L’unité intérieure

          9 août 1943, dans une prison berlinoise un autrichien du nom de Franz Jagerstätten est guillotiné pour avoir refusé de signer un « papier ». Ce paysan des montagnes autrichiennes sacrifie sa vie paisible, l’amour de sa femme et de ses filles en refusant de prêter allégeance au Führer qu’il considère comme l’Antéchrist. Cette simple signature est pour lui contraire à sa foi et à ses principes et rien ne pourra l’en détourner, ni les reproches et la haine des ses anciens amis, ni l’attrait d’une vie simple sans histoire dans ses chères montagnes, ni les conseils rassurants de l’évêque.

Vous aurez reconnu le synopsis du très beau film, ou plutôt de la méditation, de Terence Malik « Une vie cachée » sortie récemment en salle. Cette belle fresque d’une simplicité déconcertante fait surgir un certain nombre de questions.

Sommes-nous logiques et cohérents avec nous-mêmes? Avons-nous identifié les principes clefs qui forgent notre existence et pour lesquels nous sommes simplement prêts à quitter notre confort quotidien et à nous battre. Ces principes sont-ils véritablement les nôtres, ancrés en nous et comme faisant partie intégrante de notre être ou sont-ils juste un vernis déposé superficiellement par une culture et une éducation qui s’effritera à la première difficulté ?

Si nous avons bien ces quelques principes, cette belle et solide charpente qui nous constitue, sommes-nous sûrs qu’ils sont justes et bien ordonnés à la Vérité ? Faisons-nous régulièrement ce travail de nous reposer la question : à quoi je crois, quel est le but de ma vie et l’objet de mon amour ? Quels moyens vais-je utiliser pour parvenir à ce but et quels moyens ne vais-je pas utiliser, ces moyens sont-ils justes ?

Mais ce n’est pas tout d’avoir des principes solides et conformes au Bien, ni même d’y être fidèles, encore faut-il les appliquer avec humilité, mais surtout prudence et discernement par rapport à notre devoir d’état et à ce que Dieu attend de nous. Il nous faut donc former, ajuster et aiguiser ce jugement sain tout au long de notre vie, et surtout l’éclairer avec la prière, la méditation et les conseils avisés.

Heureux serez-vous si durant votre existence, vous parvenez à cette unité intérieure qui vous fera agir comme vous pensez et penser comme Dieu le veut.

Charles

 

Patience…

Bloqué depuis 15 minutes dans les bouchons Porte de la Chapelle, je trépigne ! Quelle lenteur ! Jamais je n’arriverai à temps. Que de temps encore perdu à attendre ! Cet accident sur la route, toujours quand il ne faut pas,      décidemment je n’ai pas de chance aujourd’hui. Vite, que dit Waze ? N’y a-t-il pas d’itinéraire plus rapide ? Non, il plante et se ferme. Impossible de relancer l’application ! Que dit Google maps ? Ouf, je ne suis pas perdu, Google me trouve un itinéraire de contournement, je n’arriverai pas trop en retard …

Qui n’a pas déjà vécu cette scène ? Tout, tout de suite et sans attendre, tel est notre « art » de vivre. Ce n’est pas nouveau, déjà dans les années 30 le père Lyonnet disait : « notre plus grand défaut et notre plus grave faiblesse consiste à vouloir de suite être au but et obtenir le progrès souhaité ».

En effet, nous menons une vie trépidante qui nous donne l’illusion d’avancer en permanence vers un mieux potentiel. Nous n’avons plus besoin d’attendre car beaucoup de choses peuvent être obtenues très rapidement voire quasi instantanément. Et nous sommes tout décontenancés quand dans notre vie, un projet n’avance pas aussi vite que nous l’attendions. Quand le Bon Dieu que nous implorons ne nous exauce pas de suite. Quand nous faisons de notre mieux pour passer en classe supérieure et que malgré cela nous devons redoubler. Quand nous voyons le mal qui se fait dans la société et que nos efforts et ceux des hommes de bonne volonté restent impuissants et apparemment sans effet ! Qu’attend le Bon Dieu ?

