Chercher le Beau

Chère Bertille,

 

J’aimerais, dans cette lettre, échanger avec toi sur le Beau. Dans un monde où l’immoralité, la laideur se répandent, nous devons réagir par le Bien, le Beau, les vertus chrétiennes. Comme nous aimons nous entourer de bons amis, goûter de bons mets, il faut savoir s’entourer de belles choses, développer le goût du beau, de l’art, de la créativité, éveiller nos sens à ces belles choses et les éveiller chez les autres.

Le Beau, c’est « la splendeur de la perfection », il s’impose à nous. Il est objectif et non subjectif, comme on veut nous le faire croire de plus en plus. C’est donc notre goût que nous devons perfectionner pour qu’il sache goûter les belles choses. C’est comme le vin : la première fois que nous en buvons, nous ne pouvons pas dire qu’il est bon. Il faut en goûter plusieurs pour savoir les apprécier, les différencier. « On sait que le goût se perfectionne, comme nous perfectionnons notre jugement, en étendant nos connaissances, en donnant la plus grande attention à notre objet, et en nous exerçant souvent »1.

Le Beau est une part de la perfection de Dieu, un petit bout du Ciel sur la terre. Il doit nous rapprocher de Dieu et élever nos âmes : « une âme qui s’élève, élève le monde ». En goûtant le Beau, forcément nous voudrions le faire découvrir aux autres. Une belle chose, comme une bonne nouvelle, nous avons besoin de la partager avec d’autres. Par le Beau, les âmes peuvent se rapprocher de Dieu, l’atteindre et augmenter en elles leur propre perfectionnement.

Il faut donc s’éduquer soi-même au Beau pour pouvoir ensuite éduquer les autres, tes futurs enfants, la société… Pour commencer, admirons la nature qui nous entoure, ce chef d’œuvre de Dieu. La contemplation de la nature formera ton goût du beau. « Les œuvres de l’art doivent imiter les œuvres de la nature. Car si le maître dans un art quelconque faisait un ouvrage, le disciple qui serait à son école devrait regarder comment il s’y prend, afin de pouvoir l’imiter ensuite. Ainsi, dans ce qu’elle fait, l’intelligence humaine a besoin de s’instruire au spectacle de la nature, pour l’imiter dans ses propres ouvrages. »2

Ensuite, aimons à visiter les villes, les monuments, les musées qui mettent en valeur les belles créations de notre société, notre patrimoine. S’intéresser à l’histoire de l’art est une très bonne chose, pour situer l’objet dans une époque. Les articles de Jeanne de Thuringe dans cette revue permettent d’avoir les rudiments de l’histoire de l’Art et donnent envie d’aller plus loin.

Il ne faut pas seulement visiter de belles choses, il faut aussi aimer s’entourer de beaux objets, vivre dans un bel environnement, essayer de créer du Beau avec les talents que Dieu nous a donnés. Tout ce que tu auras vu, contemplé, admiré va nourrir ton imagination, développer ta créativité. Cela te deviendra aisé d’aménager et de décorer ton intérieur, d’y créer ton havre de paix, où tu aimeras venir te ressourcer. Cherche aussi à écouter de la belle musique. La musique a une origine sacrée qui rappelle l’harmonie qu’il y a au Paradis. La musique est un moyen de communication des anges. C’est ainsi qu’ils ont annoncé aux bergers la naissance de l’Enfant-Dieu. Le diable au contraire s’efforce de faire taire la vraie musique, ou suscite des accords qui n’ont plus rien à voir avec de la musique.

Ma chère Bertille, je ne peux que t’encourager à chercher le Beau dans ton entourage et le Beau étant toujours lié au Bien, il te tirera vers Dieu, le Bien suprême.

 Je t’embrasse bien affectueusement.

Anne 

1 L’idée du Beau dans la philosophie de saint Thomas d’Aquin, P. Vallet, page 24

2 Id, page 295

 

O Beauté Infinie

Dans la lumière blonde d’un matin de septembre, lorsque la brume s’accroche encore au fond des vallons comme un léger voile de coton,

Comment ne pas vous voir O Beauté Infinie ?

 

Dans la clarté d’un ciel de fin d’été, lorsque les constellations sont si nettes qu’il est très aisé de les retrouver sur ce bleu nuit qui clôt de velours la journée et nous donne cette grande paix du soir,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans la simplicité et la blancheur de l’hostie que le prêtre à la Consécration, élève à notre vénération, offrande pour notre salut, de Celui qui s’est fait péché sur la Croix, et se redonne ainsi mystérieusement jusqu’à la fin des temps,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans la bonté toute simple et lumineuse d’un sourire qui réchauffe le cœur, d’un conseil qui nous éclaire et nous fait grandir, d’un pardon spontané effaçant toute la peine, et permettant de repartir meilleur,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans la victoire, avec Votre grâce, d’un effort qui nous a coûté, d’un détachement qu’il fallait faire, d’un acte d’abandon, alors que nous voulons bien trop humainement tout maîtriser, tout mener à notre guise,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans toutes nos journées jalonnées de joies, de peines, d’épreuves, contrariétés et sécheresses, Vous êtes sans cesse présent. Pourtant nous vous devinons si peu alors que Votre Amour nous accompagne sans cesse et veille sur nous avec tant de tendresse.

