L’air des clochettes

Notre citation pour septembre et octobre : « La cigale ayant chanté tout l’été, se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue… »  Jean de la Fontaine, La Cigale et la Fourmi.

 « L’air des clochettes (aria) »

Acte II – Lakmé (1883) – Léo Delibes (1836-1891)

« L’air des clochettes », morceau de bravoure des soprano coloratur  (soprano dont la voix est la plus aigüe, la plus pure et la plus agile) est l’air le plus célèbre de l’opéra  « Lakmé ». L’héroïne, Lakmé, fille de prêtre brahmane fanatique, chante dans un bazar indien. « La légende de la fille du paria » raconte le  sauvetage d’un étranger par une enfant paria qui fait sonner des clochettes pour détourner les bêtes sauvages du promeneur.

Où va la jeune Indoue,
Fille des Parias,
Quand la lune se joue
Dans les grands mimosas ?
Quand la lune se joue
Dans les grands mimosas ?

Elle court sur la mousse
Et ne se souvient pas
Que partout on repousse
L’enfant des parias.
Elle court sur la mousse,
L’enfant des parias ;
Le long des lauriers roses,
Rêvant de douces choses,
Ah !

Elle passe sans bruit
Et riant à la nuit, à la nuit !


Là-bas dans la forêt plus sombre,
Quel est ce voyageur perdu ?
Autour de lui des yeux brillent dans l’ombre,
Il marche encore au hasard éperdu !
Les fauves rugissent de joie,
Ils vont se jeter sur leur proie
La jeune fille accourt et brave leurs fureurs,
Elle a dans sa main la baguette
Où tinte la clochette, Où tinte la clochette
Des charmeurs.
Ah ! Ah ! Ah !

L’étranger la regarde,
Elle reste éblouie,
Il est plus beau que les Rajahs !
Il rougira s’il sait qu’il doit la vie
A la fille des parias.
Mais lui, l’endormant dans un rêve,
Jusque dans le ciel, il l’enlève,
En lui disant : ta place est là !
C’était Vishnou, fils de Brahma !


Depuis ce jour, au fond des bois,
Le voyageur entend parfois
Le bruit léger de la baguette
Où tinte la clochette,
Où tinte la clochette
Des charmeurs.
Ah ! Ah ! Ah !

Interprétation : Nathalie Dessay

 

 

 

Consécration du Centre d’Etudes critiques et de synthèse

Prières pour le Centre d’études critiques et de synthèse

 

Ces prières ont été écrites par Jean Ousset et Jean Masson, à l’occasion de la consécration de leur œuvre au Sacré-Cœur de Jésus et à la Sainte Vierge Marie, le 29 juillet 1946, à saint Michel, sainte Jeanne d’Arc, sainte Thérèse et saint Louis, le 27 mars 1947.

 

Consécration au Sacré-Cœur de Jésus du Centre d’études critiques et de synthèse

 

Cœur Sacré de Jésus, notre Sauveur, seul Maître du monde. Roi des nations. Seigneur des individus, en notre nom et en celui de tous les membres présents et à venir du Centre d’études critiques et de synthèse, déclarons nous consacrer entièrement à votre gloire et à votre service.

Fils respectueux de l’Église catholique, nous savons que c’est à Elle que vous avez confié le soin de nous diriger ici-bas.

Le monde est fou, Seigneur, et se perd chaque jour davantage parce qu’il s’est détourné de vous.

Corruption des mœurs, anarchie sociale, l’esprit des ténèbres a tout envahi et d’abord les intelligences, enlevant ainsi à ses victimes jusqu’à la connaissance de leur mal.

Rappeler les principes, dissiper les nuées, combattre des systèmes qui, parce qu’ils ruinent l’ordre humain, ruinent par là même la Foi, telle est la tâche que nous avons entreprise, espérant contribuer ainsi à ramener la France à votre royauté.

Bénissez, ô Jésus, notre travail, éclairez-nous, dirigez-nous, gardez-nous de l’orgueil, débarrassez-nous de toute opinion personnelle, apprenez-nous à défendre la Vérité avec acharnement, sans maladresse, sans manquer à la charité, sans blesser les personnes inutilement.

D’ores et déjà nous vous confions nos soucis et nos peines, vous abandonnant le soin de pourvoir à nos besoins matériels. Accordez-nous les grâces nécessaires, patience dans les épreuves, courage dans les périls, prudence et persévérance dans les difficultés.

Que nous sachions tout rapporter à vous, nos joies et nos souffrances, supportant celles-ci en expiation pour nos péchés et les péchés du monde.

Que la prière soit notre refuge et notre force.

Nous Vous le demandons par Marie, votre Sainte Mère, médiatrice de toutes les grâces.

 

Sacré-Cœur de Montmartre, le 29 juillet 1946.

 

Consécration à la Sainte Vierge Marie du Centre d’études critiques et de synthèse

 

Ô Marie, mère du Christ et notre mère, nous venons de nous confier à Votre Divin Fils et de lui consacrer notre travail.

Nous sommes à Vos pieds pour solliciter Votre intercession.

C’est à Vous déjà que nous devons d’avoir pu accomplir nos premiers pas.

Vous êtes toute-puissante sur le Cœur Sacré de Jésus, nous nous abandonnons entièrement à Vous.

Daignez nous aider à être fidèlement soumis à votre Fils en la personne de Notre Très Saint Père le Pape et de tous les membres de la sainte Église hiérarchique.

Ô vous, qui êtes appelée Vase rempli de l’Esprit Saint, obtenez-nous d’être enflammés de l’amour de Dieu, cette éternelle source des vérités que nous voulons défendre.