Nous sommes souvent tentés soit de nous décourager et d’abandonner, soit de bousculer, de précipiter les choses pour avancer. Oui dans une certaine mesure, faisons tout notre possible, mais laissons Dieu choisir son heure. N’oublions pas qu’avant d’agir, et de passer à l’action, Jésus est resté dans l’ombre et s’est « préparé » pendant 30 ans, qu’avant de ressusciter et de montrer sa victoire à la face du monde, il y a eu le calvaire et 3 longues journées de mort. Ces longues journées parfois monotones qui nous paraissent inutiles et vaines permettent à la semence de lever, de grandir et finalement de mûrir sous le soleil de la grâce. Alors ne soyons pas trop impatients et laissons la Providence guider les grands et les petits projets de notre vie. Elle sait ce qu’elle fait et quand elle le fait.

Charles

Charpentier !

Charpentier ! Tel était le métier de Saint Joseph notre saint patron dont nous venons de célébrer la fête ! Etait-ce un « bon » métier ou un métier dégradant ? Un métier réservé aux personnes « n’ayant pas fait d’études » comme disent les savants ayant fait 5 ans en 10 années. Comment juger d’un métier et surtout comment choisir son métier ? Sur quels critères et dans quel but ?

Etant donné que depuis un certain Adam, nous devons travailler pour vivre, la fin première d’un métier est de nous permettre de gagner de quoi subsister. Non seulement pour nous-mêmes mais pour tous ceux qui nous sont à charge et qui ne sont pas en mesure de gagner leur pain (nos enfants), ou dont ce n’est pas la mission, comme notre femme.

Une autre fin de notre métier est de participer au bien commun de la société en y jouant le rôle social qui nous incombe, ce qui permet de développer notre personnalité et de nous épanouir en réalisant notre mission sur terre et en gagnant des mérites pour le ciel.

Un « bon » métier doit donc nous permettre de gagner suffisamment pour élever chrétiennement une famille nombreuse : ce qui veut dire beaucoup d’argent. Les bonnes écoles (et ce doit être une priorité pour nous que d’y mettre nos enfants) sont un véritable investissement !

Un « bon » métier doit vous permettre de jouer un rôle dans la société en vue du bien commun. C’est le cas de beaucoup de professions.

Cependant, il doit en premier lieu vous permettre de gagner votre ciel, ce qui exclut ceux qui vous contraindraient à poser des actes immoraux ou qui vous mettraient dans l’incapacité d’accomplir votre devoir de chrétien.

Enfin un « bon » métier doit vous permettre de vous épanouir en accomplissant la mission que la Providence vous a réservée. Il doit donc par nature correspondre à vos aptitudes et à vos aspirations. Ne cherchez pas à être marin si vous avez une peur bleue de la mer, ou mécanicien si seule la littérature vous passionne.

Et dans le contexte actuel, je dirais même que le premier critère (celui de votre salut étant évident) doit être celui de vos aptitudes, de vos goûts et aspirations. En effet, aujourd’hui, à condition d’être excellent, la plupart des métiers aussi bien manuels qu’intellectuels peuvent rémunérer suffisamment pour élever une famille. Si certaines professions comme celle d’ouvrier dans l’industrie par exemple, sont encore trop faiblement rémunérées, de nombreux métiers de l’artisanat offrent une alternative intéressante aux « classiques » métiers intellectuels pour lesquels tous ne sont pas fait. Mieux vaut être un bon artisan qu’un piètre ingénieur ! Qui n’a pas entendu son plombier, couvreur ou garagiste se plaindre de ne pas trouver de jeunes sérieux et fiables à embaucher même à un tarif tout à fait correct ? La condition essentielle est un travail permanent à la recherche de l’excellence, principalement conditionnée par la volonté d’apprendre, de bien faire et de toujours vouloir progresser. Il y a donc de la place pour tout le monde à condition d’être fiable et compétent, ce qui est facile quand on fait un métier qui nous plaît.