 

Que nous sachions vous voir de plus en plus pour grandir dans votre amour, afin de Vous contempler éternellement, Ô Beauté Infinie.

 

                Jeanne de Thuringe

 

L’école  

Chère Bertille,

Je te remercie pout ta lettre et les nouvelles que tu me donnes. Tu me dis que ta petite sœur, qui rentre en troisième, est un peu révoltée et ne comprend pas pourquoi il est nécessaire d’aller dans une école si loin de la maison pour y apprendre le latin et le grec, alors qu’elle pourrait aller au collège à pied et étudier des matières plus « utiles », l’informatique, l’anglais… Par cette lettre, je vais essayer de te donner quelques arguments pour que tu puisses l’aider à passer ce cap.

L’objectif des écoles chrétiennes libres est bien plus élevé que celui de l’école laïque. Il dépasse de loin le côté pratique et utile. Ces écoles, loin de vouloir former des femmes qui vont pouvoir produire pour la société, ont bien en vue que la femme est une créature du Bon Dieu, douée d’une intelligence et d’une volonté et qui doit atteindre un idéal. Une fois l’intelligence éclairée et illuminée par la Vérité, et la volonté orientée vers le Bien, la jeune femme sera en mesure de poser des actes libres.

Quel est cet idéal ? « Il est le modèle vers lequel nous levons les yeux, le but auquel nous aspirons. Nous en avons l’expression dans l’Evangile, sous la forme d’un commandement : « Soyez parfaits comme votre Père est parfait » […]. Notre Seigneur Jésus-Christ, avec l’idéal de sainteté, nous donne – et lui seul – les moyens de le réaliser.»1

Les écoles catholiques permettent de connaître cet idéal par leur enseignement. Alors que l’école laïque fait tout pour éliminer Dieu et l’ignorer, les enseignants catholiques orientent et éclairent leurs leçons à la lumière de la Foi. Le Bon Dieu est présent dans les cours de doctrine, dans la vie de prière qui règne dans l’école mais aussi dans les cours profanes où tout est orienté vers la Vérité.

La jeune fille est amenée à avoir un rôle important dans la société, notamment par la maternité naturelle ou spirituelle. C’est elle qui va former et éduquer de nouvelles générations, c’est elle qui va être l’âme de son foyer, qui va en donner l’esprit. Les œuvres de littérature étudiées en classe >>>       >>> vont lui permettre de développer son sens critique « car il ne suffit pas de montrer l’idéal, il faut aussi le défendre contre les attaques, et savoir discerner le véritable idéal d’un ersatz, frelaté, voire empoisonné.»1 Petit à petit elle va apprendre à discerner à travers les différents personnages de littérature, Antigone de Sophocle et d’Anouilh, Blanche de la Force dans le dialogue des Carmélites de Bernanos, Jeanne d’Arc de Péguy, Phèdre de Racine, quel est l’idéal de vie chrétienne, comment elle peut l’atteindre, quelle est la place des passions et comment en tirer meilleur profit. « Oui, nous disent ces héroïnes, réelles ou légendaires : oui, l’idéal est possible : il est possible de vivre dans la fidélité et l’honneur, la pureté et le sens du sacrifice.»1

 

Ta petite sœur, ma chère Bertille, est à un âge où l’on s’enthousiasme pour un grand idéal, elle a une énergie telle qu’elle veut transformer le monde. Elle en a la capacité comme fille de l’Eglise : « Nous savons ce que nous voulons : fils de la Sainte Eglise et nourris par des siècles de civilisations chrétiennes, nous voulons vivre de l’Eglise et travailler à l’édification d’une cité chrétienne – d’une cité qui soit fidèle à l’Eglise et qui se développe sous l’empire des valeurs désintéressées d’honneur, de vérité, de liberté, de justice et de beautéune cité qui, avec sa technicité elle-même, soit une fleur vivante de la sagesse chrétienne et non pas une construction artificielle de la technique sans âme, » écrit le Père Calmel dans « Ecole chrétienne renouvelée ». Voilà cet idéal auquel nous tendons tous. « Et pour cela, continue-t-il, nous prenons le parti des auteurs, … nous prenons le parti de la philosophie thomiste, et avant cette classe décisive, nous prenons le parti du français, et des langues modernes ou anciennes ; les langues étant étudiées dans un sens de culture plus encore que d’utilité.»1

 

  Voici ma chère Bertille, l’école où est ta petite sœur lui permet de s’enthousiasmer et d’œuvrer pour l’Eglise en accomplissant sa vocation de jeune fille catholique.

Je t’embrasse,

Anne 

1 Extrait de la Conférence donnée par les Dominicaines enseignantes de Fanjeaux lors du Congrès des familles du MCF à la Martinerie le 9 juillet 2022 sur le thème « Quel idéal pour nos jeunes ? »

 

A l’école du Divin Maître

Il est une école où il n’y a pas de bancs, sauf peut-être ceux de l’église, pas de professeurs, si ce n’est le prêtre, pas de cahier, si ce n’est nos bonnes ou mauvaises pensées et œuvres, pas de notes, si ce n’est notre récompense (ou non) au Ciel, pas de cour de récréation si ce n’est le champ immense de la vie, pas de camarades si ce n’est notre prochain, pas de livres de références, si ce n’est l’Evangile.

