Le Cœur Immaculé de Marie expliqué aux enfants

« Je vous salue, pleine de grâce ! » Voilà comment l’archange Gabriel s’est adressé à la Sainte Vierge, le jour de l’Annonciation, lorsqu’il est venu lui demander si elle voulait devenir la maman de Jésus. On se rappelle que la grâce est cette vie surnaturelle qui fait de nous les enfants de Dieu le jour de notre baptême, et par laquelle notre âme devient le temple de la très Sainte Trinité (Dieu le Père, Dieu le Fils, et Dieu le Saint Esprit). Et bien, la Sainte Vierge est remplie de la grâce, et cela dès le premier instant de son existence. Son âme n’a jamais été souillée par le moindre péché, et le Père, le Fils et le Saint-Esprit habitent en elle plus qu’en aucune autre créature. Il fallait bien une maman sans tache, toute pure, pour enfanter le Fils de Dieu. Un peu comme le tabernacle, tout tapissé d’or et magnifique, reçoit et abrite Jésus-Hostie. C’est pourquoi l’ange adresse à la Vierge Marie ces belles paroles : « Je vous salue pleine de grâce, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes ! »

 

Ainsi la Sainte Vierge est la plus merveilleuse des créatures, celle qui est la plus aimée de Dieu. Et nous devons nous réjouir de penser qu’elle est notre Maman du Ciel car c’est par elle que nous recevons la vie de la grâce et que nous devenons enfants de Dieu. Il n’y a pas d’autre moyen : toute grâce nous vient par Marie. Voilà pourquoi nous devons l’aimer de tout notre cœur, et pourquoi elle nous aime comme une maman ! Voyons comment elle nous l’a rappelé à Fatima.

Le Cœur Immaculé de Marie

En 1917, dans un petit village du Portugal, la Sainte Vierge est apparue plusieurs fois à trois jeunes bergers (Lucie, François et Jacinthe) pour leur dire que Jésus veut établir dans le monde la dévotion à son Cœur ImmaculéQu’est-ce que cela veut dire « Immaculé » ? Cela signifie « sans tache ». En effet, dans le cœur de Notre-Dame, il n’y a absolument aucune tache de péché. La Sainte Vierge a toujours aimé le Bon Dieu de tout son cœur et de toutes ses forces jusqu’au dernier soupir de sa vie. Et elle L’aime encore plus aujourd’hui, dans le Ciel. Elle n’a donc jamais offensé le Bon Dieu, et elle ne l’offensera jamais.

Le Cœur Douloureux de Marie

Mais Notre-Dame n’a pas seulement parlé de son Cœur aux trois jeunes bergers, elle le leur a aussi montré, tout entouré d’épines qui semblent s’y enfoncer. Ces épines représentent les péchés des hommes, qui offensent Dieu et causent beaucoup de peine à la Sainte Vierge. Le Cœur de Marie est donc aussi un Cœur Douloureux, un Cœur qui souffre beaucoup.

La dévotion au Cœur Douloureux et Immaculé de Marie

La Sainte Vierge s’adresse alors à Lucie : « Jésus veut se servir de toi pour me faire connaître et aimer. A qui embrassera cette dévotion à mon Cœur Immaculé, je promets le salut, et ces âmes seront chéries de Dieu, comme des fleurs placées par moi pour orner son trône. »         

    Mais que veut dire avoir la dévotion envers le Cœur Immaculé de Marie ? Cela signifie que nous devons l’aimer de toutes nos forces, comme la petite Jacinthe qui disait : « J’aime tant le Cœur Immaculé de Marie, c’est le Cœur de notre petite Maman du Ciel ! » Nous devons l’aimer au point de lui donner tout ce que nous avons et tout ce que nous sommes, nous devons nous consacrer totalement, et pour toujours, au Cœur Immaculé de Marie. Plus tard, lorsqu’elle sera devenue religieuse, Lucie expliquera bien cela : « Établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie veut dire amener les gens à une totale consécration… C’est dans cet esprit de consécration que Dieu veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. »

 Alors, faisons ou renouvelons notre consécration au Cœur de notre bonne Mère du Ciel, donnons-nous tout entiers à elle pour lui prouver notre amour, et tâchons de lui faire toujours plaisir en évitant tout péché, en offrant des sacrifices pour réparer les offenses, obtenir la conversion des pécheurs et consoler son Cœur Douloureux, et en récitant tous les jours notre chapelet.

En retour, la très Sainte Vierge nous aimera d’un amour tout particulier. « Vous vous êtes consacrés au Cœur Immaculé de Marie, au Cœur de notre bonne Mère du Ciel ! écrivait un jour sœur Lucie. Comptez sur ce Cœur maternel qui, au Ciel, palpite d’amour pour ses enfants qui l’aiment sur la terre ! »

Sophie de Lédinghen

Consécration de la famille au Cœur Immaculé de Marie

Ô Vierge Marie, nous consacrons aujourd’hui notre foyer et tous ceux qui l’habitent à votre Cœur Immaculé. Que notre maison soit comme celle de Nazareth, une demeure de paix et de bonheur simple, par l’accomplissement de la volonté de Dieu, la pratique de la charité et le plein abandon à la divine Providence. Veillez sur tous ceux qui l’habitent : aidez-les à vivre toujours chrétiennement, enveloppez-les de votre maternelle protection et daignez, dans votre bonté, ô Vierge Marie, reformer au Ciel notre foyer d’ici-bas consacré à jamais à votre Cœur Immaculé. Ainsi soit-il.

 

 

 

 

 

Appuie-toi contre moi

« Tu es las, ce soir, mon petit, mon pauvre petit ! La vie est si dure, si épineuse, si longue… Depuis le temps que tu batailles !

Tu ne peux plus même prier, faire l’effort d’une pensée volontairement orientée vers moi. Laisse là tout effort, appuie-toi contre moi. Je ne dis pas « sur moi » c’est encore trop peu, « appuie-toi contre moi ». Mets là ton front, ferme les yeux, et ne bouge plus, sois toute lassitude et tout abandon.

Je sais, oui je sais ! J’ai été moi aussi recru de fatigue pendant ma vie terrestre lorsque je parcourais les chemins de Palestine, et les routes sans bornes de l’ingratitude, de la bassesse et toute la misère humaine. J’ai haleté péniblement en traînant ma croix sur les pavés de Jérusalem, et mes épaules épuisées par la flagellation ont laissé tomber mon fardeau, puis j’ai roulé dans la poussière.

Qui pourrait savoir mieux que moi !…

Ne dis rien, je connais la souffrance, ce qui ce soir a vidé ton cœur de toute joie. Ce n’est peut-être rien de grave, mais c’est un peu tout. La goutte d’amertume que chaque jour ajoute au précédent a fait déborder la coupe.

L’âme de chacun de mes enfants doit passer tour à tour par cette grande lassitude :

Cette maman que ses « tout-petits épuisent jour et nuit ». Cette autre que ses grands enfants inquiètent : que se passe-t-il dans ces jeunes cervelles, et comme le fossé s’élargit chaque jour entre les deux générations.

Ici ce sont les soucis matériels qui vous écrasent un peu plus chaque année. L’avenir de chacun reste incertain malgré un labeur acharné.

Voilà pour ceux-ci la solitude qui élargit son cercle vide. Après les premières années d’union des cœurs et des pensées, la vie vous roule en son manteau d’indifférence, fait de mille petites déceptions, et les chemins divergent.

Pour d’autres, atteints dans leur chair, c’est l’usure épuisante de la souffrance physique, ou la servitude d’infirmités douloureuses qui les isolent et les amoindrissent.

Là, c’est la ruée de la jeunesse à quelque noble tâche, son effort généreux se brisant aux dures lois économiques, à la crise qui secoue les assises du monde aujourd’hui.

C’est toute cette marée de peines, de froissements, de fatigues physiques, d’activités épuisantes, d’inquiétudes et d’espoirs déçus qui accable la pauvre âme humaine.

Alors le meilleur ami paraît lointain ; raconter sa peine n’est qu’un fardeau de plus, et tâcher de se ressaisir est une courageuse mais souvent vaine tentative.

Alors, mon petit enfant, appuie contre moi cette âme trop lasse, sans rien dire (je sais tout ce que tu ne peux exprimer), sans rien penser, sans rien demander. Tu n’es plus en état d’espérer ; reste là seulement, tout contre moi. Les mamans ainsi endorment leurs tout petits-enfants qui pleurent, dans la chaleur de leurs bras.

Ce n’est pas à toi d’agir maintenant, laisse-moi faire. Je vais délier tes chaussures, elles meurtrissent les pieds qui ont trop marché – la douceur de Madeleine autrefois m’a baigné les pieds de parfums. Puis je vais étendre doucement ton pauvre corps exténué, et je veillerai auprès de toi, pour chasser la solitude. Je suis toujours là. Si tu savais me voir au long de tes journées, ton âme en serait rafraîchie. Moi, je te vois très bien, je te suis en chacun de tes mouvements, comme une maman qui a confié à son enfant une tâche difficile. Mais tu regardes tant de choses ! Tu n’as pas toujours le temps de m’apercevoir !