Trône de la Sagesse, enseignez-nous la seule doctrine qui soit ; éclairez nos intelligences ; fortifiez nos volontés. Daignez nous donner précisément cette « pénétration pour comprendre, cette mémoire pour retenir, cette méthode et cette facilité pour apprendre, cette grâce abondante pour s’exprimer », que déjà demandait saint Thomas d’Aquin.

Vierge prudente, apprenez-nous la véritable science de l’action. Vous qui, beaucoup mieux que nous-mêmes, savez ce qu’il nous faut et ce que nous devons faire, guidez-nous, inspirez tous nos actes, apprenez-nous à deviner autant qu’à satisfaire Vos moindres désirs.

Vierge Puissante, prêtez-nous Votre Force ; donnez-nous le courage des strictes et nécessaires affirmations.

Reine des Apôtres, apprenez-nous à connaître, convaincre, toucher les cœurs, gagner nos frères à l’amour et au service du Vrai.

Ô vous, enfin, qui, de la façon la plus officielle, êtes Reine de France, aidez-nous à ramener notre patrie à l’obéissance de Votre Divin Fils.

Que saint Joseph, votre chaste époux, patron de l’Église universelle, soit notre guide et notre bouclier contre les forces et les agents de la révolution antichrétienne, lui que choisit Sa Sainteté Pie XI pour défendre le monde contre les mensonges et les sectes qui menacent l’ordre social.

 

Chapelle de la Médaille Miraculeuse, le 29 juillet 1946.

 

Saint Michel Archange,

Sainte Jeanne d’Arc,

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus,

Saint Louis,

ayant déjà consacré le Centre d’études critiques et de synthèse au Sacré-Cœur et à la Sainte Vierge, nous croyons quand même devoir solliciter votre secours.

Vous êtes les Patrons de la France. Le moindre effort qui tende à la sauver ne peut vous être indifférent. Veuillez donc abaisser vos regards jusqu’au nôtre.

Réduits à nous-mêmes nous connaissons notre impuissance.

Mais nous avons Foi dans la Force de Dieu.

C’est cette force que nous vous prions de nous obtenir.

Daignez vous-mêmes nous aider, nous guider, nous instruire, nous défendre.

Ô vous saint Michel qui, le premier, au nom du Ciel êtes allé « raconter » à Jeanne quelle « pitié était au Royaume de France », Vous qu’elle reconnut, répondit-elle à ses juges, « au bon conseil, au réconfort, et à la bonne doctrine », Vous le vainqueur de Satan et de ses esprits mauvais, considérez, nous Vous en prions, quelles ruines ces mêmes esprits accumulent par le monde, quels ravages ils exercent dans les intelligences. Vous qui êtes « fort dans le combat », Vous « l’exterminateur irréductible du désordre », aidez- nous à lutter contre les mensonges de l’anarchie. Que nos pauvres actions ne puissent aussi bien tromper personne, mais que chacun reconnaisse dans nos succès la vertu de Votre lumière et de Votre épée.

Ô vous sainte Jeanne d’Arc, daignez considérer qu’il est encore un envahisseur à bouter hors de France, et c’est l’esprit naturaliste. Vous qui fûtes guerrière et politique en même temps qu’auréolée du Ciel, enseignez-nous à résoudre les problèmes de la Cité à la lumière de la Grâce, ne séparant jamais le naturel du surnaturel. Aidez-nous à refaire de notre patrie le Royaume du Roi JESUS.

O vous petite et combien grande sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, « nouvelle et puissante patronne de la France », Vous qui, sans avoir quitté le cloître, avez cependant mérité d’être patronne des missions, faites-nous comprendre combien nos actes sont stériles quand ils ne sont pas transfigurés par la prière. Apprenez-nous, ô Vous dont la vie fut vouée à la contemplation, apprenez-nous la vanité de l’agitation moderne. Pour l’efficacité même de notre œuvre, gardez-nous des mirages d’une action que ne féconderait pas la Grâce de Dieu.

O vous enfin, saint Louis, roi chevalier, roi justicier, roi croisé, roi de France, modèle des hommes autant que modèle des rois ; Vous qui vous « efforciez d’ôter de votre royaume tous les vilains péchés », enseignez-nous la véritable doctrine de gouvernement. Ayez pitié de nous qui sommes les fils de vos sujets et membres de votre royaume. Priez pour nous. Protégez-nous.

 

Paris, le 27 mars 1947.