Tu l’auras deviné, c’est l’école du Divin Maître

 

Les seuls, dans cette école, qui ont un diplôme en poche et l’assurance d’un bon travail, sont ceux qui, comme les saints, travaillent à se réformer, à s’oublier sans cesse, à deviner avec délicatesse le besoin des autres, à vivre profondément de l’Evangile, à présenter tous leurs besoins et la misère humaine dans ses tréfonds et ses grandes peines, au Bon Sauveur. Là pas de risque de se tromper d’orientation, avec la Sainte Vierge, notre sainte maîtresse qui nous accompagne sur le chemin,

A l’école du Divin Maître

 La littérature est apparemment sans logique puisqu’il est dit « Bienheureux ceux qui pleurent, ils seront consolés », « Bienheureux les pauvres en esprit car le Royaume des Cieux leur appartient », « Bienheureux ceux qui sont persécutés pour la justice car grande sera leur récompense dans les Cieux », et ainsi pour tout le sermon sur la montagne avec ses béatitudes.

Quant aux mathématiques, il semblerait qu’elles fussent réduites souvent aux nombres 7 ou 12…

Les lois de la physique sont mises à mal avec la marche de Notre Seigneur et de saint Pierre sur les eaux, et les poissons pêchés contre toute attente dans des zones inconnues.

A l’école du Divin Maître

 

La géographie est quelque peu malmenée puisque les collines sont priées de s’abaisser, les vallées de se combler et les chemins tortueux de se redresser…

De même en Histoire puisqu’il nous est rappelé que pour Dieu, mille ans sont comme un jour, et qu’Il voit en un instant toutes les époques à la fois.

Enfin, aucun effort d’apprentissage des langues étrangères, qui après être tout à coup apparues avec une histoire de Tour de Babel, sont comprises sans effort un jour de grand vent…

A l’école du Divin Maître

 

Pour ce qui est des études supérieures, l’économie est apparemment sans fondement moral puisque l’intendant infidèle y est loué, la loi salariale défie toute logique, le salaire étant le même pour une heure ou une journée du travail.

Enfin le droit et la politique font état d’un royaume sans pouvoir visible, sans armée, sans défense où les brebis seront au milieu des loups et les serviteurs persécutés et tués.                  >>>   >>> Et pour conclure, il n’est nul besoin de briguer les premières places, puisque les premiers seront les  derniers et les derniers, les premiers.

A l’école du Divin Maître

 

Pourtant, un petit enfant qui vit de cette école-là, est bien plus savant que celui qui aura fait de longues études, comme le dit le saint Curé d’Ars à un pénitent.

Pas de besoin de tricher, notre ange gardien nous souffle toujours à l’oreille la bonne réponse, mais souvent, nous ne l’écoutons pas.

Chaque matin, ouvrons notre Evangile et méditons avec simplicité ces lignes si belles que nous connaissons, hélas superficiellement, alors qu’elles demandent un vécu profond et une réelle « incarnation » dans toutes nos actions. La réponse est toujours là quand nous hésitons sur la conduite à tenir et pour nous aider à voir plus haut.

Puissions-nous jusqu’au bout, mettre en œuvre, bien réellement tout ce que nous apprenons,

A l’école du Divin Maître.

                  Jeanne de Thuringe

 

Etudiant!

L’été s’achève, le Bac en poche, les grandes vacances sont passées à toute vitesse dans un mélange d’euphorie et d’inquiétude face à l’inconnu de la vie étudiante qui vient. Après les résultats parfois surprenants de « parcours sup », il a fallu trouver un logement, signe de l’indépendance nouvelle.

Etudiant ! le jour de la rentrée est arrivé. Plein de promesses et synonyme de relative indépendance vis-à-vis des parents et de vie d’adulte. Vous voilà plongé dans le grand bain du monde avec ses attraits, ses richesses et ses mirages. Si vous sortez d’une école catholique, c’est une des premières occasions de côtoyer des camarades qui ne le sont pas, qui ne pensent pas comme vous, souvent par ignorance, parfois par conviction. Quoi qu’il arrive, vous passerez souvent pour un extra-terrestre, un « visiteur » revenant du passé. Parfois hostiles, souvent surpris voire curieux, tout dans votre apparence sera soumis à leur regard interrogateur. Ferez-vous tout pour passer inaperçu, pour paraître comme eux ou resterez-vous vous-même ? La question se posera plusieurs fois et il vous faudra à chaque fois trouver la bonne réponse, seul ! La plupart du temps, vous n’aurez pas de questions directes et quels que soient vos efforts pour passer inaperçu, vous serez considéré comme différent. Mais cette différence, si elle est assumée, les attirera à vous et voyant en vous quelqu’un d’honnête et d’heureux, ils chercheront à vous connaître mieux. De nouvelles amitiés d’un nouveau genre naîtront, l’occasion pour vous d’approfondir votre foi pour être en mesure de répondre à leurs questions, et de faire de l’apostolat si l’occasion se présente, au moins par votre exemple.