Je vais rafraîchir de la main ton front las. Si tu savais goûter dès ce monde la joie de ceux que j’aime, ton chagrin peu à peu s’effacerait de ce front, car la douleur serait accueillie comme la messagère d’amour.

Ai-je en vain porté ma croix, pour te donner l’exemple de l’inexorable condition humaine ? Il faut que tu sois à bout de forces, exténué comme ce soir, pour venir tomber ainsi sur mon seuil. C’est quand la fatigue t’enlève tout moyen qu’enfin tu consens à me laisser faire.

Peut-être n’as-tu pas tout à fait perdu ton temps en gravissant ainsi l’ultime sommet de ton épuisement, car c’est seulement lorsque tu es tombé que je peux te relever, et porter dans mes bras, raviver, délasser, réchauffer, l’âme de mon enfant, de mon petit enfant.

 

Abbé de Tourville, Paris 1938-1941

 

L’éducation de la jeune fille

La personne tout indiquée pour remplir cette délicate mission est la mère. Dans une famille chrétiennement constituée, la mère jouit auprès de ses enfants d’une espèce « d’infaillibilité » qui lui donne l’avantage d’être crue sans discussion, avec confiance. Si la Providence a confié aux mères une telle influence, c’est pour qu’elles s’en servent comme d’un stimulant puissant au Bien. Négliger d’user de ce pouvoir d’enseignement serait une faute inexcusable.

La mère a ensuite la « compétence », étant passée par toutes les phases que traverse l’âme de ses filles. Elle a éprouvé les mêmes craintes devant les mystères du changement de son corps ; elle s’attachera à procurer à ses filles le calme et la sécurité dont elle a peut-être eu le bonheur de profiter de sa mère, dans sa jeunesse. Si, au contraire, elle n’a pas reçu les éclaircissements utiles de sa mère, dont la bouche était probablement close par une pruderie exagérée, elle se rappellera ses anxiétés, ses hésitations, les périls courus, et elle se préoccupera de les éviter à ses enfants.

Elle obtiendra ce résultat avec facilité. Car à l’autorité et la compétence, la mère joint la « délicatesse ». Seuls les cœurs de mère savent révéler à des cœurs de jeunes filles les grandes vérités concernant les aspirations et les obligations de leur sexe. Une fille n’a habituellement pas de secret pour sa mère : tous les détails de santé qui accompagnent la profonde transformation corporelle de l’enfant en jeune fille, sont suivis par elle avec un intérêt discret et constant ; aucune des impressions de cette âme qui, sortant de sa chrysalide, voit pousser ses ailes de papillon, n’est ignorée de cette confidente providentielle, éminemment capable de les pénétrer et analyser. La mère intelligente et désireuse du bien aura, dans chaque circonstance, le mot voulu, la réponse précise, le conseil approprié au besoin présent. Elle ne dira rien de trop, rien de pas assez, mais ce qu’il faut.

Toute mère devrait comprendre ce rôle important qui lui incombe et s’en acquitter avec scrupule. La jeune fille elle-même recherchera ce cœur à cœur auprès de sa mère. Là, pas de contrainte, ni de réserve ; là, aucun péril d’une touche trop rude.

 

Créée pour être mère

Plus d’une mère, très désireuse du bien de ses enfants, déclare impossible d’aborder avec ses filles de pareils sujets. Certaines compulsent des livres sur ces graves questions et se déclarent découragées. Elles sont effrayées parce qu’elles s’imaginent qu’il faut tout dire en bloc et d’un seul coup. Elles reculent devant ce travail. Si le jeune homme, d’un tempérament positif et moins sentimental, peut être, à l’heure voulue, instruit en une seule fois des choses essentielles à la pureté, l’âme et l’imagination plus sensibles de la jeune fille, au contraire, réclament de bien plus grands ménagements. Aussi ne conseillera-t-on jamais assez aux mères de famille de procéder par degré. On réclame d’elles « patience, persévérance et savoir-faire. »

L’idée qui servira de pivot à toute l’éducation morale de la jeune fille sera qu’elle est créée pour être mère.

La maman aura su profiter depuis longtemps de toutes les circonstances pour favoriser l’instinct de maternité, encourageant sa petite fille à « jouer à la maman » avec ses poupées, dirigeant avec sérieux la toilette ou le coucher du « bébé » : « Il faut prendre bien doucement votre bébé, Madame, il est petit et fragile !… N’oubliez pas la prière avant de le coucher… Pauvre bébé tout déshabillé, ce n’est pas une bonne habitude de le laisser tout nu, vite il faut l’habiller ! » Ainsi encouragé, l’instinct maternel grandit peu à peu.

Vers douze ou treize ans, quand viendra l’heure, la mère entreprendra de faire suivre très naturellement à l’esprit de la petite jeune fille un développement parallèle à celui qui s’opère dans son corps. La mère ne doit pas craindre, vers l’époque où elle voit sa fille prendre des allures de femme, de lui parler ouvertement de cette grande chose qu’est la « maternité ». La Providence fournira un prétexte tout simple aux conversations révélatrices. La mère, à propos d’une question ou d’une réflexion de son enfant, prendra le temps de lui expliquer la raison des phénomènes surprenants et mystérieux qui, bientôt, troubleront périodiquement son organisme. Voici venue l’heure d’expliquer à la jeune fille quel rappel perpétuel elle porte en elle-même de sa destination à la maternité.

L’explication de la Salutation Angélique sera éloquente pour la jeune fille, parce qu’elle est essentiellement l’hommage de la Maternité. Notre Seigneur Jésus, venant en ce monde, a voulu se choisir une mère ; il a été formé dans le sein de Marie, miraculeusement fécondée par l’Esprit-Saint ; il y a résidé le temps assigné par la Providence… Admirable et divin mystère devant lequel la jeune fille s’émerveille. Quoi de plus facile à la mère de tirer de là les conclusions évidentes :  les enfants viennent de leur mère, comme le fruit sort de la fleur… Ils sont portés et nourris par elle durant de longs mois avant la naissance… Le miracle de l’opération du Saint Esprit dans le sein de la mère de l’Enfant Dieu ne s’est jamais renouvelé pour aucune autre femme, mais Dieu pourvoit à la fécondité des mères d’une façon merveilleuse quoique parfaitement naturelle par l’intervention de l’époux dans la pratique du saint mariage. Pourvu qu’elle ne soit pas brusquée, l’âme féminine, faite pour la maternité, en accueille les secrets avec enthousiasme.

La première grande pensée qu’il faut développer devant la future épouse est que le but principal de la femme ici-bas, c’est d’être mère ; elle est créée et mise au monde en vue de procurer la survivance du genre humain, et conduire ses enfants au Ciel. Aujourd’hui, sous couvert de féminisme, on cherche à arracher la femme à son véritable rôle en assignant d’autres directions à sa vie. L’enfant devient une femme, elle change d’allure et d’apparence…Pourquoi ? Il est facile de convaincre la jeune fille que cette métamorphose s’opère uniquement en vue de la maternité.

La vertu de pureté

À mesure que devant les yeux de la jeune fille se précisera davantage la vision de son rôle maternel, en même temps grandira dans son cœur le culte de la chasteté. Maintenant qu’elle sait apprécier la valeur de son corps et de son âme, tout naturellement elle craint pour un trésor si précieux, et cherche à le conserver intact. Dieu veut que les petits enfants naissent dans le mariage légitime, dès le jour béni où les deux jeunes époux scellent leur union devant Lui. La vertu de pureté entoure de charmes la future épouse en lui apprenant à garder précieusement le jardin intérieur de son âme durant les longues années de sa vie de jeune fille.

Si cette vertu est la parure des fiancées, que dire de l’éclat qu’elle procure aux jeunes filles, qui, renonçant aux espoirs temporels, ont résolu de sacrifier à Dieu ce que la femme a de plus précieux, son désir même de la maternité ? Alors chez celles-là, la chasteté brille d’une gloire encore plus étincelante, empruntée à celle de Marie belle comme la lune, brillante comme le soleil.

Ainsi avertie de ces grandes vérités, convaincue des graves obligations qui en découlent et aussi des soutiens que Dieu lui donne pour les remplir, la jeune fille marchera confiante sur ce sentier de la vie, si enténébré pour tant d’autres, si brillamment éclairé pour elle. Qu’elle travaille avec ardeur à cultiver et à défendre cet intérieur, qu’elle tâchera d’orner de toutes les vertus, afin de répondre aux désirs et à l’attente de celui qui, un jour, viendra en partager les charmes.

 

Sophie de Lédinghen

 

Inspiré de : « Futures épouses », Abbé Charles Grimaud.