A l’école de la Contre-Révolution avec la Cité Catholique

           Si le premier pas à faire pour devenir contre-révolutionnaire est de retrouver le sens du réel et la philosophie qui soutient ce bon sens, telle qu’elle nous a été enseignée par Aristote et saint Thomas d’Aquin, la question de l’engagement politique est souvent rapidement posée par la jeunesse catholique en quête d’action et d’idéal. Comment interrompre le cycle historique de la Révolution ? Que faire en politique et comment reprendre le pouvoir ? Quelle politique mener une fois au pouvoir ? C’est à ces questions que s’est attaché à répondre au siècle dernier un petit groupe de catholiques animés par le désir de faire l’unité de tous les français qui ont l’amour de la patrie chevillé au corps et qui veulent restaurer la France éternelle. L’un d’entre eux, Jean Ousset (1914-1994), avait fait le constat dès les années 30 que les moyens employés par les militants du milieu national (royalistes, catholiques, antirépublicains, etc.) n’étaient pas les bons. À cette époque, ces militants se regroupaient au sein de ligues (Action française, Croix de Feu, Jeunesses Patriotes, …) et  certains se précipitaient parfois sans trop réfléchir dans la rue pour manifester ou se battre à mains nues chaque fois que l’adversaire au pouvoir attaquait la patrie et blessait l’honneur de la France. Convaincu que ces méthodes pour combattre la Révolution manquaient d’efficacité parce qu’elles n’étaient pas soutenues par une véritable doctrine d’action, Ousset, âgé de 25 ans seulement et étudiant en droit à Bordeaux après ses 3 années de service militaire, exposa directement à Charles Maurras ce problème du manque de doctrine et de formation des cadres de l’Action française. La réponse que lui fit le Maître de Martigues sera capitale pour la vocation du jeune homme : « Je n’ai pas fait de doctrine, je n’ai pas voulu ni pu en faire. Je n’ai voulu qu’une action… vous comprenez, une action… une action française. Toutefois, si vous cherchez une doctrine, soyez certain qu’il n’y a de doctrine vraie que catholique. Si donc vous êtes catholique, ne le soyez pas à moitié ! ». Fort de cette recommandation, Jean Ousset et ses amis firent le vœu le 15 août 1939 devant la Sainte Vierge de s’engager « à servir la France et l’Église par une œuvre de formation doctrinale et d’éducation à l’action de cadres politiques et sociaux efficaces1 ». Cette œuvre prendra le nom de Cité Catholique en 1949 et fut consacrée au Cœur Sacré de Jésus en la basilique de Montmartre, à Saint Joseph et au Cœur Immaculé de Marie en la chapelle de la Médaille Miraculeuse, rue du Bac à Paris2.

           Ousset ne doit pas seulement à Maurras l’inspiration de fonder une œuvre de formation doctrinale : sa biographie mentionne qu’il reçut une révélation décisive au cours d’une retraite des Exercices Spirituels de Saint Ignace prêchée par les Coopérateurs Paroissiaux du Christ-Roi à Chabeuil3. Cette retraite lui permit de résoudre le dilemme suivant : pour rendre vie à une société, faut-il s’attacher prioritairement aux hommes ou aux institutions ? La fausse théorie personnaliste en politique cherche d’abord à convertir les hommes à la foi catholique avant d’entreprendre l’instauration d’un ordre social chrétien. Tout autre doit être la réponse politique réaliste à ce dilemme : comme le soulignait Pie XII, c’est d’abord de la forme donnée à la société, donc aux institutions, que découle le bien ou le mal des âmes. En effet, les hommes naissent tous au sein d’une famille et d’une société qui les précède, les éduque et les conduit ou non vers le bien commun. Le grand thomiste Louis Lachance donne à cet égard un conseil utile : « Il faut guérir le mal là où il se trouve. Si le régime est mauvais, il faut le réformer, et s’il est irréformable, il faut voir à le remplacer par un meilleur. Si cela est immédiatement impossible, c’est une raison de plus de s’empresser de créer des conditions qui puissent rendre le changement possible4. »

Afin d’opérer cette transformation politique et promouvoir une « renaissance authentiquement française – donc catholique – dans l’ordre temporel5 », Ousset proposa une méthode décomposée en plusieurs temps successifs :

 

  1. « Travailler d’abord à l’intense formation, à la rigoureuse préparation d’un certain nombre d’hommes rayonnants suffisamment répandus dans l’ensemble du corps social. 
  2. C’est ce petit nombre, cette minorité agissante qui se servant des institutions comme d’un levier, peut travailler à l’instauration du système social convenable (compte tenu des circonstances de temps et de lieu). 
  3. Système social qui permet alors cette influence générale, cette action durable sur l’ensemble des hommes que, seule la Société (avec un grand S) est capable d’exercer6. »

  Jean Ousset et ses amis ont donc fondé une institution spéciale pour ce temps de guerre : « la première école pratique de l’art politique chrétien qui ait existé depuis qu’a commencé le cycle historique de la Révolution7 ». Cette école d’application de la doctrine contre-révolutionnaire qu’a été la Cité Catholique8 a ainsi apporté une réponse au 1er temps de la méthode par un cursus complet d’étude politique qui cherche à s’opposer intégralement à la Révolution en s’appuyant principalement sur la doctrine catholique traditionnelle de l’Église et notamment sur l’enseignement des papes et des évêques qui ont défendu la royauté politique et sociale de Notre Seigneur Jésus-Christ et ont combattu les erreurs modernes.

Ousset avait compris que la formation est plus efficace lorsqu’elle a lieu par petits groupes de travail, au sein de « cellules9 ». Il recommanda à cet effet de former celles-ci par « action capillaire », c’est-à-dire en favorisant les contacts personnels suivant le principe de « l’amitié au service du vrai ». Pour donner un corpus consistant à étudier, il édita une revue doctrinale, Verbe, et publia une série d’ouvrages dont le plus connu et le plus fondamental est le premier d’entre eux : Pour qu’Il règne10, préfacé par Monseigneur Marcel Lefebvre et jugé comme étant « l’ouvrage le plus significatif produit en France par l’école catholique contre-révolutionnaire au XXème siècle11 ». Des congrès annuels ont été organisés de 1949 à 1977 en France puis en Suisse, à Lausanne, afin de rassembler une fois l’an tous les participants aux cellules et faire intervenir les meilleurs intellectuels catholiques engagés dans le combat contre-révolutionnaire.

