Une jolie blouse!

Chères amies,

Pour cette rentrée nous vous proposons de coudre une blouse pour jeune fille et femme, à la coupe bien actuelle. Elle comporte 3 plis à l’encolure et de petites manches. Selon le tissu employé elle sera pour les belles occasions ou pour le quotidien. Prévoyez un tissu un peu fluide mais avec suffisamment de tenue pour le tombé des plis (coton fin, crêpe, lin).

http://foyers-ardents.org/fa-23patron-blouse/

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Bonne couture !

Isabelle et Marie-Hélène

 

Mon enfant peut-il travailler dans le domaine de la santé?

Faisant écho à l’article « Mon enfant peut-il faire Sciences-po ? » paru dans un dernier numéro de « foyers ardents »1, l’application au domaine de la santé peut sembler plus simple. « Oui évidemment », « La santé est un domaine de choix pour un catholique », « Il aura toujours le choix de soigner comme il convient », ou encore « N’est-ce pas un excellent moyen de toucher les cœurs que de soigner les corps ? ». 

Ces réponses trop rapides méritent quelques éclaircissements, car ce n’est pas si simple.

Ces lignes ne se veulent pas un exposé des différentes filières de la santé, mais plutôt une réflexion sur des principes qui doivent guider le futur professionnel de santé catholique pour déterminer ce qu’il peut ou ne peut pas faire, depuis le début de ses études jusqu’à son exercice professionnel.

Ce qui a été dit des « grandes écoles »1 s’applique parfaitement aux IFSI et IFAS (Instituts de Formation en Soins Infirmiers ou Aide-Soignants) ou aux facultés de médecine : dispensation d’un enseignement fortement idéologique et politiquement correct, sanitairement correct ; risque de se confronter à des comportements toxiques voir immoraux (les soirées d’intégration en médecine ou les soirées infirmières ont toujours été connus pour leur caractère « carabins », comprenez « portés sous la ceinture », et ceci ne va pas en s’améliorant loin de là). Ajoutons une forme de pression qui pousse à l’excellence (concours de premières années, concours de l’internat) qui requiert une volonté forte pour garder un équilibre naturel (sport, lectures, formation) et surnaturel (prière, sacrements).

Distinguons les formations théoriques et les formations pratiques sous forme de stages, souvent mêlées.

Formation théorique

Cette formation est incontournable et le plus souvent dispensée par des professeurs spécialisés dans leur discipline. Elle est encore aujourd’hui reconnue pour sa qualité.

Mais l’étudiant aura à se garder des erreurs, parfois subtiles, qui lui sont enseignées dans ses cours. On pense évidemment aux sujets comme l’avortement, la contraception, l’euthanasie, pour lesquelles il doit avoir les idées très claires. Il ne doit pas, ne peut pas, jamais, jamais. Il s’agit d’une violation directe de la loi divine. « Non possumus ».

D’autres sujets mélangent plus subtilement le bon grain et l’ivraie, et nécessitent un solide attachement à la loi naturelle et au réalisme. C’est le cas des sciences humaines, de l’histoire de la médecine, de la psychologie, pour ne citer que ces exemples. Il devra garder un regard critique et se former en parallèle avec de bons ouvrages. Il lui faudra l’humilité pour demander conseil sur ces références bibliographiques. Car là encore il faut du discernement.

Par exemple, de nombreuses ouvrages officiellement catholiques tentent de remédier à l’utilitarisme en développant ce qu’ils appellent la « norme personnaliste ». Particulièrement développée après les années 80, ils considèrent la dignité humaine comme une fin absolue. Cette « norme » peut sembler moins mauvaise que l’idéologie qui dispose de l’homme comme d’un bien consommable. Mais elle n’en est pas moins dangereuse car l’action est alors tournée vers l’homme pour l’homme, et non d’abord vers Dieu à travers l’homme. C’est en fait, remplacer la charité (aimer Dieu et son prochain pour l’amour de Dieu) par la solidarité (aimer son prochain). Notre étudiant tirera un grand profit dans la lecture de références catholiques modernes mais antérieures à la crise des années 60. On ne devrait pas faire l’économie de lire, méditer, relire et ruminer les écrits du pape Pie XII sur la santé, avantageusement réédités récemment en un recueil2. L’idéal serait de relire tous les textes de ce pontife aux médecins, infirmière, ou sage-femmes, car tous les principes y sont abordés, les grandes questions « bioéthiques » d’aujourd’hui y ont déjà été traitées.