 

Et toi, aimerais-tu « être ton ami » ?

C’est au sein de sa famille que le jeune enfant développe ses premiers contacts avec les autres : parents, frères et sœurs, grands-parents ou cousins qui passent ou rendent visite. Les parents s’appliquent à ce que s’établissent d’excellents rapports entre tout ce petit monde, un bon esprit, le désir de se comprendre, de s’entraider, de se confier. Peu à peu les connaissances s’élargissent aux amis de passage, aux gens que l’on croise dans la rue ou à l’église. Le petit fait souvent la grimace devant un nouveau visage, puis s’y habitue après plusieurs rencontres…

Parfois des familles très unies ont tendance à défendre jalousement l’entrée du foyer à tout étranger. Mieux vaut préserver nos enfants de cette forme de repliement familial en leur montrant assez jeunes qu’il y a d’autres familles, d’autres enfants, auxquels, à l’occasion, on pourra rendre service, saluer d’un mot gentil, d’un geste de politesse, d’un sourire.

Quand il ira à l’école, l’horizon du nouvel écolier s’agrandira encore, et il apprendra à bien s’intégrer dans sa classe et à respecter ses camarades, pour de nombreuses années ! C’est sa personnalité, polie et modelée par son éducation, qui fera de lui un être plus ou moins sociable et avenant. Que seront ses camarades, pour lui ? Des êtres indifférents ? Des souffre-douleurs dont on s’amuse parce qu’ils n’ont ni son nom, ni sa désinvolture… ? Des objets de mépris car concurrents, trop « bigots » ou dévergondés ? Non, ils ne peuvent ni ne doivent être cela ! L’écolier devra d’abord voir en chacun de ses camarades, en chaque homme, une âme créée par le Bon Dieu. Ses parents l’aideront dès son jeune âge à voir, non s’il a tel ou tel caractère, non s’il est déplaisant ou sympathique, mais une âme. Une âme qui se prépare, comme lui, un avenir éternel de joie ou d’horreur. Avant de juger, il doit déjà respecter l’âme de ses congénères, et l’aimer comme Dieu l’aime.

Qui sait si le salut de l’une de ces âmes n’est pas lié à l’attitude qu’aura l’enfant vis-à-vis de lui ? Souvent, les hommes se damnent par les hommes, et Dieu les sauve aussi les uns par les autres. En tout cas, cet enfant peut beaucoup compter pour en entraîner un autre dans un sursaut ou une chute, selon sa bonne ou mauvaise influence sur lui (et inversement !). À l’école, l’élève « bon camarade » cherchera à élever le niveau d’entente entre tous, à contribuer à donner un esprit de classe qui est comme une âme collective frondeuse ou disciplinaire, vulgaire ou distinguée, fervente ou indifférente… Il apprendra également à se défier des mauvais sujets pour lesquels il aura tout tenté avec gentillesse, mais sans succès. On le mettra en garde de ne pas mettre son âme en danger sous prétexte de « convertir » un camarade de mauvaise influence. Prier pour le malheureux sera alors son réconfort, et la Providence fera le reste.

Cela n’est pas donné à tout le monde d’être meneur d’hommes, fédérateur dans sa classe, mais cela est à la portée de tous d’être le bon camarade sur lequel on peut compter, auquel on songe spontanément quand on a un service à demander, dont on est sûr de n’être jamais repoussé. Celui-là devient alors un modèle vivant qui sans pose, s’impose ; sans rien dire, réprimande ; sans discours, prêche Dieu ; sans rien faire pour attirer l’attention, se distingue aux yeux de tous.

C’est en étant admirable, vertueux, que l’on se fait de bons amis. Vertueux ne veut pas dire « sainte Nitouche » qui se montre exemplaire par devant et détestable par derrière ; mais quelqu’un qui, se mettant à l’école de Notre-Seigneur, imite ses vertus de bonté, de joie, d’honnêteté, de franchise, de courage, de pureté… pour se faire un autre Christ parmi les autres. Cela est entraînant pour l’entourage qui voudrait imiter et devenir l’ami de ce si bon camarade. « Qui se ressemble s’assemble ! », les bons camarades, comme les mauvais, auront une bonne ou une mauvaise influence autour d’eux…

Plusieurs fois, des jeunes de mon entourage sont venus me trouver :

– Je n’ai pas d’amis, personne ne veut venir avec moi…

– Et toi, aimerais-tu « être ton ami » ? En quoi es-tu suffisamment aimable pour attirer de bons et sympathiques amis ?

C’est amusant comme à chaque fois cette question faisait « mouche » en ouvrant les yeux de l’âme. Nous n’avions pas besoin de développer davantage la question… Tout était clair, et je le voyais bien dans ce bon sourire entendu que j’avais alors en face de moi !

En amitié, ce sont les âmes qui s’attirent, qui s’entraînent et s’élèvent en s’encourageant mutuellement. Un bon ami n’est jamais parfait, il a ses propres défauts, ses propres combats pour son bien supérieur, il a comme nous tous son pèlerinage terrestre à accomplir avec ses dépouillements et ses enrichissements, ses labeurs, ses épreuves, ses chutes, et ses élans de grâces. Le véritable ami sait nous reprendre, nous encourager contre nos défauts ou faiblesses, et peut tout nous dire. Il est autant l’ami de notre âme que celui de notre personne humaine… et peut-être même plus !

Il faut donc guider nos enfants dans la recherche du bon ami, celui qui l’entraînera vers le Ciel. Le Bon Dieu en met toujours un et même plusieurs sur le chemin, parfois dès la petite enfance, parfois plus tard (scoutisme, pension, études supérieures, paroisse…), toujours il nous envoie ce soutien de l’âme. Mais surtout notre éducation fera de notre enfant « le » bon ami pour d’autres, un nouveau Jésus-Christ parmi ses congénères, en famille, en société, en entreprise, celui dont on pourra dire : « Si je ne l’avais pas connu, je ne vaudrais pas la moitié de moi-même. » Celui-là saura immanquablement se faire de bons et vrais amis !

   Sophie de Lédinghen 

 

La communion des saints expliquée aux enfants

Communion veut dire union commune de plusieurs personnes. La communion des saints est l’union de tous les baptisés qui sont en état de grâce (qui n’ont pas fait de péché mortel), que l’on appelle saints parce qu’ils sont tous appelés à se sanctifier pour aller au Ciel. Parmi ces saints, on compte trois grands groupes différents– les saints du Ciel (la sainte Vierge, les anges, les saints et les saintes qui ont déjà gagné le Ciel, c’est l’Église triomphante)

– les âmes du Purgatoire (qui attendent le Ciel en se purifiant au Purgatoire, c’est l’Église souffrante)

– les âmes de la terre (qui luttent encore sur la terre pour mériter le Ciel, et dont nous faisons partie, c’est l’Église militante).

L’ensemble de ces âmes forme une grande famille (appelée le corps mystique de l’Église) dont Jésus-Christ est le chef (la tête). Comme dans toutes les familles, ces âmes ont une grande union entre elles. Cette union n’est pas celle des corps, mais celle des âmes, elle est donc une union spirituelle.

Examinons maintenant une famille dans laquelle il y a plusieurs personnes. Je remarque un grand-père et une grand-mère, tous deux sont très vieux et ne peuvent plus travailler, ils sont infirmes et ont besoin de secours. Ces deux membres de la famille sont donc impuissants à s’aider entre eux et à aider les autres.

Puis, voici les enfants : de jolies petites têtes un peu ébouriffées, qui vont à l’école. Ces enfants cherchent à devenir de petits savants, mais ils ne gagnent pas encore leur vie. Ils espèrent gagner de l’argent un jour mais sont encore à la charge de leurs parents.

Enfin il y a la mère, et le père qui a un bon métier et gagne de l’argent. Cet argent sert à faire vivre la famille tout entière, chacun en profite, et il en reste même une certaine somme qui constitue un fond de réserve : c’est la richesse de la famille.

Or, la grande famille de Jésus-Christ a amassé un trésor de richesses comme la famille de la terre. Vous allez voir comment.

Qui est le grand chef de l’Église ? C’est Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Qu’a-t-il fait toute sa vie ? Il a mérité. Il a amassé un immense trésor de mérites infinis ou de richesses spirituelles. Il n’en avait pas besoin pour Lui, puisqu’Il est Dieu. Il a donc mis de côté toutes ses richesses pour les laisser aux membres de la famille.

La Sainte Vierge et les saints ont eu aussi une vie pleine de mérites infinis, pleine de richesses spirituelles, car vous le savez, mes enfants, quand on fait une bonne action, un sacrifice, cette bonne action ou ce sacrifice se change en mérite ou en richesse spirituelle. Or, la vie de la Sainte Vierge et celle des saints a été une vie si pleine de mérites que vous imaginez combien le trésor de la famille a augmenté encore ! Ces mérites peuvent servir pour nos péchés puisque la Sainte Vierge et les saints les ont abandonnés au trésor commun.