La Cité Catholique aura contribué à former des milliers de cadres dans le domaine politique et social en leur donnant une grande autonomie d’action qui respectait bien la nécessité d’agir en fonction de son état de vie et selon les devoirs relatifs à cet état (des cellules existaient dans tous les métiers et filières, de l’armée aux agriculteurs en passant par les ingénieurs, les fonctionnaires, etc.). Cette école a ainsi été bien plus efficace dans le combat pour le Christ-Roi que bien d’autres initiatives politiques (groupes de pression, manifestations, militantisme politique, etc.). Ce combat a aussi sauvé nombre d’âmes dans la déroute religieuse qui a suivi la Révolution dans l’Église causée par Vatican II. Un ancien participant aux cellules formées par Ousset a pu nous apporter le témoignage suivant : « la Cité Catholique a eu l’immense mérite de vacciner préventivement ses animateurs contre les erreurs sur la liberté religieuse enseignées au concile Vatican II, erreurs qui ruinent tout ordre politique. En fait, Ils L’ont découronné de Mgr Lefebvre n’est en quelque sorte que le tome II de Pour qu’Il règne de Jean Ousset ».

 

Louis Lafargue

 

1 Voir la biographie de Raphaëlle de Neuville, Jean Ousset et la Cité Catholique, éditions Dominique Martin Morin, 1998, page 42.

2 Voir les magnifiques textes de consécration du Centre d’Études Critiques et de Synthèse qui deviendra la Cité Catholique sur le site de Foyers Ardents dans la rubrique « Dossier ».

3 L’œuvre des retraites de Saint Ignace demeurée traditionnelle et restée fidèle à l’esprit du Père Vallet a été transmise par le R.P. Barrielle à la Fraternité Saint Pie X.. Des retraites sont prêchées régulièrement aujourd’hui par l’œuvre des Coopérateurs du Christ-Roi (CCR) fondés par le Père Marziac à Caussade et par la FSSPX.

4 Louis Lachance op, L’humanisme politique de saint Thomas d’Aquin, édition Quentin Moreau, 2015.

5 Supplément au n°70 de Verbe, avril 1955.

6 Jean Ousset, Fondement de la Cité, édition Dominique Martin Morin, 2008, p.139.

7 Formule de Jacques Trémolet de Villers citée par Raphaëlle de Neuville, op. cité.

8 La Cité Catholique est devenue L’Office international des œuvres de formation civique et d’action doctrinale en 1963, institut qui s’est progressivement éloigné de l’idéal fondateur en raison de la crise ouverte par la perte de l’Algérie française au plan national et la crise entrainée par le Concile Vatican II au plan religieux.

9 Une cellule est un noyau informel d’amis dirigé par un animateur.

10 Jean Ousset, Pour qu’Il règne, édition Dominique Martin Morin, 1986 (1ère édition en 1959).

11 Massimo Introvigne, « Jean Ousset et la Cité catholique. Cinquante ans après Pour qu’Il règne », Cristianità, anno XXXVIII, n. 355, gennaio-marzo 2010, pp. 9-61, traduction française de Philippe Baillet.

 

 

 

Scènes de ménage

« Il n’a pas levé le petit doigt pour l’aider ! »

 

           Anne est particulièrement énervée, elle vient de faire un gros marché, et son mari Vincent l’a laissée vider seule le coffre de la voiture pourtant bien plein, sans offrir spontanément son aide ! Seulement, Anne n’a rien demandé à Vincent et c’est bien dommage car cela l’empêche d’avoir recours à une des grandes ressources dont peuvent disposer les femmes : un appel au sentiment chevaleresque qui repose au fond du cœur de la plupart des hommes… C’est toujours un merveilleux cadeau d’avoir un mari attentif aux besoins de son épouse en venant toujours spontanément à son aide. Mais on ne peut pas non plus toujours exiger un mari constamment à l’affut… Vincent est souvent touché dès qu’Anne lui dit combien elle a besoin de lui, et si elle lui avait dit « Chéri, s’il te plaît, peux-tu m’aider à porter ces sacs si lourds ? » bien sûr qu’il l’aurait fait ! Il ne s’agit pas là de feindre la fatigue pour « manipuler » Vincent, mais de faire preuve d’un peu de simplicité. La plupart des hommes, au fond d’eux-mêmes, sont serviables.

Malheureusement, l’attitude hostile de certaines femmes a beaucoup nuit à l’expression de ce noble trait masculin. Bien des hommes ont éprouvé le mordant de la compétition féminine et en ont conclu que, si les femmes doivent prendre les vices masculins (l’agressivité, la brutalité ou la rudesse), une conduite chevaleresque à leur égard perd tout son sens… Alors, mesdames, n’hésitez pas à gentiment faire appel à l’assistance dévouée de vos maris !

« Elle laisse aller sa toilette à la maison »

   Voici Hélène qui, durant ses fiançailles, passait beaucoup de temps devant son miroir afin d’être la plus jolie possible pour son fiancé.

A présent qu’elle est mariée, elle s’habille n’importe comment lorsqu’elle est chez elle, mais fait beaucoup d’efforts pour être attirante quand elle sort.

Saint François de Sales recommande bien aux femmes pieuses d’être convenablement apprêtées, mais cela ne signifie pas qu’elles doivent être esclaves de la mode ou en fassent trop. Il y a une façon de s’habiller qui peut être attrayante, voire élégante, mais en même temps simple et modeste. Et puis, il ne faudrait pas ne soigner son apparence que pour les invités ou les personnes que l’on voit à l’extérieur, et se laisser aller lorsqu’on est seule avec son mari !

Dès qu’on est marié, chacun devrait s’efforcer de se montrer toujours sous le meilleur jour, tant physiquement que spirituellement. Je connais une maman qui prend le temps de se recoiffer chaque soir avant le retour de son mari… Même les maris qui, avec le temps, finissent aussi par se laisser souvent un peu aller dans leur tenue ou leur comportement. Cette délicatesse que l’on se doit l’un à l’autre doit durer toute la vie !