Les stages

L’autre partie de l’enseignement est distillée sur le terrain sous forme de stages.

Les filières imposent différents stages, et on aura soin de bien les connaître en détail avant de s’y lancer. Privilégier les filières où on peut choisir soi-même les stages. Se renseigner en amont, le plus efficace étant d’appeler directement dans les services et de s’entretenir avec un autre étudiant stagiaire pour connaître tous les détails. Ne pas avoir peur de poser toutes les questions : c’est un usage courant aujourd’hui à une époque où les étudiants donnent des notes de leur terrain de stage. Ne nous privons donc pas de mener notre enquête.

Exemples. Stage de gynécologie-obstétrique : puis-je le valider en ne passant qu’en suivi des grossesses et en salle de naissance ? Bloc obstétrical : puis-je assister uniquement aux accouchements, et pas aux IMG ou aux chirurgies de stérilisation ? Stage de chirurgie : est-ce que les disciplines sont séparées ou bien toute opération y compris de gynécologie se fait dans le même bloc ? Gériatrie : y-a-t-il un secteur de soins palliatifs et quelle est l’approche des équipes médicales sur la fin de vie ? Stage chez le médecin généraliste : serai-je amené à prescrire des contraceptifs ou pourrai-je m’y opposer ?

Pour tout stage obligatoire dans une spécialité, se demander : puis-je le valider dans un service qui me permet de ne pas pratiquer un acte que la morale réprouve ? Si la réponse est non, il faut assurément chercher un autre terrain de stage. S’il n’y en a pas, il faut courageusement remettre en cause cette filière. Le principe est qu’on ne doit jamais faire le mal, y participer directement, même pour qu’en résulte un bien.

Exemple. Je dois faire un stage de gynécologie où l’on me demande de « faire une vacation d’IVG ». C’est obligatoire dans le cursus pour devenir gynécologue. Et on a besoin de gynécologues catholiques.

Si le bien que je vise, devenir gynécologue catholique, passe par la réalisation d’actes intrinsèquement mauvais (ex : l’avortement) : ce n’est pas acceptable pour un catholique. Soit j’arrive à devenir gynécologue par un autre chemin (stages validant sans pratiquer l’avortement), soit je ne dois pas faire d’études pour devenir gynécologue.

Objection. À ce titre, il n’y aura jamais plus de gynécologue catholique.

À ce jour, par la filière classique, c’est très probable.

Mais le prix à payer ne peut pas être le péché mortel commis par l’étudiant. Non possumus. Souvenons-nous que certaines professions était interdites aux premiers chrétiens car incompatibles avec la foi chrétienne. Il faut être de cette trempe, être cohérent.

Objection. Mais je ne participe pas toujours directement à l’acte mauvais. Si je suis exécutant d’un ordre, suis-je responsable ?

Il s’agit là de la coopération à un acte mauvais. Le médecin pratique un acte mauvais, les autres y coopèrent : l’étudiant l’aide, l’infirmière injecte le produit, l’aide soignante fera la toilette du patient, l’agent technique fera le ménage de la chambre. Tous n’ont pas le même degré de coopération à l’acte. Pour l’étudiant ou l’infirmière, la coopération est dite prochaine. Pour les autres elle est dite lointaine. Cette distinction permettra à un bon conseiller de bannir la première et de tolérer dans certains cas la seconde. Nous approfondirons ce point dans un prochain article sur les actes qui ont deux effets, un bon et un mauvais (Principe de l’acte à double effet).

 

Objection. « Maintenant que je suis infirmière ou interne, je ne vais quand même pas revenir à zéro et gâcher toutes ces études ». 

D’où l’importance de bien connaître ce qui peut l’être avant de se lancer dans une filière: mieux vaut prévenir que guérir.

Malgré cela, on peut se rendre compte secondairement qu’on est confronté à des actes mauvais, qu’ils nous sont imposés, ou qu’on ne l’avait pas prévu. Et on ne peut pas tout prévoir. Alors, s’il n’y a pas moyen de faire autrement, oui il faut renoncer, faire autre chose, changer de voie. Car la beauté de cette voie, la grandeur de cette mission, le bien qu’on pourrait y faire, ne justifient pas la pratique d’un seul péché mortel. Jamais. Non possumus.