Les tentations ne seront pas négligeables, alcool à volonté et autres amusements lors des soirées d’intégration. Mais cela sera facilement surmonté si vous vous appuyez sur les grâces et les armes qui sont à votre disposition.

Profitez-en pour fréquenter les groupes d’étudiants catholiques de votre paroisse. L’occasion d’établir ou de renforcer des amitiés. Confrontés aux mêmes difficultés, aux mêmes questions, aux mêmes épreuves, ce sont dans ces moments que se forment les belles et profondes amitiés qui pourront durer toute la vie. C’est aussi le temps de découvrir les joies des week-end entre amis, des dîners passés à deviser et à refaire le monde.

Les groupes d’étudiants proposant soit des prières, soit souvent des conférences seront l’occasion de continuer votre formation. Appuyée sur des lectures, des discussions et conférences, cette formation intellectuelle que vous allez pouvoir poursuivre tout au long de votre vie d’étudiant aura pour objectif principal de vous faire découvrir le monde tel qu’il est réellement, les différentes forces qui s’y affrontent et d’échapper à l’image trompeuse qu’il veut bien donner de lui, de distinguer le vrai bien qu’il offre et dont on peut bénéficier honnêtement, des vrais maux qu’il présente sous apparence de bien.

La prière et la fréquentation des sacrements seront les armes les plus puissantes qui vous permettront de tenir dans la durée, pour rester vous-même, catholique convaincu et heureux de l’être dans un monde apostat.

Enfin, si vous vous fixez dès le début un rythme de vie bien précis avec une heure de lever, une heure de coucher, temps réservé à la prière et un temps pour la lecture, vous prendrez rapidement de bonnes habitudes qui seront votre meilleur garde-fou contre l’oisiveté et le temps perdu sur internet qui est l’autre grand danger de la vie seul. C’est la tentation facile qui guette chacun d’entre nous quand nous rentrons le soir dans notre chambre d’étudiant. Allumer l’ordinateur et vagabonder sur Youtube ou Facebook ou autres futilités. Le démon vous y attend au carrefour et se frotte les mains. En plus de ces habitudes de rythme de vie, collez une image ou une médaille de la sainte Vierge sur votre ordinateur. Sous le regard de votre mère, vous serez plus fort contre les tentations et elle vous protégera.

Tout ce beau programme a un seul objectif qui sera certainement celui de votre vie de jeune homme étudiant : devenir un homme catholique accompli qui, grâce à Dieu, grâce à son caractère et à sa volonté bien trempée, à sa connaissance du monde dans lequel il évolue et à la science qu’il a acquise durant ses études peut prétendre à avoir un métier et fonder une famille.

 

Telle est la vraie vie d’étudiant, la vraie liberté des enfants de Dieu qui vous procurera le bonheur durant ces années charnières où vous vous prendrez en main et où vous deviendrez un homme ! Vous savourerez la joie d’avancer à grands coups de rame dans la vie souple comme l’eau sous le regard de Dieu ! Alors en avant et que l’aventure commence !

 

Antoine

 

Une promesse  

Chère Bertille,

           Dans mon dernier courrier, nous avions abordé la question de la vocation de la femme, au sens large. Comme tu constates que de plus en plus d’amies se fiancent dans ton entourage, je voudrais en profiter pour te dire quelques mots sur le sujet des fiançailles.

           Tout d’abord, les fiançailles au niveau historique existaient chez les Hébreux. Le fiancé offrait à la fiancée ou au père de la fiancée, un anneau d’or ou un objet de grand prix. Un grand festin terminait la journée. Dès le jour des fiançailles, la fiancée appartenait à son fiancé et lui devait fidélité jusqu’au mariage qui arrivait assez rapidement.

  Aujourd’hui, les fiançailles sont toujours une promesse de mariage. Une promesse vraie, mutuelle et acceptée de part et d’autre. Il est bien concevable qu’un engagement aussi important comme le mariage soit préparé par les préliminaires des fiançailles. Malheureusement, la législation actuelle ne tient pas compte des fiançailles. Seule l’Eglise en est la maîtresse. Les fiançailles chrétiennes sont un contrat réciproque entre deux personnes déterminées, avec le désir de se marier.

  Pour arriver aux fiançailles, il faut savoir prendre conseil avec prudence : écouter, réfléchir et méditer. Les meilleurs conseillers sont nos parents, car ce sont eux qui nous connaissent le mieux. Il y a aussi les prêtres que nous rencontrons régulièrement et quelques amis proches. La prière nous permet de tout mettre sous le regard de Dieu et de tout juger selon sa volonté. Car plaire à Dieu et faire sa volonté, là est l’essentiel.

  Avant que les passions ne prennent le dessus, il faut découvrir le caractère de l’autre, ses goûts, ses qualités morales, ses aptitudes… Cela demande beaucoup de renoncement intérieur, d’humilité et de franchise. C’est alors que l’on pourra se décider et choisir un père ou une mère pour ses futurs enfants.