Alors cher ami, bon courage pour trouver ta voie, ou surtout celle que le Bon Dieu te réserve. Ne te limite pas aux professions intellectuelles et surtout, quel que soit ton domaine de prédilection, vise l’excellence. C’est à ce prix et à ce prix seulement que tu parviendras à t’épanouir, à gagner suffisamment pour pouvoir faire vivre ta famille et permettre à ta femme d’exercer elle aussi sa mission, sa belle mission de mère et d’éducatrice auprès de tes enfants au cœur d’un foyer rayonnant.

Charles

Tradition et modernité, l’alliance impossible ?

Voiture autonome, intelligence artificielle, robotisation, transhumanisme ou encore plus proche de nous, Instagram, Snapchat, Iphone X, puce de paiement, cryptomonnaie… autant de techniques modernes qui n’existaient pas il y a cinq ans et dont on ne parlait pas il y a dix ans mais qui s’invitent dans notre travail et notre vie quotidienne. Qu’en penser ? Faut-il dans un dernier réflexe de survie de l’homme face à la machine tout rejeter en bloc et aller élever des chèvres dans le Larzac ou bien au contraire applaudir béatement au progrès matériel comme source inéluctable du progrès moral et des lendemains heureux ? La question est délicate et il faut nous la poser très régulièrement car ce n’est pas simplement de notre avoir qu’il s’agit, mais parfois de notre être en tant qu’Homme, créature enfant de Dieu.

Si l’on résume l’apport global des techniques modernes à l’humanité, on pourrait dire qu’elles permettent de gagner toujours plus en efficacité, en fiabilité et en répétabilité. Soit de faire plus de choses, mieux, en moins de temps et avec moins de monde. Plusieurs questions se posent alors : que font les gens pendant tout ce temps « gagné »  et comment remplacer le lien social qu’ils établissaient en effectuant leur travail avec leurs collègues ? Travail qu’ils ne font plus maintenant car il est fait par une machine et collègues qu’ils n’ont plus parce qu’ils ont été remplacés par des machines. Une partie de la solution réside dans le fait qu’il faut du monde pour concevoir installer et régler les machines, et du monde pour s’occuper de toute cette industrie complexe, autrement dit pour légiférer, assurer et financer. Mais toute cette partie est aussi de plus en plus automatisée. Prenons un exemple :

Dans le train entre Londres et Paris, je commande en deux clics sur ma tablette mon panier de course hebdomadaire pour livraison à 20 h devant la porte de mon appartement. A 300 km de là un robot vient faire du « picking » dans l’entrepôt Auchan et déposer la caisse dans une camionnette qui demain sera autonome. A 20h00 arrivé depuis 15 minutes, je reçois une notification sur mon smartphone ; le panier est livré en bas de chez moi. Je n’ai plus qu’à ouvrir la porte pour le saisir et ranger les courses : « il faut tout faire soi-même ! A quand le robot rangeur de courses cela me ferait gagner un temps fou !! »

Bilan : Beaucoup temps gagné, des économies de carburant, moins d’émissions de CO2, car la camionnette groupe les commandes en fonction de leur localisation, mais aussi pas une seule parole adressée au vendeur (il n’y en a plus). Finies les discussions avec le boucher sur le temps, la famille et par-ci par-là, le curé du village et le Bon Dieu. Finis les entraides

et les dépannages entre voisins, c’est tout un lien social qui se distend de plus en plus et qui peu à peu n’existe plus. Les familles éclatent, les gens sont de plus en plus isolés et se raccrochent à leur téléphone qui leur donne l’illusion d’exister aux yeux des autres car leurs posts sont likés sur facebook par des « amis » à l’autre bout du monde. Alors, gagner du temps toujours et encore, mais pour quoi faire, pour l’utiliser à chercher à en gagner encore plus, pour gagner plus d’argent ? Pour s’isoler et ne penser qu’à soi et à son triste sort.

Alors que faire ? Surtout ne pas faire ses courses en ligne ? Si bien sûr si c’est plus pratique, mais utiliser le temps gagné pour discuter avec la voisine, aller aider à la paroisse et faire du bien autour de soi. Utiliser le temps « gagné » pour les autres et non pour soi. En effet, une partie de ce « temps gagné » ne leur appartenait-il pas ?