Et nous-mêmes, mes enfants, quand nous faisons de bonnes prières, de bonnes actions, des sacrifices, nous gagnons des richesses spirituelles. Elles peuvent servir à payer pour réparer nos péchés, mais si nous n’avons pas trop de dettes contractées par nos fautes, cette richesse est à notre disposition « en réserve ».

Voyons maintenant comment nous pouvons communiquer entre nous. Dans la famille de la terre nous entretenons des relations en nous parlant, en nous écrivant ou en nous rendant des visites. Eh bien, nous pouvons également parler aux saints et correspondre avec eux par la prière. De même que par la parole, nous demandons aux membres de notre famille de la terre de nous aider, de même aussi nous exposons nos besoins aux saints du Ciel, et ils nous aident en obtenant de Dieu, pour nous, toutes sortes de grâces. Nous pouvons même leur rendre visite dans leurs sanctuaires. Avec les âmes du Purgatoire, nous pouvons aussi avoir des relations suivies. Mais ces pauvres âmes sont impuissantes pour elles-mêmes. Dans la famille terrestre, le grand père et la grand-mère paralysés ont besoin d’aide. Il en est de même pour les âmes du Purgatoire qui ont grand besoin de notre secours. Nous pouvons les aider à sortir du Purgatoire où elles souffrent en payant pour elles les réparations de leurs péchés et l’insuffisance de leurs sacrifices et bonnes œuvres. Nous prions, nous faisons des sacrifices, de bonnes communions, nous faisons dire des messes pour elles, et tout cela sert à les délivrer en payant leurs dettes. En retour, quand ces âmes sont enfin dans le Ciel, elles nous remercient en priant Dieu pour nous, car tous les membres de la grande famille se soutiennent.

Enfin, voyons comment nous pouvons établir entre nous, fidèles de la terre, des relations spirituelles.

Quand, dans une famille, quelqu’un a beaucoup d’argent, il peut, s’il est bon, en donner à ses frères, à ses parents. Avec la richesse qu’il possède, il fait du bien. De la même façon, nous pouvons donner aux âmes que nous aimons avec la richesse que le Bon Dieu nous accorde en paiement de nos bonnes œuvres, de nos prières, et de nos sacrifices. Si nous prions pour quelqu’un, notre prière retombe sur celui pour qui nous prions. Si nous faisons un sacrifice et l’offrons au Bon Dieu pour telle ou telle personne, c’est une façon de mériter pour elle. Puis le Bon Dieu, en bon père de famille, rassemble les mérites de tous et en fait profiter tous ses enfants. Ainsi chacun tire profit des prières et des mérites des autres.

 

Vous voyez combien le Bon Dieu nous aime et nous voudrait tous auprès de Lui au Paradis céleste en nous permettant de payer nos dettes et celles d’autres âmes ! Alors, promettez-vous de gagner beaucoup de mérites en priant et en vous sacrifiant pour remplir votre réserve de trésor, et la distribuer aux pauvres pécheurs ? Penserez-vous aux âmes qui souffrent au Purgatoire, aux malades, aux prisonniers, aux malheureux, mais aussi au Pape, aux prêtres, aux missionnaires tout seuls dans des pays lointains, et aux moines et religieuses qui prient et se sacrifient en secret pour nous  dans leurs monastères, promettez-vous de beaucoup donner aux âmes pour l’amour de Jésus ? Car, je vous livre peut-être ici un secret, chers petits amis, mais à vous le Bon Dieu donne beaucoup de richesses si vous les lui demandez, parce qu’Il aime et écoute les enfants. Alors, profitez de ce petit privilège… Et n’oubliez surtout pas votre papa et votre maman !

 

   Sophie de Lédinghen

 

Les fidèles serviteurs

Le grand pouvoir des parents, dans l’éducation de leurs enfants, est de façonner leur intelligence et leur volonté de telle manière que ceux-ci soient en mesure de résister aux tentations et aux orages de la vie, et de ne jamais abandonner l’idéal moral que l’on aura su déposer dans leur cœur. Élever un enfant n’est pas lui éviter toute peine et tout effort, c’est, au contraire, développer en lui les forces morales qui lui permettront de faire face aux difficultés de l’existence, mais aussi toutes ces richesses que le divin Maître remet au tout petit dès sa naissance, avec pour mission de les faire fructifier jusqu’au soir de sa vie. Cette fortune, don gratuit que Dieu dépose dans nos âmes, nous n’en sommes que dépositaires, et devrons tous Lui en rendre compte à notre mort.

C’est d’abord à nous, parents, d’apprendre à discerner les talents encore cachés chez nos petits, observant leurs capacités, qualités et défauts, facilités et faiblesses, puis les aidant peu à peu à  les exploiter ou les maîtriser jusqu’à devenir capables de se « commander » à eux-mêmes. Voyons comment nous pouvons aider un enfant à mieux se connaître et s’épanouir en développant ses atouts.

L’observer 

C’est en regardant évoluer son enfant, en voyant ses réactions dans différentes situations que l’on découvre son caractère, ses tendances spontanées, ses goûts. L’intrépide, le colérique ou le farceur ne réagira pas de la même façon en dégringolant de son tabouret ! La vue (et l’odeur !) d’un beau gâteau qui sort du four enchantera le gourmand expansif, quand le solitaire n’y jettera qu’un rapide coup d’œil et retournera paisiblement finir son puzzle.

Le jeu est un autre bon moyen de connaître ses enfants qui inventent des jeux collectifs et obligent les participants à se soumettre aux « règles du jeu ». Les jeux préparent l’enfant à s’adapter aux exigences de la vie en société : on respecte la règle, on ne triche pas, on accepte de perdre, sinon, on est exclu du jeu et méprisé des autres. Il y a des jeux pour le corps, d’autres pour l’esprit, l’imagination, les jeux d’imitation, de vitesse, certains pour se défendre, d’autres pour attaquer… Pour qu’un jeu soit éducatif, il doit demander un effort personnel à l’enfant.

Le choix des jeux de l’enfant, la manière dont il s’y comporte sont autant d’indices qui permettront à l’éducateur de discerner, sinon la vocation, du moins le sens dans lequel il faudra orienter la recherche de la vocation. Celui-ci a un tempérament de chef alors que celui-là est destiné à obéir et à suivre une filière fixée d’avance… Donner des responsabilités de chef à ceux qui sont destinés à suivre un chemin tracé d’avance, c’est les préparer aux pires échecs, n’en déplaise à leurs parents !

Dans les jeux, l’enfant se fait connaître tel qu’il est. Les parents qui n’ont pas pris le temps d’observer leurs enfants au cours des jeux ne les connaissent pas vraiment. C’est là que se manifestent les passions les plus spontanées. C’est en voyant l’enfant perdre que l’on découvre chez lui la jalousie qui le porte à détruire le jeu pour se venger ; c’est en assistant à ses réussites triomphantes que l’on constate un certain manque de modestie. C’est en jouant qu’il manifeste son pouvoir de chef ou sa tendance grégaire, qu’il se montre juste ou injuste, loyal ou tricheur. Jouer avec ses enfants est un formidable spectacle qui les révèle « au naturel » !

À partir de cette observation, les parents ajusteront à chacun de leurs enfants les principes d’éducation : tempérer l’expansif, encourager le timide, calmer le colérique, pousser le directif à écouter les autres avant de s’imposer, apprendre à perdre de bon cœur…

Gagner sa confiance

La confiance naît de la sympathie. « Cette lente pénétration de la loi morale dans la conscience personnelle de l’enfant se fait par l’intermédiaire du milieu, pour peu que ce milieu lui soit sympathique. S’il lui est antipathique, il se raidit et s’oppose à l’influence que l’on prétendrait exercer sur son caractère. »  (Abbé J. Viollet). Pour que cette influence se fasse normalement, il faut d’abord gagner la confiance de l’enfant. Plus la confiance est grande et plus facilement il accepte les conseils et s’adapte aux idées que l’on s’efforce de faire pénétrer dans son âme. Tout change dès que l’enfant se sent en confiance. Celle-ci provoque la franchise, elle établit une collaboration entre l’enfant et son éducateur… Et voici résolu le plus difficile problème de l’éducation : obtenir de l’enfant qu’il se corrige lui-même, qu’il « s’élève » en même temps qu’on l’élève.