Souvenons-nous de la parole célèbre de sa mère à Saint-Louis : « je préfère vous voir mort à mes pieds que coupable d’un seul péché mortel ».

 Citons aussi le cas de ce gynécologue non catholique. Sa femme obtient la grâce de sa conversion. Il arrêta alors de prescrire des contraceptifs et de pratiquer les avortements. Il mit fin à son exercice de gynécologue et s’installa en médecine générale dans une autre région, sous les railleries de ses anciens collègues et de ses proches.

Être fier de sa foi et lui soumettre toute sa vie. Toute. Savoir dire non quel qu’en soit le prix et garder confiance en Dieu pour la suite.

Que les parents et les jeunes gens soient donc attentifs au contenu précis de ses formations dans le domaine de la santé. On ne peut pas dresser une liste des filières qu’on peut suivre et de celles qu’on ne peut pas suivre quand on est catholique. Il faut les étudier toutes avec précision.

Ne partons pas du principe que « c’est comme autrefois, j’ai connu ça de mon temps » : les cursus et les obligations pour obtenir le diplôme ont changé et changent.

Et il faudra du courage pour faire comprendre en douceur à nos étudiants que telle ou telle filière n’est pas faite pour eux.

On ne peut pas se lancer dans ces filières les yeux fermés. Il faudra même les déconseiller aux jeunes gens influençables, faibles, peu préparés ou mondains. Ils auront besoin d’une forte liberté intérieure pour résister aux compromissions avec l’esprit du monde. A ceux déjà évoqués, ajoutons une forme sournoise, et croissante au fil du temps, de pression professionnelle. Entraîné vers une obligation de résultats (alors qu’officiellement, le soignant n’a qu’une obligation de moyens), le soignant est poussé à se donner toujours plus, quitte à négliger ses autres devoirs.

Donc même conclusion que pour « Science Pô » : « Des jeunes gens, fermement attachés à leur foi, nourris de lectures fortes, puisant aux sources de la philosophie thomiste, proches d’un prêtre à qui ils pourront exposer leurs doutes, attachés à leur chapelet quotidien, peuvent donc encore risquer (le mot n’est pas trop fort) cette formation »1.

              Dr L.

1 « Foyers ardents » numéro 20, mars avril 2020, pages 26-28

2 Pie XII et la médecine, éditions Clovis.

 

Une belle mission

Chers grands-parents,

           Laissons la parole aujourd’hui à la jeune génération qui ose par ces lignes réclamer aux anciens le plus beau cadeau dont ils ont besoin :

           « Vous qui constatez les ravages exercés par le temps dans le champ de votre activité et qui êtes parfois tentés de vous attrister, en vous croyant inutiles, vous avez encore un beau rôle à jouer. La nature a pâli votre teint, ravagé votre front, en y creusant des rides profondes, mais elle a glissé une sorte de miséricorde dans ses ravages, en donnant à vos cheveux blancs la douceur qui atténue ses dommages. Vos yeux ne sont plus aussi vifs mais ils laissent tomber un tel rayon de bonté ; sur vos lèvres ne se dessinent plus les petits plis malicieux qui jadis, si facilement, venaient s’y accrocher ; vos mains n’ont plus de vigueur mais leur étreinte est plus chaude. Dans ce temps de congé, dans ces années de vacances lumineuses que vous ménage la Providence, oh, faites, au soir de votre vie, le geste du divin semeur, semez, semez la bonté. Donnez, donnez avant de partir, à ceux que vous aimez ce qu’il y a de meilleur en vous : un peu de votre âme. Donnez un peu du divin qui vous envahit. Soyez à cette heure où l’égoïsme triomphe, où la haine multiplie les ruines, où l’orgueil s’acharne à imposer silence à tous les maîtres, à ceux d’hier et à ceux d’aujourd’hui, soyez des semeurs de bonté et des mainteneurs de tradition. Les nouvelles générations qui s’éveillent ont besoin de vous, de votre regard bienveillant, de vos conseils pleins d’affection. Nous savons que vous priez pour chacun de vos petits-enfants sans en oublier aucun, et nous ne ferons rien qui pourrait vous décevoir. Vous êtes la voûte de la famille, le pilier qui rassure, l’image de la fidélité. Dans votre regard, nous voyons l’espérance que nous éveillons en vous et nous ne voudrions pour rien au monde vous décevoir. Vous êtes le lien entre l’éternité et la terre car votre âme, qui parle tant à Dieu, inonde de ses prières ceux qui risqueraient de brûler leurs ailes au contact du monde.