  L’amour entre une jeune fille et un jeune homme se construit sur le même modèle que l’amitié. Mais c’est une amitié plus profonde. Il faut aimer avec bienveillance, c’est-à-dire de façon désintéressée. Le Père Noble dit « Aimer une personne pour l’utilité ou le plaisir qu’elle nous assure, c’est l’aimer égoïstement, pour ce bénéficiaire qui est soi-même. Au contraire, aimer quelqu’un et lui vouloir du bien : voilà l’amour d’amitié » et encore « le synonyme de l’amour, c’est « l’union », union des esprits, des cœurs, des vies… L’amour vrai résiste à la séparation. Sans doute, la séparation est la dure épreuve de l’amitié, mais elle est aussi la pierre de touche de sa solidité1 ».

 

  Voici quatre signes qui pourront aider à juger si c’est la bonne personne :

– L’estime mutuelle fondée sur des qualités réelles que l’on peut énoncer et qui consistent surtout dans la pratique de la vertu.

– La sympathie mutuelle. Les fiancés doivent être heureux de parler ensemble.

– La confiance mutuelle. Elle entraîne la certitude de ne plus être tout seul face aux difficultés et aux peines de la vie.

– Le plein accord sur l’idéal de la vie et du mariage chrétien.

 

  Le temps des fiançailles, c’est le temps pour apprendre à mieux se connaître, se confier ses défauts, apprendre à se pardonner (car le mariage sera aussi une vie de pardon), se faire confiance, se demander >>> >>> secours… Regarder l’autre vivre, agir, parler… Découvrir son tempérament, son caractère, sa santé, ses talents. Comprendre et accepter ce qui en principe ne changera pas…

  Ma chère Bertille, je te souhaite de construire de belles amitiés profondes, basées sur la générosité réciproque, et ainsi tu seras prête à répondre à l’Amour qui t’est réservé depuis toute éternité : l’amour parfait avec Dieu dans la vocation religieuse, ou l’amour humain pour fonder un foyer.

Je t’embrasse avec toute mon affection.                 

Anne

1 L’amitié de H.-D. Noble, O.P.

 

« Veux-tu devenir ma femme ? »  

Cette phrase, vous rêvez de la prononcer pour de vrai, vous êtes décidé sur l’orientation de votre vie et vous recherchez l’âme sœur, celle qui deviendra la mère de vos enfants.

L’attente est longue, plusieurs jeunes filles vous plaisent, mais vous avez du mal à discerner, comment vous y prendre ? L’ampleur de la tâche vous effraie et surtout personne ne vous a jamais expliqué comment faire, – si ce n’est les films ou les romans -, mais l’ombre d’un doute sur leur réalisme subsiste en votre esprit !

Laissez-moi partager quelques réflexions psychologiques tirées de lectures, d’expériences et de discussions qui, loin d’être exhaustives ou même exactes, pourront peut-être servir de base à vos propres analyses.

Pour faciliter cette libre discussion, je suivrai les différentes étapes qui nous conduisent au mariage, si Dieu le veut.

 

La vie de célibataire indépendant

Rarement considérée, cette étape est pour moi capitale. Avant de pouvoir aimer l’autre, il faut être capable de s’aimer soi-même et pour s’aimer soi-même, il faut s’estimer en toute franchise et honnêteté. Reconnaître ses qualités, mais aussi ses défauts et les accepter comme tels tout en travaillant à s’améliorer et à grandir toujours. Cette connaissance et cette acceptation de soi permettront plus tard de passer avec succès l’épreuve de vérité que sont les fiançailles et d’inspirer suffisamment confiance à l’autre pour qu’il puisse s’engager sans crainte. Si vous n’êtes pas clairvoyant sur vous-même, si vous ne savez pas qui vous êtes et surtout ce que vous voulez, l’engagement sera plus difficile. Il est illusoire et même dangereux de penser que l’autre résoudra vos problèmes. La quête de cette indépendance affective et psychologique pourra être l’objet des années de célibat et considérée comme une préparation indispensable à tout engagement.

Dans le même temps, de saines amitiés masculines et féminines vous permettront de grandir et de développer votre confiance en vous d’une part et de découvrir progressivement « le mystère féminin » d’autre part. De plus, vos engagements au service du bien commun vous habitueront à vous donner généreusement.

 

Choisir !

Cette maturité acquise – plus ou moins rapidement selon le caractère et les circonstances -, vous vous sentez prêt et vous vous demandez quelle sera l’élue de votre cœur. Vous connaissez des filles que vous pourriez envisager d’épouser. Elles répondent aux critères objectifs expliqués dans tous les livres de préparation aux fiançailles et au mariage ainsi qu’à vos propres critères, elles sont belles, pieuses et intelligentes, et déjà vous vous sentez sur le point de tomber amoureux. Mais vient la question ultime : va-t-elle m’aimer ? A t-elle en elle l’étincelle amoureuse à mon endroit ? Serais-je capable de l’aimer vraiment et suffisamment ?

Avant de vous « déclarer » et sous peine de déception, il faut vérifier quelques éléments psychologiques en plus de toutes les considérations naturelles et religieuses habituelles : sommes-nous tous deux indépendants et mûrs affectivement et psychologiquement ? A-t-elle réellement cette étincelle dans les yeux quand elle me parle ou n’est-ce que le fruit de mon imagination, et ne se dit-elle pas qu’avec bonne volonté l’amour viendra en allant ?