Pour cela, il faut surtout garder son calme, lui faire comprendre que l’on veut son bien. L’enfant sait très bien faire la distinction entre ceux qui le gâtent et qu’il exploite sans les aimer, et ceux qui s’appliquent à le former pour son bien, et pour lesquels il éprouve à la fois respect et affection. Ensuite garder l’intimité des cœurs sans confondre cette intimité avec la camaraderie dont se vantent certains parents maladroits. La confiance n’exclut pas le respect. Permettre à l’enfant de parler à ses parents comme il le ferait avec ses camarades, autoriser des attitudes sans gêne, serait détruire le sentiment de vénération qui accompagne toujours la croyance en la supériorité de l’éducateur. En outre, l’intimité suppose que les parents aient pris la peine de cesser tout travail personnel pour laisser à l’enfant le temps de « se raconter » (sa journée, ses petits malheurs et réjouissances…), et pour lui parler de tout ce qui peut l’intéresser. C’est le moment précieux où ils glissent leurs conseils, encouragent la bonne volonté, éveillent le goût du mieux et du plus parfait.

Lui donner confiance en lui

Si les parents ont su gagner la confiance de leur enfant, alors il sera plus facile pour lui d’avoir, sans être orgueilleux pour autant, une certaine confiance en lui qui lui donnera le courage d’avancer, d’entreprendre, de prendre des initiatives, des responsabilités, cette assurance pour oser, affronter, se dépasser… !

Mais, Madame, mon enfant est beaucoup trop timide…, ma fille gâche tout ce qu’elle touche… ! Qu’à cela ne tienne, proposez-leur donc des efforts progressifs et précis. En voulez-vous quelques exemples ?

De façon générale, l’enfant timide ou maladroit se sous-estime, il se croit bon à rien, inintéressant pour avoir des amis, et il se replie sur lui, bien à l’abri dans sa chambre. La plupart du temps, ces enfants-là ont des difficultés scolaires ou alors se réfugient complètement dans leur travail pour oublier le reste. Le remède commence en leur donnant confiance en eux. Pour cela que la maman ne fasse pas à leur place, ou ne refasse pas devant eux ce qu’elle leur avait demandé, et tant pis si une fourchette est un peu de travers sur le couvert, ou s’il y a un pli sur la nappe ! Demandez à votre enfant de vous accompagner chez le boulanger, et expliquez-lui gentiment sur le chemin que c’est lui qui va demander le pain à la boulangère. La fois suivante, vous le laisserez entrer seul dans la boutique, et voilà de jolies petites victoires personnelles que vous ne laisserez pas sans félicitations ou témoignage de votre fierté ! Et peut-être bien que dans quelque temps, il vous proposera d’aller seul vous faire une petite course…

Si votre enfant ne participe pas en classe ou ne raconte rien à la maison… (surtout devant les autres !), profitez du repas en famille pour discuter avec chacun, un par un, posant des questions simples sur la journée. Au début, votre timide répondra par oui ou non. Quelques jours plus tard, poussez-le à vous en dire un peu plus… Puis à développer peu à peu son avis personnel : pourquoi est-ce-que tu apprécies ce livre ? Comment était la sortie de louveteaux ? Ainsi prendra-t-il la parole avec plus d’aisance, passant sur le regard des autres.

Un enfant qui ne réussit pas bien à l’école, parfois même en dépit de beaucoup d’efforts, a besoin de faire une chose qu’il aime pour la réussir ! Le Bon Dieu n’a créé personne qui soit mauvais en tout, et votre enfant a forcément quelques bonnes dispositions dans un domaine ou un autre (cuisine, jardin, bricolage, broderie, dessin, chant, sport…), que vous aurez observées depuis sa petite enfance (!) et dans lesquelles vous pouvez l’encourager, en faisant avec lui d’abord, puis en le laissant faire seul. Si rien ne l’attire spécialement, pourquoi ne pas lui offrir un poisson rouge, ou un petit animal dont la responsabilité l’affirmera ? Si votre enfant n’a pas d’amis, ou ne veut voir personne, faites donc venir chez vous un camarade avec lequel il pourrait s’entendre pour un court après-midi. Cela pourrait lui changer l’existence qu’un « ami » soit venu le voir, et il le retrouvera à l’école avec plus de plaisir. Avant que votre enfant ne grandisse trop, de nombreuses petites barrières pourraient ainsi peu à peu s’abaisser et le soulager en fortifiant sa confiance en lui. Ainsi pourra-t-il plus aisément donner le meilleur de lui-même. Cela demande beaucoup de temps et de courage, mais offre aussi le goût de l’effort pour réussir les choses en se vainquant soi-même. Rien ne donne plus confiance à l’enfant dans ses propres capacités que l’effort constructeur.

 

Ainsi, peu importe les dons que Dieu a accordés à nos enfants. Qu’ils soient nombreux ou non, visibles ou discrets, ce qui compte c’est que chacun les ait travaillés et fortifiés pour son propre salut mais aussi dans la communion des saints pour la plus grande gloire de Dieu. Alors, comme au fidèle serviteur, le Maître pourra dire : « Bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton Seigneur ».

 

   Sophie de Lédinghen

 

Qu’il est bon d’habiter ensemble !

Il y a des familles rayonnantes d’une joie vraie, unies en toutes circonstances, fortes d’un esprit commun, d’une touchante solidarité, et cela se voit au premier coup d’œil ! Est-ce donc possible ? Bien sûr que cela est possible, même si toute œuvre humaine n’est jamais parfaite, il suffit de le vouloir, de le décider et d’en prendre les moyens.

 

Vouloir un foyer chrétien uni 

Pour créer, maintenir ou renforcer l’unité familiale, il est tout d’abord nécessaire de croire que cette unité est possible, et se dire qu’elle ne pourra se faire sans notre volonté. Unis par les liens du sang, les membres d’une même famille sont également unis par l’union de vie surnaturelle : union de la grâce, de la foi, de la charité. « La grâce ne détruit pas la nature mais la perfectionne.» « La charité maintient les affections naturelles dans l’ordre en même temps qu’elle les élève, qu’elle les purifie, qu’elle les ennoblit et, en un mot, les surnaturalise1.» La charité entraîne ainsi l’homme à aimer toujours davantage les membres de sa famille pour leurs biens supérieurs que sont la vie éternelle, la grâce, les vertus. Toute la famille doit donc être également unie par le désir de progresser spirituellement.

 

Ce qui unit 

La prière : « Si la famille prie, elle vit, si elle prie unie elle vit unie.» (Pie XII) On ne recommandera jamais assez de dire la prière en famille. L’enfant qui aura vu son père, sa mère à genoux reproduira naturellement ce geste tout au long de sa vie. Prière du matin, du soir, examen de conscience, chapelet ainsi qu’une éducation spirituelle régulière donneront le sens de la présence habituelle de Dieu dans la petite âme. Le dimanche, toute la famille assistera regroupée à la messe, comme une petite Église domestique qu’elle est. On est plus fort lorsque l’on est ensemble, on prie mieux et on se tient bien en voyant Papa et Maman à côté.

 

– L’ambiance : si les parents sont eux-mêmes bien unis, se témoignant délicatement leur affection mutuelle, cela engendrera un climat de paix, de sérénité qui aura beaucoup de retentissement sur le climat général de la famille. Les enfants reproduiront entre eux, et envers leurs parents, des gestes affectueux ; se parleront comme ils entendent leurs parents se parler (ou leur parler) ; seront joyeux si l’ambiance y entraîne et qu’ils ont le cœur léger. Et s’il arrive que les parents aient besoin de s’expliquer, qu’ils le fassent sans éclats, et en dehors des enfants. Ou si encore un mouvement d’impatience ou un mot vif venait à fuser, que les parents s’en demandent pardon aussitôt.

 

L’atmosphère de la maison doit être joyeuse et chaleureuse. La joie n’est pas le plaisir, la facilité. Non, la joie chrétienne n’amollit pas, ne décourage pas, au contraire elle ranime l’énergie dont elle est le reflet, et s’accroît elle-même par le combat. La joie qu’il faut établir en famille est donc la joie de l’effort, la joie de la victoire, la joie du sacrifice. Ce sourire dans la générosité qui plaît tant à Dieu ! « La seule manière qui soit vraie, utile, chrétienne, de regarder cette terre de péché, c’est celle du vainqueur ; il faut racheter le monde avec joie2. »

 

– Tout ce qui ne se dit pas mais qui se vit comme une évidence : le respect de soi et celui des autres. La valeur morale des gestes comme celle du langage porteront l’enfant au respect ou à la grossièreté, à la délicatesse ou à la brutalité. Si le père de famille se laisse aller à des vulgarités, comme jurer au volant de sa voiture, inévitablement les jeunes enfants répèteront très spontanément ce qu’ils auront entendu ! Les parents veilleront sur leur propre langage, et ne se laisseront pas aller à des paroles ou à des expressions qui témoigneraient qu’ils ont perdu le contrôle d’eux-mêmes. Ils auront une autorité juste, ne critiqueront pas leur prochain, resteront bienveillants et sans rancune, pardonnant toujours même s’ils ont été péniblement offensés. À ce sujet, il y a des « affaires de grandes personnes » qui ne concernent en rien les enfants et que les parents doivent garder pour eux. Cela ramène plus vite une paix de l’esprit, puis le pardon, plutôt que de troubler toute la famille. « Toute vérité n’est pas toujours bonne à dire ! »