« Ça le rend furieux quand je dis « toujours » … »

   Tout allait bien, quand soudain Laurence a tout bouleversé avec ce mot qui paraît bien anodin, mais qui, en réalité, est explosif : « toujours ». On peut l’utiliser à propos de choses sans importance, « Tu laisses toujours traîner tes clés ! » ou l’employer à l’occasion de reproches plus graves, « Tu veux toujours qu’on aille chez tes parents plutôt que chez les miens ! ».

Et, comme son jumeau « jamais », « toujours » cause toujours des problèmes ! Pourquoi Laurence dit-elle « toujours » alors qu’en réalité elle veut dire souvent ou parfois ? Elle ne reconnaît donc pas que Michel fait souvent ce qu’il faut sans qu’elle s’en aperçoive, ou qu’il a du moins courageusement essayé de se corriger, mais sans y parvenir complètement.

Comme nous sommes prompts à reconnaître les défaites, mais non les victoires ! En insistant ainsi sur les échecs, Laurence décourage Michel, surtout s’il s’agit de choses sérieuses. Proclamer haut et fort que Michel retombe toujours dans une faiblesse, alors qu’en réalité il fait peut-être tout son possible pour l’éviter, peut l’amener à une terrible conclusion : « Que j’essaye ou non de m’améliorer, ça ne fait aucune différence pour Laurence. J’abandonne ! »

Il est bien plus affectueux d’éviter de manifester sa contrariété, ou au moins, de remercier Michel des réels progrès qu’il a accomplis : « Tu as si gentiment veillé à ranger tes clés ces derniers temps, que je suis surprise, ce matin, de les retrouver dans le salon ! ».

Cette remarque empreinte de reconnaissance, enlève la note glaciale d’un jugement.

L’affection doit sans cesse guider nos paroles et nos comportements en ménage, afin que nos différences ne deviennent pas des obstacles mais au contraire, qu’elles nous aident sur la voie de la perfection.

             Sophie de Lédinghen

 

 

 

Les pieds sur la terre, les yeux dans le ciel

           Qui n’est jamais resté à contempler un arbre immense, au tronc fort et puissant, les racines enfoncées dans le sol, affleurant sous l’humus, et les branches hautes, déployant un riche manteau de feuilles abreuvées de lumière ? Qui n’a jamais contemplé ces arbres immenses sous le vent, chahutés par les bourrasques qui parfois arrachent les feuilles, font ployer les branches, mais l’arbre tient ! Il tient car il a ses racines enchevêtrées dans la terre. Pourquoi l’arbre monte-t-il ? Parce que la lumière le nourrit. Le sol lui donne l’eau et les minéraux. Mais c’est la lumière qui le nourrit. C’est elle qui lui permet de fabriquer sa substance. L’arbre, le seul être qui se nourrit de lumière… Si d’autres arbres plus grands l’empêchent d’accéder à la lumière, l’arbre meurt. Il meurt de faim. Toute sa force, ses racines, son bois dur, sa résistance au vent, tout cela concourt à une fin : boire la lumière.

  Qui n’a jamais laissé ses yeux courir le long d’un pilier de cathédrale, depuis sa base jusqu’au chapiteau, et au-delà, les nervures de pierre qui courent le long de la voûte et s’embrassent à son sommet ? Quelle force émane de ces pierres, empilées les unes sur les autres, droit vers le ciel ! Pour lancer la clef de voûte dans les hauteurs, pour la faire voler au-dessus de la nef, pour la faire naviguer sur le ciel, il faut un pilier fort, un pilier puissant. Il a les pieds dans la terre, ses fondations ancrées dans le roc, pour s’élever vers le ciel et porter des murs fins, ouverts par de large baies qui boivent la lumière. Cathédrale de lumière, portée par des piliers qui permettent aux vitraux d’inonder la maison de Dieu de sa clarté, comme le tronc permet aux feuilles de boire la lumière.

  Il y a dans ces deux images une image de la force ! Le pilier de cathédrale, comme le tronc de l’arbre, est fort et puissant. A les regarder, ils portent la terre elle-même. Ils s’ancrent dans le sol, dans notre monde terrestre pour s’élever vers le ciel. Ils font de la terre leur support, leurs racines, mais c’est la lumière qui les nourrit, c’est la lumière qu’ils cherchent, c’est après elle qu’ils soupirent. Et pour la rejoindre, ils se plient aux lois éternelles : le pilier est droit, le tronc est droit, sans cela, ils chuteraient. Le pilier est plein, faits de pierres taillées et jointes entre elle, sans cela il s’effrite sous le poids de la voûte et ne traverse pas les siècles. Les lois des poids et des masses, les lois des matériaux, les lois de l’eau et de la vie, les lois éternelles, voulues par Dieu, sont le chemin, la route, la direction au bout de laquelle brille la lumière.

La force est humble. Elle part de la terre, de l’humus, de là où nous sommes, de là où Dieu nous a placé. Elle est enracinée. Point de rêves, point de mythes, une simple réalité pure et belle. La force ne peut s’acquérir en dehors du plan du Dieu. La force est tournée vers Dieu. La force trouve sa source en Dieu.

La force est patiente. La force s’acquiert peu à peu, avec persévérance : pierre après pierre, le pilier monte. Année après année, le tronc s’épaissit, ajoutant une ligne de vie aux cernes accumulées. Effort après effort, petit renoncement après petit sacrifice, nous montons vers la lumière.

La force est obéissante. Elle suit les lois éternelles, elle suit le plan de Dieu. Si elle veut s’astreindre des lois, elle faillira. La force n’est pas vanité, n’est pas indépendance. Elle s’inscrit dans un tout : le père de famille, la mère, l’enfant, le prêtre, comme l’arbre dans la forêt ou le pilier dans la cathédrale, à sa place, construisent un tout à la gloire de Dieu.