Chers grands-grands-parents, ne regrettez pas le temps passé, ne vous plaignez pas de votre faiblesse physique ou des méfaits de l’âge ; ne vous lamentez pas sur les voix de Dieu qui vous échappent : offrez et priez ! Dieu vous a laissé sur terre pour cette belle mission et il compte sur vous. Vos enfants, petits-enfants et arrières petits-enfants ont besoin de vous ! Comme le soleil couchant, avant de réciter votre Nunc dimittis avec le vieillard Siméon, répandez encore sur la terre la lumière de vos rayons flamboyants. Merci pour tout ce que vous nous avez transmis, pour ce lien que vous avez créé entre ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui ; merci encore pour la paix, la bienveillance, la fidélité et la force de la vérité que vous avez su nous faire aimer. Merci toujours pour vos prières qui nous portent aujourd’hui et qui nous suivront de là-haut demain ! Nous comptons sur vous !

                  Des petits-enfants

 

La force aujourd’hui

« Quiconque n’a pas de caractère n’est pas un homme, c’est une chose », disait le journaliste révolutionnaire Chamfort. La volonté, le caractère sont en effet des synonymes de cette force d’âme qui nous fascine tant lorsque nous contemplons la vie des grands hommes qui ont traversé l’histoire. Quiconque est doté de cette force est érigé en modèle intemporel, au-dessus de la multitude innombrable de ceux que le Père Vuillermet (OP) appelle les « homunculi », les « moitiés d’hommes1 » . Blessé par le péché originel, il est, en effet, difficile à l’homme d’agir, de résister à ses passions, à ses pulsions. Vertu morale, c’est-à-dire vertu nécessaire aux bonnes mœurs, à la vie sociale, la vertu de force est aujourd’hui tombée en désuétude car mal comprise et donc mal appliquée, aussi attachons-nous à la définir, ce qui nous permettra de comprendre en quoi le monde actuel lui est foncièrement opposé et enfin de déterminer quelques moyens propices à son apprentissage.

  1. Définition

   « La vertu de force, explique saint Thomas, a pour fonction d’écarter l’obstacle qui empêche la volonté d’obéir à la raison ». La force est donc étroitement liée à la prudence, puisque le rôle de cette dernière est de choisir entre différents moyens pour parvenir au bien, et donc de projeter la volonté vers la fin qui nous paraît la plus raisonnable. La prudence sans la force est vaine, car incapable d’atteindre le bien désiré, tandis que la force sans la prudence n’est que violence primaire et infructueuse. La prudence est également subordonnée à la justice, qui permet de déterminer quel est le meilleur bien à poursuivre parmi ceux qui se présentent à nous.

Du fait de la difficulté qu’a l’homme à faire le bien suite au péché originel, la force implique que l’homme vainque sa crainte de la souffrance, son envie de fuir les difficultés. Son expression la plus élevée est dans le dépassement de la crainte de la mort, souffrance suprême pour l’homme, en vue de maintenir la justice, comme l’expose saint Thomas : « l’homme n’expose sa vie personnelle que pour la justice ». Mais parvenir à ce niveau de force nécessite « une préparation matérielle et morale adéquate » (M. de Corte) et « [d’avoir] pu se préparer, par une longue méditation antérieure, à sacrifier tous ses biens particuliers et, en premier lieu, sa vie personnelle [pour le bien commun]. » (Saint Thomas d’Aquin)

  1. La force aujourd’hui

   Nous avons vu plus haut que la vertu de force découlait de la vertu de justice, du service du bien commun. Sans cette force, il est impossible à l’homme de vaincre sa crainte de la souffrance ou tout simplement son égoïsme. Cet égoïsme est aujourd’hui la règle autour de nous et s’exprime par une recherche exclusive du bien particulier d’une personne ou d’un groupe de personnes. Nous avons aujourd’hui le culte du désordre, parfaitement exprimé par la suppression des droits de Dieu au profit des « droits de l’homme ». Privé de son cadre, l’homme perd ses repères et, dans ce contexte, la force ne peut qu’être dénaturée.