Difficile d’évaluer froidement ces éléments quand on est amoureux, d’où l’importance de prendre conseil d’un ou d’une bonne amie. Cela peut parfois permettre d’éviter des désillusions et ruptures douloureuses. Attention, l’ami n’a qu’un rôle de conseil et ce choix libre doit être posé seul devant Dieu.

On trouvera bien sûr autant d’exceptions à ces réflexions qu’il y a de caractères différents dans la nature, mais c’est une première analyse qu’il ne tient qu’à vous d’enrichir de votre observation.

Après un temps de fréquentation plus ou moins long qui vous a permis de vous connaître un peu plus, vous vous êtes finalement déclaré tout tremblant et …

 

Oh, comble du bonheur elle a dit OUI !

C’est là que commencent véritablement les fiançailles, officieuses avant d’être officielles, temps de tests et d’épreuves que vous aurez inévitablement à surmonter à deux et qui vous permettra de vérifier que vous êtes faits l’un pour l’autre pour poser les bases d’un solide foyer chrétien. Temps aussi merveilleux de découverte d’un autre univers et où la vie prend progressivement tout son sens.

Avant tout, durant ces périodes de choix puis de fiançailles, il convient de garder une bonne dose d’abandon à la Providence. « Mon Dieu, si vous voulez cette union, permettez-la, sinon faites qu’elle ne voit pas le jour ». Car mieux vaut une douleur, certes intense, mais passagère, causée par une rupture qu’une vie entière de difficultés et parfois de souffrances au plus intime du foyer parce que l’union n’est pas entière.

Le temps des fiançailles est un moment de vérité qui vous permettra peu à peu de vous révéler l’un à l’autre et de vous ouvrir l’une après l’autre les portes de vos âmes. A chaque porte ouverte, une nouvelle facette de l’autre se dévoilera et votre amour grandira, puis vous apercevrez au loin la porte suivante qu’il faudra aussi ouvrir.

Si une porte résiste et que vous ne trouvez pas la clef, ou que vous n’arrivez pas à l’ouvrir malgré efforts, prières, amour et bienveillance, alors cela cristallisera peut-être toutes les inquiétudes et l’aventure s’arrêtera là tout d’un coup ! Dieu soit loué, que sa volonté soit faite ! Nul n’est en cause, la rupture de fiançailles ne préjuge pas des qualités intrinsèques de l’un et de l’autre des fiancés, mais juste du fait qu’ils ne sont visiblement pas faits pour s’entendre, malgré les mille raisons qui les ont réunis et qui jusque-là semblaient indiquer le contraire. C’est ainsi, mystère de la vie !

A l’inverse, si à chacun des doutes ou inquiétudes de l’autre – qui surgiront très probablement pendant les fiançailles – l’âme sœur trouve le ton qui la rassure et la conforte, alors peu à peu la confiance s’établit et le ciment de l’amour de Dieu aidant, l’amour des fiancés se renforce et peut surmonter les embûches avec toujours davantage d’aisance et de facilité.

Le temps passe, les fiançailles sont l’occasion de définir les grandes orientations du futur foyer, de cimenter l’amitié et de grandir ensemble dans l’amour de Dieu à qui l’on doit confier cette œuvre si importante. Peu à peu, les portes de l’âme et du cœur se sont ouvertes et la date fatidique du OUI définitif qui engage toute la vie est arrivée !

Amis et famille sont présents pour célébrer et témoigner aux yeux de la société de la véracité de cet engagement exclusif. La joie est complète, merci Mon Dieu de nous avoir conduits jusqu’à l’autel !

 

De bonnes et saintes fiançailles sont le socle d’un solide foyer chrétien. Cependant, les efforts ne s’arrêteront pas au mariage et ils n’offriront pas une garantie illimitée pour sa longévité. La fièvre de l’amour des premiers temps demandera à la volonté de prendre le relai pour alimenter par les sacrifices quotidiens le grand feu de l’amour des époux qui ne s’éteint pas. Et inversement, même si parfois les fiançailles ont été un peu chaotiques et que vous êtes maintenant mariés, alors Dieu vous donnera les grâces suffisantes pour former un foyer heureux et uni. La nature est là, mais la grâce surabonde.

Cette grande aventure des fiançailles vaut la peine d’être vécue. Echec ou réussite, elle vous fera grandir et le Bon Dieu récompense toujours tôt ou tard ceux qui sont prêts à s’engager à son service pour rebâtir la société chrétienne. Alors n’ayons pas trop peur de l’échec et si les conditions naturelles, religieuses et psychologiques sont présentes, jetons-nous à l’eau, c’est la meilleure façon d’apprendre à nager !

Arthur Poivressel

 

Au pied de l’autel

Seigneur, au pied de l’autel dans votre église si calme, silencieuse et remplie de votre présence toute aimante, je viens vous confier mon amour naissant.