Nous ne pouvons faire renaître le passé et il nous faut non seulement utiliser les moyens modernes, mais même parfois promouvoir leur utilisation sous peine, dans le milieu professionnel, de faire faillite et ainsi de nuire au bien commun.

Cependant nous avons aussi le devoir d’orienter autant que possible l’utilisation de ces moyens de façon chrétienne et humaine. Et plus ces moyens sont performants plus ils sont potentiellement dangereux s’ils sont utilisés à mauvais escient.

Notre rôle, en tant que catholiques engagés dans la cité et chefs chrétiens est donc d’utiliser et de canaliser ces puissances vers le bien, et même dans certains cas de les interdire si elles sont mauvaises en soi. De donner un cadre à leur utilisation pour que la Terre ne devienne pas un enfer déshumanisé. Pas question donc de nous isoler dans notre coin en attendant que cela passe et en se disant que dans tous les cas, cela va bien s’écrouler un jour, tel un géant aux pieds d’argile.

Par ailleurs, notre ancrage de Catholique dans ce qui est immuable, doit nous permettre de prendre de la hauteur et de garder notre capacité à juger et à exercer un regard critique sur ce monde en marche perpétuelle et accélérée dont le seul but semble être le mouvement. Ainsi, le progrès technique et son utilisation doivent être guidés par un jugement formé à l’aune de la tradition et de l’histoire.

Il ne faut pas non plus oublier que plus ces moyens sont sophistiqués, plus ils reposent sur un équilibre fragile et instable qui peut s’écrouler d’un instant à l’autre. Il est donc très important de savoir s’en passer et cela peut constituer la première partie de l’éducation d’un enfant, avant de lui apprendre quand il sera plus mûr à maîtriser et à se servir raisonnablement des moyens modernes qui vont décupler sa « puissance ».

Alors monte vite dans le TGV, si tu veux, fais tes courses sur internet et achète-toi les « Google glasses », mais surtout continue à aimer, à aider ton prochain et à lui apporter la Vérité que tu as eu la chance de recevoir ! Et garde un pied dans le réel et le concret, dans ce qui demeure, cela peut servir.

Charles

Ô joie !

Le bonheur est au-dedans de chacun de nous. Il n’est pas au dehors, inutile de le chercher ailleurs. Dieu nous le donne, à nous de le vivre et d’en rayonner !

Joie de vivre, d’avancer dans la vie à grands coups de rame

Joie de penser, de rêver, d’établir des projets

Joie de se dépenser, d’avoir un corps robuste

Joie d’aimer, de se donner tout entier

Joie de se sacrifier

Joie de tenir dans les tempêtes, face aux éléments, la tête droite et le regard en avant.

Joie paisible dans l’épreuve qui dure, de l’enfant de Dieu qui sait que son père veille sur lui.

Joie ultime quand tout s’achève et que le cœur saigne de souffrir et mourir par amour.

Finalement quoi qu’il arrive, il y a toujours un prétexte pour être heureux. Comment ne pas l’être !

Laisse le bonheur, cette lame de fond dans l’âme du chrétien emporter tout sur son passage !

Charles

Vive la rentrée !

Début septembre, il fait encore beau à Paris et le parfum des vacances ne s’est pas encore estompé, mais rien à faire, c’est la rentrée et il faut rejoindre l’école ou l’université, retrouver les amphis ternes et les professeurs un peu aigris.

Mais pourquoi cela après tout ? Quel est vraiment le but de faire des études, c’est une période de la vie, un passage obligé avant la vie professionnelle qui arrivera bien un jour mais le plus tard possible ? Ou n’est-ce pas plutôt le moyen de décrocher un travail intéressant ? Mais est-ce vraiment possible ? Pourquoi travailler, au fond ?