 

– Le règlement familial : « La liturgie de l’Église se compose d’un très riche ensemble de rites, réguliers et obligatoires. Elle compte sur la puissance de ces rites pour nous inspirer le respect et l’amour que nous devons avoir pour Dieu3.» Si donc on veut développer dans l’âme des enfants de bonnes habitudes tout empruntes de sentiments chrétiens, il faut qu’il y ait des règles, pour ainsi dire des « rites chrétiens » de la vie de famille, bien définis, et respectés par tous. Ces rites, pour être efficaces, seront stables et communs à tous les membres, car la famille a besoin d’homogénéité pour conserver la force de sa vitalité et de son caractère, pour calmer l’agitation de la vie et faire régner la paix. En rentrant chez soi, on les y trouvera et l’on se ressourcera. « La règle n’est pas un obstacle pour l’enfance. Elle est un besoin, elle est une nécessité4. »

 

Commençons par bannir les caprices, les plaintes, le mensonge, les gros mots, les portes qui claquent, au profit de la franchise, la bonne humeur, la confiance mutuelle, l’esprit de service… Ensuite, ne nous critiquons jamais entre nous. Protégeons notre intimité familiale en « réglant nos affaires » entre nous, et toujours chrétiennement ! Pensons surtout à voir notre prochain avec le regard de la foi plutôt que celui de la passion, en nous efforçant de bien vite pardonner, et du fond de notre cœur.

 

Les horaires et la régularité dans le rythme quotidien ou hebdomadaire sont un socle pour la fidélité aux petites, puis aux grandes choses.

Le milieu familial doit aussi avoir la « splendeur de l’ordre » (saint Augustin). Le désordre matériel entraîne en effet l’esprit à ne pas plus s’étonner du désordre des idées et de la conduite que du désordre de sa chambre. Le mot « désordre » lui-même est devenu synonyme de « dérèglement des mœurs ». Il faut donc exiger que, dans leur petit domaine, les enfants rangent eux-mêmes le fatras de livres, de jeux et de vêtements qui traînent dans leur chambre. Si l’on a eu cette exigence pour eux et que le reste de la maison est habituellement propre et ordonné, les petits s’imprègneront naturellement de ce goût de l’ordre et acquerront une qualité éminente : la maîtrise de soi.

Il est nécessaire que tous se sentent bien en famille. C’est à chacun d’y mettre du sien, d’y contribuer en une fusion des pensées, des sentiments et des vertus comme les flammes entremêlées d’un même feu consumant l’égoïsme, l’individualisme, les recherches de soi… Toutes ces duretés étouffent un véritable esprit de famille. C’est de tout cela que dépend le bonheur d’un foyer où il fait bon se retrouver le soir, et « habiter ensemble ».

 

   Sophie de Lédinghen 

 

Nos enfants sont-ils de petits anges innocents ?

« Tu ne mangeras pas du fruit de cet arbre. » (Gen 2, 17) En établissant cette restriction dans l’usage de toutes les choses créées qu’Il venait de donner à l’homme, Dieu voulait par là lui rappeler qu’il n’est pas son propre maître : c’est de Dieu qu’il doit recevoir la connaissance du Bien et du Mal. Prétendre atteindre sa fin hors de Dieu, refuser de reconnaître sa dépendance à son égard, cela s’appelle : le péché.

Séduits par le démon, Adam et Eve désobéirent gravement à Dieu, l’homme commit ainsi le premier péché, il s’est séparé volontairement de Dieu et s’est lui-même privé de l’amitié divine. Ayant perdu ce trésor, comment alors aurait-il pu le transmettre à ses descendants ? Voilà pourquoi nous naissons tous privés de la grâce divine. C’est cette privation que l’on appelle le péché originel. « Voici que je suis né dans l’iniquité, dans le péché ma mère m’a conçu. » (Ps 50,7)

Quoique propre à chacun, le péché originel n’a, en aucun descendant d’Adam, un caractère de faute personnelle. C’est la privation de la sainteté et de la justice originelles, la nature humaine n’est pas totalement corrompue mais blessée dans ses propres forces naturelles, soumise à l’ignorance, à la souffrance et à l’empire de la mort, et inclinée au péché (cette inclination au mal appelée « concupiscence »).

Le Baptême (enseigné par Jésus-Christ lui-même à ses Apôtres), en donnant la vie de la grâce, efface ce péché originel et retourne l’homme vers Dieu. Mais demeure la blessure de ce péché, comme la cicatrice d’une plaie guérie, qui affaiblit et entraîne au mal la nature de l’homme et l’appelle au combat spirituel. Ignorer que l’homme a une nature blessée, inclinée au mal, donne lieu à de graves erreurs dans le domaine de l’éducation.

 

Le but de l’éducation

Dans son infinie sagesse, le Créateur a établi des règles pour notre bien. Il ne nous appartient pas de les changer, mais seulement de nous y soumettre en toute confiance : faire le bien, éviter le mal. C’est la voie du bonheur. Malheureusement, bien souvent on se trompe de bonheur, on le cherche où il n’est pas : richesse, bien-être, gloire humaine, pouvoir… Or c’est en Dieu seul, source de tout bien et de tout amour, que se trouve le vrai bonheur. Et chaque fois que nous nous détournons de ces règles établies par Dieu, nous devenons malheureux, parfois même au point de perdre cette vie de la grâce de notre baptême (péché mortel).

Lorsqu’un enfant nous arrive, c’est à nous ses parents de le former à cette vie morale, notamment en lui transmettant la connaissance du bien et du mal ; plus encore, en lui apprenant à vivre en conséquence, à mettre en pratique cette « formation morale », ou formation de la conscience qui tient une place de premier ordre dans l’ensemble d’une éducation qui doit être le moyen d’atteindre le but de sa vie, le Ciel.

 

Apprendre à obéir

Voilà l’une des premières notions à apprendre à nos tout jeunes enfants : si on respecte papa, maman, ou toute autorité, on respectera tout naturellement le Bon Dieu. Si l’enfant voit qu’il rend heureux ses parents lorsqu’il leur obéit, ou bien les fâche en ne les écoutant pas, il comprendra très vite ce qu’est l’obéissance ou ce qu’il en coûte de désobéir. Alors le récit de la chute de nos premiers parents ne présentera aucune difficulté pour lui. Il n’aura aucune peine à comprendre la situation. Il saura qu’il est normal d’être puni quand on désobéit et que si cela fait de la peine à papa et maman, cela fait aussi de la peine au Bon Dieu. Voilà pourquoi il est nécessaire d’encourager l’obéissance de nos enfants, de les récompenser ou punir, toujours avec mesure et justice, à la manière de Dieu envers nos âmes lorsqu’Il nous jugera ! C’est un grave devoir de savoir sévir et encourager, de faire comprendre très tôt aux petits ce qui est bien et ce qui est mal ; et que ce qui fait plaisir ou non à papa et maman fait également plaisir ou de la peine « au bon Dieu si bon » !

 

Ce qu’est le péché

Un peu plus tard, vers trois ou quatre ans, >>>    >>> on expliquera au petit que tout ce qui fait de la peine au Bon Dieu (ou « à Jésus ») est un péché, et que le péché salit son cœur qu’il doit garder bien propre pour, un jour, aller au Ciel voir Jésus. La notion du péché sera claire : une offense à Dieu. En application, dans la vie de tous les jours, les parents apprendront à l’enfant à lutter contre ses mauvaises tendances (colère, paresse, gourmandise…), lutte qui durera toute la vie.

On expliquera ensuite que le péché est le fait de désobéir, et que la tentation seule n’est pas péché. C’est l’action de désobéir à Dieu en « obéissant à la tentation » qui est un péché. Mais, avec l’aide de Dieu et de la Sainte Vierge, on est plus fort pour résister à la tentation. Si on se met sous la protection de Notre-Dame, le démon perd la bataille et ne peut rien nous faire ! On pourra alors montrer à l’enfant une image de la Sainte Vierge écrasant le serpent sous son pied.

 

La conscience

Elle est cette voix intérieure que Dieu a mise en nous comme un guide pour nous aider à faire le bien et rester son enfant. Pour les plus petits, il sera plus facile de dire d’« écouter son bon ange » et « ne pas écouter le démon ». Dès 5 ou 6 ans, quelquefois plus tôt selon les enfants, on les fera réfléchir sur eux-mêmes, sur l’importance d’être attentifs à cette « voix intérieure » et de la suivre fidèlement.

 

Demander pardon

Adam et Eve ont regretté leur péché, et ils ont demandé pardon. Pour leur montrer qu’Il pardonne, Dieu va leur promettre un sauveur. Consolés, ils supporteront avec courage et patience toutes les misères de leur vie.