Aujourd’hui, fort est celui qui s’abandonne à ses passions et les revendique contre une société jugée oppressive, celui qui trouve le courage extraordinaire de briser les « tabous », celui qui, en somme se jette à corps perdu dans le péché et l’immondice et se montre au monde entier comme modèle et héros de l’indécence. Peu importe le mal que l’on fait, du moment qu’on l’assume.

A côté de cela, il apparaît que la vertu de force revêt une importance toute nouvelle : la justice étant devenue beaucoup plus difficile à exercer du fait de la corruption généralisée des mœurs, la force va être d’autant plus nécessaire à l’homme afin de poser le moindre acte de vertu : « Là où la force fait défaut, la déliquescence morale et politique, l’indifférence religieuse, la recherche éperdue du plaisir pour le plaisir s’installent et se répandent » (M. de Corte). Michelet, bien que libéral et anticlérical, a constaté cette disparition de la force propre au monde moderne : « Au milieu de temps de progrès matériels, intellectuels, le sens moral a baissé. Tout avance et se développe ; une seule chose diminue, c’est l’âme ». Sans cette âme, sans cette force mise au service du bien, les hommes ne peuvent que plonger dans les ténèbres et se vautrer de plus en plus profond dans le vice. Et malheureusement, à la vue de notre pauvre monde, nous sommes bien tentés de répéter les mots prononcés il y a déjà trois siècles par le philosophe Jouffroy : « Il n’y a plus d’hommes2 », ce qui doit d’autant plus nous animer du désir de sortir de la masse des homunculi pour entrer dans l’élite des virum, des hommes et des femmes vrais.

III. L’apprentissage de la force

   On recense de nombreux ouvrages traitant de l’apprentissage de la force, et l’on retrouve dans la plupart les mêmes éléments. Le Père Vuillermet (1875-1927), dominicain et aumônier d’un bataillon de chasseurs alpins, s’applique dans son Soyez des hommes, à la conquête de la virilité, à guider les jeunes gens sur le chemin de la vie adulte. Son propos est cependant assez général pour s’appliquer à tous, quel que soit l’âge ou le sexe. Il souligne plusieurs éléments qui, sans être absolument nécessaires, sont d’une grande aide dans l’apprentissage de la force. Cela n’est bien sûr possible que si l’on considère que la force n’est pas innée et nécessite d’être poursuivie longuement et ardemment. En effet, un Alexandre le Grand, un César ou un Louis XIV sont admirables pour leur force de caractère mais n’ont pas réellement acquis la vertu de force car ils entretenaient des vices contraires au bien par faiblesse personnelle. 

La première clé que donne le P. Vuillermet est la connaissance de soi-même, permise par un examen de conscience profond confrontant notre attitude personnelle à la volonté de Dieu, et par la prise d’une résolution ferme et précise en vue d’acquérir la vertu la plus opposée à notre défaut dominant. Cette résolution est indispensable si l’on veut progresser dans la vertu, car elle permet de donner une direction claire et surtout atteignable à nos efforts. La deuxième clé est l’amitié, car de l’amitié vraie naît une émulation et une entraide vers le bien, d’autant plus qu’un véritable ami est bien souvent le mieux placé pour aider à la correction des défauts3. Ajoutons que de toutes les amitiés, celle du prêtre est de premier choix de par sa clairvoyance et sa profondeur. Parmi les autres clés que nous donne le P. Vuillermet, la question des habitudes est l’une des plus importantes car c’est de ces habitudes que naît la facilité à faire le bien, ce qui est à proprement parler la vertu. Comme le dit l’adage, « c’est le premier pas qui compte ». Celui-ci fait, le suivant est déjà plus facile, et ainsi de suite. Ces trois clés en main, l’apprentissage de la vertu ne devient alors qu’une question de temps, mais encore faut-il avoir la volonté de changer, de se détourner du monde pour se tourner entièrement vers Dieu.

  Parce qu’elle est le ciment de la société, parce qu’elle est nécessaire à toutes les vertus, parce qu’elle grandit l’homme au-dessus de sa médiocrité causée par le péché originel et encouragée par l’individualisme moderne, la force est la vertu phare de notre temps plus qu’aucun autre.  Mettons toutes nos forces – c’est bien le cas de la dire – à acquérir cette précieuse vertu, de peur que nous n’ayons à entendre à notre jugement ces paroles de Dieu : « je vomirai les tièdes ».