A la base le problème vient de notre liberté ! En effet Dieu nous a créés libre donc en puissance, mais il nous revient de mouvoir cette liberté vers le bien et de l’utiliser en vue de notre fin. Et le travail est l’utilisation, la mise en œuvre de notre liberté à des fins créatrices. Quand nous travaillons, nous donnons une part de nous même en réalisant quelque chose. En ce sens, nous nous rapprochons de Dieu qui est le créateur. Or nous sommes faits pour Dieu, nous nous rapprochons donc de notre fin, ce qui nous procure du bonheur et contribue à notre épanouissement. C’est pourquoi d’un point de vue purement philosophique, et aussi paradoxal que cela puisse te paraître, nous devons travailler pour être heureux.

Pour rester plus pragmatique, le travail nous permet de gagner notre vie, de subvenir à nos besoins et surtout de pouvoir entretenir une famille. De façon indirecte, il nous permet donc de nous accomplir encore plus parfaitement en nous donnant le moyen de transmettre la vie en étant capable de donner une bonne éducation à nos enfants.  Ce moyen nous fait participer encore plus à la puissance créatrice de Dieu et nous apporte le bonheur.

Tout ceci est beau en théorie je te l’accorde, mais en pratique encore faut-il avoir un métier qui nous plaise et dans lequel nous soyons suffisamment à l’aise pour y être bon et donc nous y épanouir. Alors comment choisir ? Vers où s’orienter, il y a tellement de choix !

D’abord il te faut observer autour de toi et poser des questions à ceux qui travaillent pour te faire une idée de leur quotidien. Ensuite apprends à te connaître et à discerner tes goûts d’une part mais aussi tes qualités et tes dons d’autre part. Enfin, sois ouvert aux opportunités qui te seront soumises ou proposées (stage, job d’été ou discussions…). Et finalement laisse-toi guider par la Providence qui te mènera à ta place.

N’oublie jamais non plus de parachever ta formation religieuse et doctrinale. Tu as peut-être eu la chance de recevoir les bases (c’est un peu comme le solfège : nécessaire mais pas suffisant !), il te faut maintenant  continuer à lire, à te former par tous les moyens qui te sont offerts ; cela fait partie des devoirs du catholique et il y a tant à découvrir…

Enfin, où que tu sois, et quelle que soit l’orientation que tu as prise, donne le meilleur de toi-même, tu ne le regretteras jamais et tu en récolteras toujours les fruits, soit maintenant, soit plus tard, soit ici, soit là-haut ! Alors au travail cher ami, tu verras, tout cela n’est finalement qu’un jeu si tu t’y laisses prendre, et il y a moyen de vraiment t’amuser et t’épanouir en travaillant ! Incroyable non ? En plus tu y gagnes ton ciel, alors fonce et au boulot !!

Charles

Compagnons de cordée

Début juillet à Chamonix, arrivé par le train de la veille, j’élabore mes plans pour les jours suivants. Accoudé à la balustrade du balcon, une paire de jumelles sur le nez, il s’agit d’évaluer l’état des parois rocheuses pour planifier les sorties réalisables en ce début de saison, l’hiver a été long et neigeux… Je laisse planer mon regard d’une paroi à l’autre  quand soudain il s’arrête sur une cordée. Deux alpinistes se lancent à l’assaut du grand couloir en direction du refuge du Goûter.

Quel spectacle ! La voie est délicate, mais les deux hommes se complètent admirablement, les gestes sont comptés, et l’on devine qu’ils se comprennent à demi mots. Quand l’un bute dans une passe délicate, l’autre prend le relais, passe en tête et ouvre la voie découvrant ainsi de nouveaux espaces à son compagnon.

Soudain, celui qui est en tête perd pied, il glisse d’abord lentement puis plus vite le long de la paroi, va-t-il emporter son compagnon ? Non, son ami, car il s’agit de cela, est suffisamment bien amarré au rocher, voilà qu’il parvient à enrayer la chute et à remonter progressivement l’ami bien cher à qui il vient de sauver la vie… Un regard profond, sans un mot, ils se sont compris.

