboyants de l’automne aussi l’ont annoncé. Il va venir. Il va venir vaincre les ténèbres et le péché, apporter le salut et la lumière. La crèche incarne cette promesse. Joie de décembre !

Il va venir… Que va-t-Il trouver ?

  Avons-nous préparé nos âmes comme les arbres ont préparé leur mort ? Se vider de tout pour laisser la place aux bourgeons, aux fleurs, aux fruits de la sainteté ? Il faut se dépouiller pour renaître. Mourir au monde pour accueillir le Dieu chassé de la ville et de ses hôtelleries, pour recevoir le Dieu réfugié dans une étable. Cet enfant est si petit. Quoi ? Dieu si faible ?

 

  Dieu emmailloté, revêtu de la nature humaine, l’un de nous. Dieu aurait pu sauver les hommes comme nous donnons l’aumône : d’un geste condescendant, donner une pièce à l’indigent. Mais Il n’a pas voulu nous donner l’aumône. Il a voulu être vendu pour 30 malheureux deniers. Il a voulu venir parmi nous, se faire plus souffrant, plus faible, plus misérable que nous. Dieu humilié sur la croix, nu, meurtri, moqué, insulté, couvert de crachas et de plaies innombrables. Dieu vient mendier notre amour. C’est cela qu’il veut ce petit enfant dans la crèche, c’est cela que signifient ses langes qui lui enserrent les bras et les jambes, c’est cela qu’annonce la Création toute entière. C’est cela qu’a refusé l’orgueil de Satan.

  Alors, qu’allons-nous faire ? Dieu vient, Il vient mendier notre Charité, comme il mendia le manteau de saint Martin. Dépouillons-nous de tout pour Lui, donnons-Lui tout ce que nous avons : notre santé, nos richesses, notre vie, notre honneur même. Il en fera ce qu’Il voudra. Il prendra ce qu’Il veut, comme Il veut, quand Il veut. Tout Lui appartient. N’a-t-Il pas tout donné ? Absolument tout ?

  Décembre, le jour reprend ses droits. A Pâques, il vaincra ! A la Pentecôte, sanctifié, nous porterons de bons fruits. Puis reviendra novembre, joyeux novembre. Nous nous habillerons pour mourir, au crépuscule de notre vie. Et Dieu viendra moissonner, nous emporter au Ciel, là où luit la lumière qui ne s’éteint jamais.

Novembre, l’aboutissement de tout. Décembre, le commencement de tout.

Louis d’Henriques

 

Lessive maison, simple et économique !

 

            Mélanger 20 g de copeaux de savon de Marseille pour un litre d’eau tiède et verser dans un bidon.  Diverses huiles essentielles peuvent être ajoutées, (lavande vraie ou tea tree (arbre à thé) aux vertus antifongiques et antibactériennes), ce qui parfume agréablement la lessive.

Le savon de Marseille en copeaux peut être utilisé, mais il est aussi possible de râper le cube de savon par soi-même. Privilégier le savon vert (ou olive), de meilleure qualité que le blanc (végétal). Il est possible de l’acheter par correspondance (Savonneries Marius Fabre, du Fer à Cheval, etc…).

  Personnellement, le sachet de 750 g de copeaux de savon vert acheté 14,90 € à la Savonnerie du Fer à Cheval dure environ un an et demi. Je prépare deux litres de lessives toutes les trois semaines environ et j’utilise 75-100 ml par lessive, pour une famille de six personnes dont quatre enfants en bas âge. Economiqueac et peu chronophage (temps de préparation 5 min), efficace (autant que la lessive du supermarché).

Dernier avantage : Les restes d’un cube de savon de Marseille d’usage quotidien peuvent terminer dans la lessive. Ainsi, rien n’est perdu !

 

De la part d’une de nos lectrices, avec tous nos remerciements (Mme M-C G).

Je le redis : que les championnes de l’organisation n’hésitent pas à partager leurs trésors d’organisation en écrivant au journal. Partageons nos talents …