Vous avez bien voulu mettre sur ma route ce jeune homme qui a su comprendre mon âme, trouvé mon cœur et proposé de me consacrer sa vie. Cet engagement n’est pas un vain mot… Suis-je sûre de pouvoir y répondre en toute liberté, sans l’illusion d’une euphorie de faire comme les autres, d’être soulagée « d’avoir trouvé », ou que sais-je ?

  Suis-je prête à renoncer à tous les autres choix qui auraient pu se présenter, pour me donner à celui-ci, toute ma vie, jusqu’au dernier souffle, avec les joies bien sûr, mais aussi les peines qui ne manqueront pas ?

  Suis-je prête à me renoncer pour lui, parce que votre volonté est suffisamment claire, et à faire de mon mieux pour lui donner le meilleur de moi-même ?

  Suis-je prête à l’accepter comme il est, avec ses richesses et ses faiblesses, sa famille aussi, sans rêver qu’il est parfait, mais à l’épauler et le soutenir de toutes mes forces, de toute ma joie aimante, de toute ma prière ? Est-il celui qui va m’aider à avancer sur le chemin du Ciel, parce que vous avez mis en lui ce qui me manque ?

  Seigneur, un peu de temps a passé et je suis là, à nouveau dans votre église, sûre maintenant de la réponse que je dois donner, parce que Votre Volonté sur moi est bien claire.  

  L’évidence paisible que nos âmes sont destinées à se sanctifier ensemble, la transparence confiante qui est nôtre dans nos échanges, l’approbation de nos parents et de ceux qui nous côtoient, sont une certitude.

 

  Seigneur, nous voilà tous les deux au pied de cet autel où j’étais venue tout vous confier et vous remercier de vos lumières.

  Donnez-nous la grâce d’avoir des fiançailles profondément chrétiennes, qui ne soient pas un égoïsme à deux, un petit bonheur étriqué mais une joie qui rayonne, réchauffe et réconforte ceux que vous mettrez sur notre route.

  Aidez-nous à garder le cœur ouvert et délicat envers ceux qui souffrent ou ont eu des espoirs déçus.

  Apprenez-nous le grand respect l’un de l’autre, la prière ensemble, en attendant celle de nos soirs d’époux.

  Donnez-nous une profonde amitié, ciment de notre amour, afin qu’il ne soit pas une passion aveuglante, elle qui dans notre vieillesse, restera avec la tendresse.

  Aidez-nous à trouver notre joie dans les choses simples, à savoir rendre service ensemble pour les autres. Cela nous aidera à nous voir « sur le terrain » sans fard, nous préparant lorsque, le foyer s’agrandissant (si Vous le voulez), à nous oublier.

  Evitez-nous le tourbillon des rencontres et mondanités, souvent trop fréquentes pendant les fiançailles.

  Aidez-nous à savoir nous parler en toute humilité et bienveillance avec les moyens naturels que vous nous avez donnés, et le détachement de tout ce qui est virtuel ou factice.

  Apprenez-nous à savoir renoncer à nous voir, quand il le faut, pour une cause plus haute, sachant que notre sacrifice portera beaucoup de fruits.

 

  Alors Seigneur, dans quelques mois, au pied de l’autel, notre oui sera fort et prélude à tous ceux de chaque jour de notre vie d’époux.

                  Jeanne de Thuringe

 

Pierre de taille

Bing, Bing, Bing, les éclats de pierre volent sous le ciseau du tailleur. Les coups précis de l’artisan émondent doucement le beau calcaire blanc. Les angles se dessinent puis les formes plus complètes, volutes et arabesques apparaissent. Bing, Bing, Bang, le geste est sûr, les mains fermes sur l’outil mais le travail est lent, chaque coup de burin détache un petit morceau de pierre sans retour possible et doit donc être bien ajusté. Le tailleur a déjà à l’esprit la forme finale qu’il veut obtenir et les différents coups de marteau qu’il devra donner pour d’abord dégrossir puis affiner la pierre. La matière est dure mais ne lui résiste pas. La finesse et la précision de la taille lui permettront de l’encastrer dans la voûte gothique en réparation. Les angles sont complexes. Chaque pierre trouvera exactement sa place et le résultat devra être parfait, car il s’agit de restaurer la voûte de Notre-Dame de Paris. Cette autre pierre plus décorative permettra de restaurer un chapiteau abîmé par l’incendie. Elle est moins critique pour l’assemblage et la tenue du tout, mais plus complexe à tailler car les détails sont multiples. Elle servira non pas à faire tenir la voûte, mais sa beauté sera là pour louer Dieu et manifester l’amour des hommes.

  Chaque pierre est différente, aucune ne ressemble à l’autre, chacune a un rôle particulier et contribue à la grandeur, à la majesté et à la finesse de l’ensemble.

  N’en est-il pas de même de la vie des hommes ? Chaque âme est différente, a un rôle particulier que prévoit Dieu, l’artisan de nos vies qui, de toute éternité, voit l’œuvre accomplie dans son ensemble comme dans le détail. Tous, nous avons une mission sur terre pour contribuer à bâtir la cathédrale de la Chrétienté et aucune n’est identique. Seule, à l’état brut, notre existence n’a pas de sens. Façonnée par Dieu, orientée vers Lui, sanctifiée par la grâce, elle contribue à la beauté de l’œuvre de Dieu.