Soyons des piliers de pierre, soyons des troncs d’arbres immenses, pour trouver la lumière et honorer Dieu.

          Louis d’Henriques

 

Actualités culturelles

 ¨ Honfleur (14)

A partir du 5 septembre et jusqu’au 23 novembre 2020, le musée Eugène Boudin met en avant « Les couleurs de la mer. Charles-François et Karl Daubigny en Normandie ». Précurseur du mouvement impressionniste, Charles Daubigny est l’un des premiers artistes à adopter la peinture en plein air : on lui doit de magnifiques paysages côtiers de Normandie, aux couleurs exceptionnelles. Son fils Karl, dont le talent ne démérite pas, prendra la suite de son père.

¨ Langres (52)

Grâce à l’exposition « Mille et un Orients. Les grands voyages de Girault de Prangey (1804-1892) », le musée d’Art et d’Histoire de Langres fait renaître la figure de Girault de Prangey, voyageur infatigable qui rapporta de ses expéditions des œuvres uniques : peintures, aquarelles, dessins et daguerréotypes vous plongeront dans l’atmosphère chaleureuse de l’occident méditerranéen et de l’Orient.

¨ Paris (75 014)

Le musée de la Libération présente jusqu’au 13 décembre 2020 son exposition intitulée « 1940. Les parisiens dans l’exode ». La réunion de nombreuses photographies ainsi que de quelques vidéos saisissantes permet de revenir sur cet épisode tragique de mai et juin 1940 : face à l’avancée soudaine des armées allemandes, les parisiens – et bien d’autres – se voient forcés d’abandonner leurs habitations et de fuir la capitale. Un témoignage bouleversant !

¨ Le Havre (76)

Jusqu’au 1e novembre 2020, profitez de l’exposition « Nuits électriques » organisée par le Musée d’Art Moderne du Havre. Rassemblant les œuvres de 70 peintres, l’exposition souligne le bouleversement provoqué par l’apparition de l’éclairage artificiel des villes : cette nouvelle illumination donne à voir des clartés jusque-là inconnues, véritable fascination pour les artistes.

¨ Saint Germain-en-Laye (78)

Jusqu’au 3 janvier prochain, partez à la découverte des expéditions archéologiques de Napoléon III avec l’exposition « D’Alésia à Rome. L’aventure archéologique de Napoléon III » au Musée d’archéologie nationale. Fasciné, comme beaucoup de ses contemporains, par la redécouverte de civilisations oubliées, Napoléon est le premier – et le dernier ! – chef d’Etat à faire de l’archéologie une préoccupation nationale. Il vous emmènera à ses côtés sur les traces de Jules César.

 

La maçonnerie

Commençons à approfondir la restauration d’une maison ancienne par la compréhension de la structure du bâti (ou maçonnerie) selon les matériaux propres à sa région et les techniques de construction qui en dépendent.

Pour des raisons de pratique et d’économie, la maison est bâtie avec les matériaux fournis sur place, selon un savoir empirique et l’observation du climat transmis de mémoire d’homme. C’est ainsi que personne ne se hasarde à construire aux abords d’une rivière pouvant  se transformer en un torrent furieux, en bord de mer du fait des tempêtes, ou dans un couloir d’avalanche.

  Une construction simple est composée de quatre murs extérieurs : la façade principale avec l’entrée, la façade postérieure, et deux murs latéraux appelés murs pignons. Dans les régions venteuses, ils sont orientés vers les vents dominants et le plus souvent aveugles (sans ouverture).

  A l’intérieur, nous trouvons des murs de refend, ou murs porteurs afin de consolider les planchers des étages quand la portance est trop grande.

  Dans les régions pauvres, les murs sont montés en terre comprimée, le pisé. Parfois s’ajoute de la paille hachée, il s’agit alors de la bauge. Le torchis est composé d’argile, d’eau, de paille et parfois de poils d’animaux. La chaux peut le compléter.

  Le soubassement est fait en pierres trouvées sur place, souvent trop peu nombreuses pour tout un mur mais suffisantes pour ce socle, sur lequel ensuite des pieux sont fichés comme armature. Puis le pisé, bauge ou torchis remplit les vides.

La solidité en est certaine. De beaux exemples se voient en Normandie dans le pays d’Auge, en Sologne, ou dans le Lyonnais.

  Dans la région du Nord, les constructions sont en briques cuites dans de petits fours campagnards chauffés au bois et ont le charme d’un matériau aux dimensions non standardisées.

  Enfin dans les régions plus riches où la pierre est présente, la construction est faite avec la veine de pierre locale.

  Pierre calcaire en Bourgogne, Poitou, granit en Auvergne, Bretagne et sur le V granitique qui va de l’une à l’autre de ses régions. Pierre de tuffeau tendre mais gélive (sensible au gel) en Touraine et une partie des pays de Loire. Pierre blonde de Caen, schiste dans la région de Bayeux et le nord Cotentin, en Bretagne aussi, résistant à l’humidité et d’une solidité à toute épreuve. Pierre de meulière en région parisienne, etc…

Pierre de taille quand elle est plus fine, elle est employée dans les constructions plus importantes ou plus riches comme les belles demeures de ville ou châteaux d’importance, les manoirs étant, quant à eux construits avec les matériaux locaux.

Il est possible aussi de trouver dans les maisons rurales des murs dits de blocage, constitués de deux parements qui enserrent une fourrure de terre, pierres et cailloux.