Nous aussi, nous devons toujours demander pardon sans tarder, dès qu’on a fait quelque chose de mal. Les enfants doivent avoir la certitude que Dieu pardonne toujours si on regrette sa faute et si on en demande pardon. C’est le meilleur antidote contre l’orgueil (« l’éternité de l’enfer vient de ce que le diable ne veut pas demander pardon » disait Bossuet). Et c’est une habitude qu’il faut prendre très jeune : dès qu’un petit tape ou désobéit, on lui fera toujours faire un câlin ou un baiser avant qu’il sache prononcer « pardon » lui-même. Faire la paix, cela va dans les deux sens : à son tour il lui faudra aussi apprendre à pardonner aux autres, et cela ne se fait pas tout seul non plus ! Plus ces habitudes seront prises tôt, moins ce sera difficile.

Cette éducation à faire le bien et éviter le mal guidera l’enfant toute sa vie, le préparera au sacrement de Pénitence en le conduisant régulièrement au confessionnal où il s’agenouillera devant le ministre de Dieu, humble et repentant. Notre responsabilité n’est-elle pas de lui ouvrir la voie du vrai bonheur, celle du Ciel, en lui en donnant les meilleurs moyens d’aimer et de servir Dieu, plutôt qu’en le comblant de gâteries et flatteries qui l’en écarteraient pour l’éternité ?

Le monde dans lequel nous vivons est aux antipodes de cette vision des choses : matérialisme, esprit de consommation, recherche du plaisir, individualisme… Un monde totalement déboussolé, jusqu’à perdre le plus élémentaire bon sens naturel ! Pourtant, c’est dans ce monde que nous sommes appelés à vivre. Cela ne doit pas nous décourager : si Dieu nous a placés là, c’est pour que nous servions de témoins de la Lumière au milieu des ténèbres. Ayons confiance, tant que nous Lui restons fidèles, Il nous donnera toute la force dont nous avons besoin.

Restons solides et fermes dans l’éducation de nos petits, ne leur trouvons pas sans cesse des excuses en nous rappelant que, marqués du péché originel, ils ont un combat à mener contre leurs propres faiblesses. Fortifions-les dans cette lutte pour la vertu plutôt que de les amollir en leur évitant toute sanction ou contrariété : faisons-en avec courage les saints de demain !

 

Sophie de Lédinghen

 

Se connaître, se comprendre, s’aimer

C’est faute de se connaître respectivement et mutuellement que bien des époux, des frères et sœurs, des amis se heurtent parfois jusqu’à se blesser profondément. Ce sujet passionnant et délicat devrait constituer un chapitre important au grand livre de l’éducation parentale.

Voici quelques pistes, très générales, qui guideront peut-être les parents sur les différences psychologiques, biologiques masculine et féminine, leurs richesses et nécessaire complémentarité pour une meilleure compréhension.

 

Ce n’est ni dans l’art, ni dans la science, ni dans les découvertes, ni dans les lettres pour elles-mêmes, ni dans la domination que la femme atteindra sa fin : elle est ordonnée de corps et d’âme pour la maternité ou pour le sacrifice, dans le dévouement. Rôles sublimes auxquels elle n’apportera jamais trop de compétences, et qui nécessite donc une intelligente et solide éducation.

Tandis que généralement le garçon perçoit, compare, juge, la femme saisira souvent par une perception intérieure mystérieuse, « l’intuition », le sens d’un geste, d’une démarche, d’un regard, d’un sourire, d’un mot. Cette différence essentielle dans la manière d’aborder le champ des conceptions intellectuelles saute déjà aux yeux chez le petit garçon comparé à la fillette.

 

L’intelligence :

En face d’un objet inconnu, le premier demande : « Comment l’a-t-on fait ? D’où cela vient-il ? » La petite fille s’exclame : « C’est beau ! » ou « C’est laid ! », « Pour qui est-ce ? » Dans le premier cas, recherche de la vérité ; dans le second, expression d’émotion.

La mémoire de la femme subit le contrecoup de son affectivité envahissante pour tout ce qui l’intéresse. Ses souvenirs se fixent ou se transforment au gré de ses impressions du moment. Celles-ci sont renforcées par l’imagination dominante. Les devoirs de rédaction des jeunes filles sont riches de fantaisies précisément parce qu’elles ont une facilité à s’évader du réel dans le rêve (ou le roman vécu jusqu’à l’intime !). Le langage des fillettes est, de ce fait, très aisé et coloré, alors que celui des garçons du même âge reste hésitant, embarrassé, sec, comme un énoncé de problème ! De cette vérité découle la nécessité d’une culture, d’une éducation spirituelle et temporelle, pour contrebalancer les effets souvent désastreux de leurs penchants innés.

 

La raison :

L’homme se place nettement en face de la situation, en dégage le côté immuable et concentre toutes ses énergies pour résoudre au mieux le problème de sa propre existence en fonction de son milieu, de ses charges familiales ou professionnelles, de ses moyens. Logique raisonnable, capacité d’atteindre, dans le cours des événements, une tranquillité d’âme relative, « égocentrique », qui peut tenir lieu de bonheur.

La femme, souvent, répugne instinctivement à calquer sa vie sur la réalité, et lutte contre les points fixes qui la jalonnent, même si de perpétuelles désillusions meurtrissent son cœur. Illogisme poussé à fond dans la recherche du possible dans l’impossible, souffrance perpétuelle qui parfois diffuse d’étranges mélopées !

Selon les psychologues, il n’y a là ni incohérence, ni manque de raison, mais différence entre la logique abstraite masculine et la logique concrète féminine. L’une repose sur la loi théorique des idées, la seconde sur l’imprévu pratique de l’existence. Ce déséquilibre apparent est permis par la Providence pour rétablir sur un autre plan la stabilité familiale compromise par les événements anormaux dont la vie de chacun de nos foyers est épinglée.

 

La sensibilité : 

L’élan originel de la femme la porte spontanément vers autrui, vers l’homme « pour lequel, dit saint Paul, elle a été créée ». C’est sa tendance, son but.

« Par ce don vital, supérieur à tout don, la femme sait qu’elle vaut surtout par le cœur. Mais, en raison de sa constitution délicate, vibrante, les risques de sa sensibilité sont extrêmes, et c’est parce qu’elle éprouve, pour un rien, ce frémissement intense qui irradie le flux nerveux jusqu’aux ultimes ramifications de son organisme, qu’elle croit « trop » en son cœur1. »

La grande illusion des jeunes filles et des femmes est de tenir pour raisonnable cette passion de sentir à fond, cette erreur qui les livre cœur et âme à la faculté « d’éprouver », de faire du sentiment à tout propos, de confondre l’épanouissement du cœur avec ce culte exagéré de la sensibilité : sensualisme des émotions qui détourne peu à peu du véritable amour ! La maîtrise de ce sentiment est difficile, mais nécessaire, bien avant la puberté (surveillance des lectures, musiques, amitiés, travail de la volonté, etc). L’aiguillage de ce sentimentalisme requiert une force en dehors de sa nature (la raison), et comme base d’élan un idéal supérieur à celle-ci (la foi) : deux ailes capables de stabiliser en plein vol l’amour féminin. Ce déséquilibre apparent justifie son besoin de dévouement, de protection, de direction. Se dévouer, c’est-à-dire entourer l’élu, qu’il soit le mari ou l’enfant, de toutes les délicatesses de l’amour, de tout l’appui d’une tendresse indéfectible.

 

L’amour propre :

Chez l’homme, l’amour propre est souvent basé sur l’intérêt, il s’appelle ambition et vise le profit (puissance ou fortune). La femme dédaigne, en général, les privilèges qui ne visent que la domination, les honneurs, l’autorité ; elle désire être première dans l’estime des autres pour augmenter leur affection à son endroit. C’est la logique de sa dépendance passionnelle pour autrui : le jugement des autres prévaut sur la réalité. Cela se remarque dès l’enfance des petites filles, très facilement portées à « être sages » quand il s’agit de mériter un éloge. Ce travers, s’il n’est pas combattu par l’éducation et la grâce divine, est un frein moral puissant et source de graves défauts : se vanter à tout propos, se mettre en lumière, dénigrer le prochain, avoir recours au mensonge…

Le remède à cet amour propre est d’abord dans la formation familiale sérieuse des filles, qui les habitue à raisonner, et surtout dans l’éducation chrétienne qui leur fait rechercher la cause de leurs fautes. Il appartient aux hommes de ne pas se laisser prendre par la critique ou la médisance féminine. Leur silence éloquent arrêtera comme par magie les critiques. Qu’ils en usent sans crainte, et n’exploitent jamais la vanité des jeunes filles ou femmes avec lesquelles ils se trouvent.