La montée reprend, précautionneusement d’abord puis plus rapidement, enfin,  les voilà arrivés au refuge où nos deux amis passeront la nuit avant de reprendre leur ascension vers le sommet tant espéré…

Telle est l’amitié dans la vie. Pouvoir  compter sur un bon compagnon de route avec qui partager les bons moments et les difficultés, animés de la même foi et tendus vers un même but, quelle chance et quelle richesse. Il saura t’aider à discerner, à trouver la bonne voie, ses conseils ne te donneront pas la solution, mais t’aideront à la trouver. Dans les coups durs, si tu perds pieds et que tu as l’impression de glisser vers l’abîme sans fond, il sera là pour te rattraper et te remettre délicatement sur la voie du  ciel. Si c’est un véritable ami, tu sais que tu peux toujours compter sur lui, il est prêt à tout entendre car il t’aime, c’est ton ami. Et à son tour, si c’est lui qui traverse des difficultés, alors tu seras toujours là pour lui. De pareilles amitiés sont des dons de Dieu, mais elles se construisent et s’entretiennent le long de la rude ascension de la vie. Si tu as  un tel trésor alors ne le gaspille pas et fais le prospérer en l’approfondissant. Si tu n’en as pas encore trouvé, alors cherche à en créer. Ce genre d’amitié profonde et sincère ne se fait pas en un jour et demande que tu sois prêt à te livrer, à donner de ta personne et à donner ta confiance. Cependant, ne livre pas les clefs de ton âme à n’importe qui de peur qu’il ne l’entraîne dans le précipice. Sois précautionneux dans tes choix, mais généreux aussi. Il te sera rendu au centuple.

Charles

« La Vérité vous rendra libre »

Cher ami, tu as 20 ans, 25 ans, tu es jeune et avance dans la vie à grand coups de rames, tu es enthousiaste et prêt à changer le monde, d’ailleurs c’est certain, nous allons y arriver ! Mais tu es aussi à l’âge des choix, et parfois tu hésites à prendre telle ou telle direction. Alors tu pries, tu prends conseil, mais ce n’est pas plus clair pour autant. Sur certains sujets compliqués, les avis divergent et parfois même les passions se déchaînent. On prend parti, on s’emporte, chacun est sûr d’avoir raison. Les anathèmes commencent à pleuvoir, si les uns pensent cela c’est qu’ils sont libéraux, non, ce sont ceux-ci qui sont un peu extrémistes !

Alors tu t’inquiètes, tu ne sais plus que faire, tu poses les rames et commence à dériver au fil de l’eau et des courants contraires… Mais non, tu ne vas pas te laisser faire et ballotter, alors d’un coup tu te réveilles et prend parti hardiment, ou plutôt tu choisis un courant et tu le suis, mais as-tu réellement choisi ? Heureux seras-tu si une vague un peu plus haute que les autres vient te rafraîchir les idées et te faire prendre conscience qu’à nouveau tu dérives !

Pourquoi choisir, comment choisir, c’est si difficile, et si je me trompais ?

« Aime et fait ce qu’il te plait », voilà la réponse de St Augustin. Aime qui ? Aime ton Dieu et ton prochain et n’en dérive pas d’un pouce, c’est finalement le choix principal qu’il faut poser tous les jours, à chaque instant. Et n’est-ce pas simple de tout juger à l’aune de ce cet amour et de ce seul principe et de choisir le reste en fonction, et une fois ce choix fait de continuer à aimer sans s’embarrasser l’esprit d’inquiétudes supplémentaires. L’amour de Dieu entraîne nécessairement vers l’amour de tout ce qui est vrai et, en conséquence, vers la haine pour tout ce qui est faux. A partir de là tu peux te fixer une règle de vie. Et si tu t’aperçois que ton choix t’empêche d’aimer vraiment Dieu, alors n’aie pas honte de changer d’avis avec humilité.