Les fondations n’existent pas, contrairement à la fondation en béton actuelle. Les murs s’élèvent sur un fond bien stable (le fond de fouille) plus ou moins profond, parfois plus large à la base, afin d’assurer aux murs une grande stabilité pour résister aux poussées horizontales des planchers ou de la charpente. Ils présentent alors ce que l’on appelle un talus ou un fruit.

Enfin un enduit ou rejointement vient finir le travail de maçonnerie.

Le rejointement vient compléter les joints entre les pierres. Il est fait au mortier de chaux jusqu’au droit des pierres entourant les ouvertures, et n’est pas creusé autour de chaque pierre, ni encore moins en ciment, comme c’est le cas actuellement.

L’enduit, quant à lui vient tout recouvrir. Les joints sont grattés pour faciliter l’accroche du gobetis (ou dégrossi) projeté à la truelle, sur lequel ensuite, se pose l’enduit. Il vient à fleur des pierres entourant les ouvertures.

Ce sont donc ces pierres d’entourage qui indiquent si la façade doit être rejointoyée ou enduite, car dans ce cas elles sont saillantes pour tenir compte de l’épaisseur de l’enduit.

  Celui-ci est composé de chaux aérienne éteinte pour le bâtiment (CAEB), mélangée avec du sable de carrière du pays, non lavé, légèrement coloré et argileux et de l’eau.

  La maçonnerie, appelée aussi gros-œuvre est le premier des corps d’état sur un chantier, déterminant tous les autres, et le plus important financièrement.

  Nous verrons la prochaine fois, comment remédier à certains désordres et nous étudierons les principes de restauration.

                            Jeanne de Thuringe

 

FOYERS ARDENTS

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–  le Rosaire des Mamans (méditations du Rosaire parues dans notre revue)

 Il est paru au prix de 6€ + frais de port (gratuits pour 10 exemplaires). N’hésitez pas à en profiter rapidement !

Contactez-nous par courrier : Foyers ardents, 2 rue du Maréchal de Lattre de Tassigny 78000 Versailles ou sur contact@foyers-ardents.org

 

La force dans l’éducation

           Au-delà de la vertu de force qui affermit l’âme dans son désir d’un bien pourtant difficile à atteindre, le don de force nous donne l’assurance d’accéder à ce bien. Voilà qui est fort encourageant pour des parents chrétiens : parmi les dons reçus de l’Esprit Saint le jour de notre Confirmation, se trouve celui de la force ! Nous qui avons tant besoin d’assistance et de soutien providentiels pour la bonne marche de notre famille, nous avons reçu ces secours et oublions bien souvent d’y avoir recours. Car il nous faut les demander encore et toujours à Dieu pour garder en nos âmes ce petit germe de courage et de persévérance qui nous attire immanquablement et sans aucune crainte vers Lui. Voyons comment cette force peut revêtir divers aspects pour nous aider, selon les circonstances et les moments de notre vie, dans notre devoir d’éducateur.

La force héroïque :

  Celle des renonciations, des grands choix pour la sainteté de notre famille, comme par exemple celui d’une famille nombreuse si cela est possible. Ne nous sommes-nous pas mariés pour « peupler le ciel d’élus » ? Voilà bien un premier héroïsme de générosité, surtout aujourd’hui ou l’on vous regarde avec de grands yeux dès vous avez plus de deux enfants !

Cela entraîne bien sûr quelques difficultés : de logement d’abord. Qui dit famille nombreuse, dit grand logement…et de préférence une maison…avec un jardin. Pour l’équilibre de la famille, ne vaudrait-il pas mieux s’installer en province où les loyers sont plus abordables, et la vie plus sereine ? Il est possible que la carrière professionnelle du père de famille en pâtisse un peu… Admirables sont les parents capables de quitter leur région, d’accepter un revenu moins élevé pour le bien-être de leurs enfants !

Se pose ensuite la question du choix des écoles, car nous les voulons catholiques et d’un enseignement solide…serons-nous prêts à faire des kilomètres en voiture, hiver comme été, avec toute la petite troupe, nourrisson compris ?! Le don de force rassure nos âmes, cela pourra se faire ! Et plus tard, mettrons-nous nos enfants en pension ? Si cela est le meilleur choix pour eux, nous les y mettrons ! Admirables, vous dis-je.

La force tenace :

  Elle repose sur différents principes de l’éducation que nous voulons donner, comme ne pas céder aux caprices, mettre notre menace à exécution, ne pas faire « oui » quand on a dit « non » ! Et puis toutes ces petites exigences quotidiennes qui demandent de la persévérance : apprendre à nos enfants à finir ce que l’on a commencé, à ranger ce que l’on a sorti, la régularité, l’exactitude mais aussi leur montrer comment se priver de ce qu’on aime, rendre service, obéir…ces choses que l’on apprend tout petit et pour toute la vie ! Combien de fois faut-il répéter chaque jour, reprendre, corriger, se fâcher alors que souvent l’on est fatigué ?!

La force ferme et affectueuse :

  La mère surtout a des instinct de « couvage » ! Elle serrerait volontiers contre son cœur chacun de ses petits toute la journée si elle s’écoutait ! Mais il faut se retenir pour ne pas amollir les enfants, les laisser se relever lorsqu’ils ne sont pas gravement tombés, ne pas faire à leur place lorsqu’ils en sont capables et ont besoin de cette exigence personnelle…

           Pour son équilibre affectif, l’enfant a besoin de douceur et de fermeté, cela le sécurise. Une mère empêchait toute souffrance à sa fille : « elle aura à souffrir bien assez plus tard ! » disait-elle en la cajolant. En grandissant cette petite devint tyrannique avec sa mère désespérée, la traitant plus bas que terre. On n’avait donné à cette enfant aucun sens du sacrifice ni du moindre effort !