  Mais nous ne sommes pas des pierres et Dieu nous a laissé la liberté de correspondre volontairement à son œuvre, au plan qu’il a sur notre vie de toute éternité. Nous avons la capacité d’accepter ou non le plan de Dieu sur nos vies. Pour que nous puissions l’aimer réellement, Dieu nous a laissés libres de choisir de l’aimer. Mais à l’instar de la pierre, nous n’avons pas le plan de détail de nos vies, ni de l’ensemble de la cathédrale. Il nous faut dire « oui » à chaque coup de ciseau que la Providence nous envoie. Faire confiance à l’artisan. Dire « oui » sans cesse et ces « oui » permettront au plan de Dieu de s’accomplir et à notre vie d’atteindre sa fin. Nous serons ainsi à notre place, assignée par Dieu de toute éternité dans l’immensité de son Amour.

  N’est-ce pas cela accomplir sa vocation ? Accepter le plan de Dieu sur nos vies. Qui ne se manifeste, la plupart du temps, que par de petits ou de grands coups de burin. Voulons-nous rester une pierre indéterminée sur le bord du chemin mais indépendante, ou préférons-nous nous laisser modeler par le Bon Dieu et avoir le bonheur de contribuer au salut du monde et à la cathédrale de la Chrétienté ?

Antoine

 

A la croisée des chemins

Tu as vingt ans, tu penses que c’est le plus bel âge, âge des grands rêves et des promesses. Oui mais, c’est aussi l’âge des choix qui engageront ta vie. Aussi est-ce plus facile d’avoir trente ans car ces choix seront derrière toi.

           Alors comment vivre tes vingt ans ?

 

           Le bonheur est dans le pré, cours-y vite, cours-y vite…

  Le bonheur est dans le pré, cours-y vite, il va filer…

 

  Vas-tu suivre ces vers de Paul Fort en courant après des illusions, parce que le monde te dit que le bonheur est là à portée de main ? Mais quel bonheur nous offre-t-on si facilement ?

  Le bonheur facile, justement, c’est-à-dire celui qui s’offre sans effort, banalisé. Mais il passe bien vite car il n’est pas enraciné dans le temps, et le renoncement.

  Un bonheur sans lendemain qui risque fort de te rendre en fait bien malheureuse pour longtemps, car trop souvent, il prend sa source dans la légèreté quand ce n’est pas dans le péché…

  D’ailleurs le poème se conclut ainsi :

  Saute par-dessus la haie, cours-y vite, il a filé !

 

  Seras-tu vierge folle ou vierge sage ?

 

  Vierge folle qui attache du prix à ce qui brille, ce qui paraît, et se disperse de mille manières ?

  Qui rêve d’un mari parfait selon des critères humains, une belle apparence, une belle situation, un beau nom, ou un bel uniforme. Ou, plus subtilement, qui ne verra que les apparences de piété sans voir le fond de la nature et prendra pour de la modestie ce qui n’est que paresse et refus de faire fructifier ses talents.

  Qui va rêver de fuir peut-être un monde hostile au couvent sans voir que la vie de communauté a ses exigences et qu’il faut un grand réalisme et un grand équilibre affectif pour y rester sa vie durant.

 

  Connais-toi toi-même…

 

  Ton choix de travail et de vie doit se fonder sur une bonne connaissance de toi-même, sans illusions, sans rêves, avec humilité, ce qui ne veut pas dire pusillanimité.

  Apprends un vrai métier, il est loin le temps des dots où la jeune fille restait chez ses parents à attendre… Tu vis dans une époque qui a ses exigences, ne vis pas en arrière…

  Puis, pars sur le terrain à la rencontre de ceux qui ont besoin d’aide, autour de toi. Apprends à sortir de toi-même pour te tester, te mettre en situation et voir ce que tu vaux. Et demande aux aînés, à ceux qui ont ouvert la voie avant toi, de t’aider à te cerner. Ne crains pas les avis désintéressés, aimants car ils voient ton bien. Même s’ils font un peu mal, accepte-les de bon cœur et remercie d’avoir les yeux ouverts.

 

  Celui qui veut bâtir une tour, qu’il commence par s’asseoir et réfléchir

>>>

  >>> Forte, ensuite, de tes rencontres et expériences, réfléchis tranquillement aux opportunités qui se présentent pour savoir si elles te correspondent. Puis si cela est réalisable, renseigne-toi sur les moyens à prendre pour y arriver. Demande, là aussi, conseil et rencontre ceux qui peuvent t’éclairer plus précisément sur ce que tu envisages.

  Ne pense surtout pas que tu vas changer telle situation ou tel jeune homme auquel tu songes. Vivre dans le réel, sans illusions, est le gage de la réussite.

  Ne te précipite pas non plus, et prie pour demander à être éclairée. La retraite est alors un très bon moyen, voire « le moyen » d’y voir clair.

  Une fois que ton âme sera bien fortifiée, laisse toi enfin guider par les évènements que la Providence dirige pour toi…

  Alors sans erreur, tu prendras ton chemin, celui que Dieu t’a tracé.

                  Jeanne de Thuringe