Mais quand faut-il choisir ? Est-il nécessaire de toujours avoir un avis sur tout ? Il faut parfois s’extraire de ce piège qui consiste à devoir toujours choisir pour un parti ou un autre. Ne sommes-nous pas libres d’avoir un avis propre et nuancé. Dans certains cas, nous ne sommes pas compétents pour juger et poser un choix raisonnable, il vaut mieux dans ces cas là accepter de ne pas être compétent sur tout et s’abstenir. Le choix est nécessaire uniquement quand les conséquences de ce choix ont un impact sur la vie naturelle et spirituelle. Alors si la solution n’est pas évidente, il faudra prier, étudier, demander conseil, et finalement choisir avec humilité sous le regard de Dieu. On le sait,  nous devons nous engager quand la foi et les mœurs sont en danger ; tout le reste, laissons le de côté et libérons nous l’esprit de ces inquiétudes inutiles !

Alors cher ami, quels que soient les choix que tu auras à poser dans ta vie, prend ton temps, prie, aime et juge par toi-même sous l’amour de Dieu, « La Vérité nous rendra libre » et quelle est cette Vérité sinon l’amour de Dieu crucifié et ressuscité pour nous.

Charles

La Patrie

« Etranger, mon ami, tu me demandes ce que signifie le mot « Patrie ». Si tu as une mère et si tu l’honores, c’est avec un cœur de fils que tu comprendras mes propres sentiments. Ma Patrie, c’est la terre de France où mes ancêtres ont vécu. Ma Patrie, c’est cet héritage intellectuel qu’ils m’ont laissé pour le transmettre à mon tour.

Viens voir, étranger, la beauté des paysages de France, la splendeur des monuments édifiés par mes aïeux. Va te reposer dans le vert marais poitevin, admire les roches rouges d’Azay qui se baignent dans le bleu de la mer de Provence. Chemine simplement de Paris vers Lyon. Sur la route, près d’Avallon, l’élégance raffinée de la basilique de Vézelay fera surgir pour toi l’épopée de nos croisades. Tu arriveras plus loin au château de la Rochepot qui donne à la région un air médiéval. N’oublie pas de visiter en Bourgogne les ravissants hospices de Beaune. Ne néglige pas le barrage de Génissiat. Continue, regarde, réjouis-toi de tant de beauté.

Mais si la France, ma Patrie, n’était que belle et aimable, mon amour pour elle ne serait pas si grand. Elle est mieux encore : intelligente et cultivée. La clarté de sa pensée, la finesse de son esprit, l’excellence de son goût te sont déjà connus. Des idées venues de France ont influencé l’humanité tout entière. Sais-tu, par exemple, que la bibliothèque personnelle de Frédéric II de Prusse à Berlin, ne contient que des livres écrits en français ? Ainsi, bien au-delà de nos frontières, des hommes de France sont célèbres : philosophes, écrivains, poètes, artistes, savants. Pascal, Molière, Vigny, Delacroix, Berlioz, Pasteur : tous ont contribué à la gloire de la France.

Et vous, héros humbles et méritants, qui avez fait la France brave et fidèle, vous guerriers morts pour la Patrie, comme je vous suis reconnaissant de m’avoir conservé ce précieux bien de mes ancêtres ! De Bayard à Guynemer, des premiers chevaliers aux soldats des dernières guerres. Que de dévouement, que de sacrifices !

Et toi, mon ami, qui es aussi comme moi une créature de Dieu, ne vois-tu pas qu’ici en France, tu es en terre chrétienne ? Les oratoires pittoresques, les calvaires aux croisées des chemins, les flèches de nos cathédrales sont les témoins de pierre d’une foi vivante. Ma Patrie, bonne et pieuse, a vu naître de grands saints. Le sens missionnaire de Saint Bernard, la vertu de Saint Louis, la charité de Saint Vincent de Paul, le zèle du Curé d’Ars sont le vrai trésor laissé par nos ancêtres. De la grande Sainte Jeanne d’Arc à la petite Thérèse, de l’épopée de l’une à la vie si simple de l’autre, je retrouve le courage et la bonté des femmes de France. Aux plus humbles d’entre elles s’est montrée la Vierge Marie. A travers Catherine Labouré, Bernadette de Lourdes, quel honneur pour la France !