 

L’expansion :

Dans un jardin public où sont groupés des bébés qui essayent leurs premiers pas ou premiers mots, il est facile de distinguer les fillettes des garçons, aux avances, aux gazouillis, aux caresses prodiguées par celles-là à ceux-ci, lesquels en demeurent comme étonnés et gênés ! Toute jeune, la petite fille manifeste ce besoin d’extériorisation. Quand les unes et les autres ont grandi, les petites sœurs racontent beaucoup plus volontiers que leurs frères les menus incidents. S’il s’agit d’écrire en famille, entre amies, les fillettes le font spontanément avec satisfaction, tandis que les garçons considèrent l’exercice comme un supplice. Ils n’ont rien à dire parce que chez eux le besoin d’expansion n’existe pas. Le raisonnement, aptitude originelle développée dans le cerveau masculin, apporte avec lui une certitude qui n’exige pas de contrôle ; l’intuition, l’émotion, instinctives à la femme, demeurent essentiellement vagues, il leur faut la communion intellectuelle avec d’autres êtres vivants. C’est l’abus de ce besoin qui est cause du bavardage excessif des jeunes filles et des femmes. Les écolières parlent entre elles en reproduisant, en se racontant les unes aux autres, les manières d’agir de leurs mères ou de leurs professeurs. Alors que les garçons jouent rarement aux jeux d’imitation, et ne convoitent des camarades que pour dépenser leurs forces musculaires ou partager des récréations mouvementées.

Le jeune homme, comme la jeune fille doivent se souvenir qu’ils sont des êtres complémentaires, convaincus que si le fond entre les deux sexes est commun, il y a entre eux, du fait de leurs caractéristiques et de leurs fonctions physiques, des différences morales considérables. Il a des déficiences qu’elle doit compenser, comme elle a des faiblesses qui appellent le soutien de l’homme. Il leur faut se connaître tels qu’ils sont, non pas pour se mépriser, se comparer, mais pour se comprendre, et en se comprenant s’attacher l’un à l’autre, être une aide réciproque et vraiment aimer.        

 

Sophie de Lédinghen

 

1 Marie-Madeleine Defrance, Psychologie des filles pour l’instruction des garçons.

 

 

Ecologie chrétienne en famille

« Dieu les bénit (l’homme et la femme) et leur dit : Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la ; dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, et tous les animaux qui rampent sur la terre. Je vous donne toutes les herbes portant semence, qui sont sur toute la surface de la terre, et tous les arbres qui ont des fruits portant semence : ce sera votre nourriture. » Gen.1.28

 L’univers n’est donc pas un chaos informe mais un cosmos créé et ordonné par Dieu. L’homme doit le respecter comme tel et comme héritage commun, ce qui implique une responsabilité vis-à-vis des générations futures. Cette idée de préservation de la Création est un devoir auquel tout chrétien qui se respecte est naturellement attaché, la créature étant redevable et respectueuse de tout ce que son Créateur a mis à sa disposition pour survivre convenablement. Loin de cette notion chrétienne, la gauche « écolo-bien-pensante » s’est emparée de cette idée et en fait actuellement son étendard pour des raisons beaucoup plus terre à terre, en tout cas, païennes et anti catholiques. Aux chrétiens d’aujourd’hui de redonner à l’homme sa vraie place dans la Création, respectant les lois biologiques, mais aussi morales voulues par Dieu pour le bien commun de tous.

En pratique :

Nous sommes d’accord, nos actes dans ce domaine ne sont souvent que des gouttes d’eau dans l’océan ! En réalité, il s’agit de vivre simplement en faisant preuve de bon sens, et de pratiquer les vertus autant que nous le pouvons. On sait, par exemple, que la pilule contraceptive, moralement condamnable, est une catastrophe écologique pour les écosystèmes.

Concrètement, comment agir quotidiennement en famille tout en respectant la Création ?

User sans abuser :

Ne pas surconsommer, éviter le gaspillage, c’est faire preuve d’esprit de pauvreté, de sacrifice parfois lorsqu’on renonce à des achats superflus tant sur le plan vestimentaire qu’alimentaire… Vivre plus simplement, sans recherche immodérée de confort et de satisfaction matérielle.

« Le gaspillage ! Pères et mères de familles, faites que vos enfants comprennent mieux quelles choses sacrées sont le pain et la terre qui nous le donne. Votre époque l’avait trop oublié ! D’une honnête simplicité de la vie, elle avait insensiblement glissé à la recherche et à la satisfaction des joies malsaines et de besoins factices. » (Pie XII, le 15 nov. 1946)

Que penserait ce saint pape en nous voyant vivre aujourd’hui ? Voyons ensemble quels points nous pourrions rectifier ou améliorer dans notre vie de chaque jour :

 Les « 4 R » : réduire, réutiliser, réparer, recycler 

  • Réduire: acheter selon ses besoins réels, modérer les consommations énergétiques (chauffage, eau, lumière, programme des machines, prendre une douche plutôt qu’un bain, bien fermer les robinets, etc), limiter la garde-robe en ne remplaçant que ce qui est usé, selon la loi du « une chose entre/ une autre sort » dans le placard.
  • Réutiliser: récupérer les feuilles des cahiers inachevés comme papier de  brouillon, accommoder les restes du réfrigérateur, passer les vêtements d’un enfant à l’autre selon leur croissance.
  • Réparer: les jouets ou objets encore utilisables, raccommoder le linge abîmé (trous, accrocs, ourlets, boutons), raccourcir les manches percées aux coudes et transformer en bermudas les pantalons et bas de pyjamas usés aux genoux…
  • Recycler: les vieilles lunettes1 et les bandages neufs peuvent être envoyés à la Mission Rosa Mystica2 au profit des Philippines. On peut rapporter les médicaments non consommés dans n’importe quelle pharmacie. Trier les jouets et vêtements et les donner ou vendre s’ils sont encore utilisables. Récupérer par exemple les dos de chemises (usées habituellement aux cols et poignets seulement !) qui sont souvent de jolis tissus réutilisables pour la confection d’habits de poupées, de bavoirs, de biais à coudre pour border agréablement un ouvrage comme un porte-serviette, ou tout objet selon l’imagination et la créativité des couturières… !

On trouvera encore une multitude de petits réflexes à adopter, comme ne pas jeter les mégots de cigarette dans la nature sachant qu’ils polluent une grande quantité d’eau ; débrancher les appareils électriques plutôt que de les laisser en veille ; ne pas recharger les téléphones la nuit (ce qui se fait à peu près en deux heures. Les laisser sur le secteur consomme du courant et abîme la batterie).

Une consommation respectueuse de l’environnement est bénéfique pour l’économie familiale, bonne pour la santé et le bien commun de tous.

Contempler la Création :

N’oublions pas que l’on respecte davantage ce que l’on admire et aime ! Il est très facile de sensibiliser nos enfants à la grandeur et la bonté du Bon Dieu pour nous à travers sa Création. Contempler les merveilles de la nature, les hautes montagnes et l’immensité de la mer, comme les toutes petites bêtes qui courent sur le sol ! L’utilité des abeilles, des araignées, des vers de terre les passionnera, et ils les laisseront vivants pour ne pas entraver le petit travail qui leur est demandé par le Créateur dans nos jardins !

 

Cultiver son potager est aussi une bonne occasion d’observer comme tout a été admirablement prévu et organisé : les saisons, le travail de la terre pour préparer la plantation, la germination des graines qui deviendront de belles pousses vigoureuses, avant de donner les fruits et les légumes qui feront la joie de toute la famille ! Il y a aussi les maladies, les limaces qui dévorent les salades et les oiseaux voleurs de fruits… Il faut se donner du mal dans un potager, et souvent se battre pour soigner et protéger. Parfois l’on y arrive et l’on rend grâce à Dieu. Parfois la peine engagée est perdue, et l’on en tire des leçons pour l’année suivante.

Lorsque les récoltes sont abondantes, ne les laissons pas perdre ! Si le Bon Dieu nous les offre si gracieusement, ne nous contentons pas de notre simple consommation mais vendons ou distribuons le surplus à des personnes qui seront sûrement ravies d’en profiter. Au besoin, invitons-les à cueillir elles-mêmes les fruits et légumes pour nous épargner cette peine.

 

Il y aurait encore une quantité d’exemples simples à donner dans ce domaine, il suffit au chrétien de vivre de façon respectueuse et équilibrée face à la nature. Si nous sommes vertueux (esprit de pauvreté, de sacrifice, respect des mœurs chrétiennes, amour de Dieu à travers ses œuvres), alors nous respecterons la Création.

Que les chrétiens, déjà sensibilisés à la défense de la vie humaine, étendent leur souci à la protection de la nature, non comme des incroyants mais par un engagement découlant de leur foi en Dieu, Créateur et Souverain Maître de toutes choses.

 

Sophie de Lédinghen

 

1 Faire noter la correction par l’ophtalmologiste avant l’envoi pour faciliter le travail de l’opticien en Mission.

2 Dr et Mme de Geoffroy 1524 route départementale 29, 64120 Aïcirits