L’affection se traduit de différentes manières en fonction des âges, mais toujours elle est faite d’échanges, de bavardages confiants… oh cela prend du temps, mais c’est aussi du temps gagné par ailleurs ! Combien d’enfants, d’adolescents surtout, se plaignent de ne pas pouvoir parler avec leurs parents : maman est toujours pressée et papa a trop de travail… Il faut prendre ce temps, se rendre disponible et écouter, parler, conseiller, tranquilliser, s’intéresser à leurs études, leurs amis…merveilleuse façon de donner son affection quand est passé l’âge des câlins !

 

La force pleine d’abandon :

 

  La plus difficile, elle nous fait méditer la force de Notre Dame debout au pied de la Croix, impuissante et douloureuse devant la souffrance de son divin Fils. Il n’y a rien de plus insoutenable que de voir souffrir son enfant, que ce soit d’une douleur physique ou morale ! Immanquablement arrivent des épreuves : maladies, accidents, déceptions, échecs, deuils… On voudrait pouvoir prendre sur soi ces douleurs de nos enfants et l’on se sent si impuissant à les soulager. Parfois même on ne peut pas leur en parler pour les aider, leur dire au moins qu’on est là…Il nous faut alors faire un acte d’offrande, tout accepter et abandonner entre les mains de la Providence avec eux et pour eux, dans un grand « fiat » en dépit de nos larmes.

Parfois nous aurons conseillé, mis en garde, et nos enfants auront fait de mauvais choix souvent irrémédiables, dont, la plupart du temps, les fruits ne se font pas attendre… Douloureux chemin de croix qu’il faut alors faire avec eux, sans passion ni colère.

 

  Quant à nous, chers amis, notre foyer est-il école d’énergie ? Nous appuyons-nous sur le don de force pour obtenir de nos enfants que, de temps en temps, et dans quelques-uns de leurs actes, ils répriment leurs caprices et consentent à sacrifier leurs désirs pour installer en eux l’habitude de vouloir le bien ? Et, entre nous, ne savons-nous pas que pour régler la vie de nos enfants, il est quelquefois nécessaire de corriger les dérèglements de la nôtre…alors force et courage !

       Sophie de Lédinghen

 

Sois forte

Il est dit de la Vierge Marie qu’elle est forte comme une armée rangée en bataille. Cette force, loin de la brusquerie, doit être tienne, à son image.

Être forte, dans le monde où nous vivons, peut être souvent compris, ou vécu comme une intransigeance, une dureté qui se raidit face au mal, une tension jusqu’à nous rompre, faisant fuir ceux qui nous entourent. Mais la force est d’abord l’énergie détournée de soi, tournée vers le bien commun et le bien suprême, pour nous faire avancer. Elle écarte l’obstacle qui empêche la volonté d’être fidèle à la raison. C’est-à-dire qu’elle nous aide à vaincre le mal qui nous effraie et nous permet de poser, avec audace des actes qui coûtent.

Pour le bien, sois forte.

 Pour être fortes, nous devons savoir où nous allons, pourquoi et comment. Sinon cette apparence de force tournera vite en exaltation de nos caprices, à la satisfaction de nos désirs égoïstes, et nous deviendrons alors peu à peu tyranniques pour notre entourage. Notre vigueur disparaitra vite, comme neige au soleil, dans les difficultés. Nous ne saurons pas défendre la vérité, celui qui souffre, et ne parviendrons pas au but fixé. Nous ne servirons pas, mais nous nous servirons.

Pour t’oublier, sois forte.

Force qui s’acquiert par les petits efforts répétés du quotidien, du devoir d’état, ce renoncement sans cesse renouvelé, besogneux, ingrat, que parfois nul ne voit. Il nous aide, dans les grandes décisions à ne pas nous contenter d’à peu près, mais à chercher la vérité, quoiqu’il en coûte, à supporter avec patience les caractères… Seul l’amour de Dieu et du prochain peut être le moteur de l’âme dans cette quête du vrai. Nos actes ont des conséquences que nous ne mesurons pas sur les autres, ni dans le temps. Nous serons responsables de bien des chutes, de bien des pleurs, de bien des erreurs, si nous n’avons pas fait, avec force, ce qui nous incombait.

Par amour, sois forte.

 La force nous aide à la juste colère, si celle-ci est nécessaire pour la défense de la foi, de la morale ou du bon sens. La force tempère ce qui peut bouillonner en nous devant la souffrance profonde, l’injustice ou l’erreur grossière, car elle nous contient. La force nous rend doux mais fermes, il faut la demander souvent, dans la prière, car elle n’est plus vraiment de mise. Nous en avons peu d’exemples dans un monde où le caprice matérialiste domine, sans souci de servir Dieu. Le chemin d’une âme, autre que la nôtre, surtout si nous en avons charge, dépend de notre force.

Pour ton prochain, sois forte.

Force de ne pas « faire comme tout le monde », de ne pas suivre les modes, de ne pas se couler dans le moule par peur de la différence. Force de dire et rappeler la vérité sans crainte, force de résister à l’autorité quand celle-ci nous conduit manifestement mal ou se montre comme un loup ravisseur. Force sans hargne, sans mauvaise colère, sans agacement. Force qui va tranquillement son chemin et reste le phare dans la tempête, car elle sait où elle va et pourquoi.

Force d’accepter la contrariété ou la croix sans révolte, même si la nature est broyée, de se relever après la chute avec courage. Persévérance humble de chaque jour, jusqu’au moment où la mort viendra nous prendre. Force qui ne vient pas de nous qui ne sommes que faiblesse.

En Notre Seigneur et Notre Dame, sois forte.

                           Jeanne de Thuringe