Tu comprends maintenant pourquoi, ami étranger, j’aime et je vénère ma patrie comme ma mère ; pourquoi, si riche de tout ce qu’elle me donne, je désire transmettre cet héritage.

Ne crois pas que cet amour que j’ai au cœur soit aveugle. Mais devant toi, je ne dirai pas les défauts de ma mère Patrie. Car tu sais bien qu’un fils ne gagne rien à critiquer sa mère. C’est en grandissant lui-même qu’il la fait grandir.

Si je veux ma Patrie meilleure et plus saine, que je devienne moi-même meilleur et plus sain.

La France, ma Patrie a tant de qualités que je ne saurais, ami étranger, te priver de sa douceur ; si tu sais découvrir ses charmes et ses vertus, tu l’aimeras, toi aussi. Je partagerai avec toi ses bontés, et loin de m’appauvrir de ce don, je m’enrichirai de cette tendresse nouvelle que tu lui porteras. Mais ne l’abîme pas, ami étranger, la France, ma douce Patrie, ma chère mère ; ne la blâme pas, ne la pervertis pas, car je suis là, moi son fils, prêt à la défendre1

Je te laisse méditer aujourd’hui ces très belles lignes…

Charles

1 Copie d’un élève de 3ème, lauréat national en 1976  lors d’un concours écrit sur le thème de la Patrie: « Que signifie pour vous le mot : Patrie ? »

Le coin des jeunes

 

Ma vie à grande vitesse !

Fini la pension, c’est ta première rentrée en tant qu’étudiant. Tout excité ce dimanche soir, tu montes dans le TGV pour Paris sous l’œil inquiet de tes parents sur le quai. Le train démarre, les wagons s’ébranlent en douceur puis accélèrent progressivement, les lumières défilent de plus en plus vite, le train accélère encore, et te voilà lancé à 320km/h. Cela s’arrêtera-t-il un jour, non c’est parti, c’est la vie qui défile. Paris, le métro bondé, les cours, le travail, les amis, encore le métro, ouf, tranquille chez moi, une pause ? Non c’est reparti, sms, WhatsApp, Facebook, je communique avec le bout du monde, mon esprit se déplace à la vitesse de la lumière, mais il s’agite, s’excite, s’inquiète…  1 ans, 2 ans, 5 ans ont passé, depuis cette première rentrée. Les études sont finies et c’est le boulot qui commence, pression du résultat, il faut réagir dans la seconde, répondre aux mails, au téléphone qui sonne. Un sms, tu réponds en traversant la route, BOUM !!!

Tout s’arrête, cette fois c’est fini. Nous sommes arrivés au terminus, tout le monde descend ! Qu’as-tu fait de ta vie ? Me connais-tu seulement, Moi qui t’ai fait signe plusieurs fois sur le bord de la voie ? Mais non tu allais trop vite, pas le temps de t’arrêter pour penser à Moi, pour penser à toi, au sens de ta vie, à la direction que tu prenais. Trop occupé pour penser à l’essentiel, à ton âme rachetée à grand prix par mon Fils bien aimé, tu as préféré la vendre uniquement au profit de la production de biens matériels sans y penser seulement, simplement parce tout le monde fait comme ça et que tu n’y as pas réfléchi un seul instant. Mais maintenant que tu as le temps, l’éternité, il est trop tard mon ami, c’est l’enfer qui t’attend.

Alors cher ami ne te laisse pas entraîner par le rythme infernal de cette vie hyper connectée et arrête-toi régulièrement en gare pour prendre du recul et redresser la direction par rapport à l’essentiel, par rapport au but de ta vie qui est le bonheur suprême, ton salut éternel et non les plaisirs fugitifs procurés par les bien matériels de cette vie passagère. Pour ce faire, quoi de mieux en ce début d’année que de prendre la résolution de faire une retraite spirituelle dans les mois qui viennent, belle occasion pour changer le rythme et l’orientation de ta vie. Ton âme en a besoin, elle qui s’asphyxie peu à peu alors pense à elle, c’est le prix du bonheur.

Charles