 

« Ce qui soutient le monde, et, de génération en génération (…), ce qui l’empêche de tomber à la barbarie, ce ne sont pas les progrès de la mathématique et de la chimie, ni ceux de l’histoire et de l’érudition, mais ce sont les vertus actives, le sacrifice de l’homme et cette abnégation de soi dont le christianisme a fait la loi de la conduite humaine. » (F. Brunetière).

Un animateur du MJCF

 

1 « Homme » est bien sûr à prendre sous sa forme universelle, et non générique.

2 Théodore Jouffroy (1796-1842) est un philosophe et homme politique français qui a vécu les bouleversements politiques et moraux provoqués par la Révolution et l’Empire.

3 Cf le Foyer Ardent n° 22 sur la solitude

 

 

 

La force de l’Amour!

           Lorsque Louis-Marie avait éprouvé ses premiers sentiments pour Julie, son amour naissant lui avait donné des ailes : il avait mis son point d’honneur à bien réussir la fin de ses études, à trouver un bon travail et à approfondir sa vie spirituelle pour être plus digne d’elle. Ils sont maintenant mariés depuis quelques années, et leur amour réciproque reste une motivation essentielle dans les efforts de chaque jour.

L’amour rend fort

   La Force, ce don qui nous inspire de l’énergie et du courage pour vivre chrétiennement en surmontant tous les obstacles est une qualité de la volonté. Pour orienter et guider la volonté, rien de tel qu’un haut idéal moral et spirituel ! Tous les éducateurs le savent et cherchent à développer l’amour de cet idéal chez les enfants et les adultes.

  L’amour continue à nous donner des ailes toute notre vie, au-delà de la période de découverte des premières années ! Louis-Marie puise dans l’amour de son épouse et de ses enfants, le sens de l’engagement dans son travail avec des responsabilités ou des contrariétés parfois lourdes à porter. Il y trouve aussi la persévérance dans les efforts vers la vertu pour corriger ses défauts (et cela dure toute la vie !).

  Son amour se concrétise dans les attentions de chaque jour, les services pour alléger le travail de son épouse, le temps passé avec les enfants même lorsque la fatigue ou l’égoïsme l’attirent vers internet ou son journal.

  Par amour, le bon mari sait respecter son épouse, s’unir à elle par un vrai don mutuel en évitant l’esprit de possession et pratiquer l’abstinence lorsqu’elle est souhaitable.

  Par amour, il sait envisager le positif en toute chose, y voir l’action de la Providence avant de s’inquiéter des incertitudes ou des épreuves.

Ainsi, le père aide sa famille à aller de l’avant. Il fait le pari de la confiance par amour : confiance envers son épouse, confiance envers les enfants. Il éloigne toute pensée de jalousie qui blesserait cet amour et pèserait sur l’ambiance de la famille.

  Une traduction de saint Paul, apparemment moderne mais théologiquement juste1, nous montre quelle force doit porter notre amour en famille : « l’amour est patient, serviable, sans envie (…) il ne s’emporte pas (…), il excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout » (1 Cor-XIII). Quel programme à mettre en pratique !

Plus fort pour bien aimer

            S’adapter au tempérament de chacun pour trouver le bon moment et la bonne manière de se parler peut réclamer un effort. Par expérience, nous savons tous les effets négatifs d’une parole, d’un silence ou d’une attitude maladroite, au mauvais moment… Le père de famille essaiera de faire attention à ce point. Cet effort d’adaptation montrera son amour à son épouse et à ses enfants et les fera tous grandir.

Il faut de la force et de la persévérance chaque jour pour rassurer, donner confiance, encourager, protéger, organiser une vie régulière afin que la paix règne dans la famille malgré les incertitudes ou les épreuves qui peuvent secouer notre tempérament.

  « Tu t’apercevras bientôt, je crois, (qu’en raison des imperfections humaines et des difficultés qui en découlent), l’amour, bien qu’il soit un don, doit aussi être appris, particulièrement lorsque tu t’efforceras de l’intégrer dans votre vie quotidienne qui n’est pas vécue dans un château de contes de fées mais au milieu des pressions, des problèmes et des épreuves quotidiennes2. »

Avoir la force d’intégrer notre amour dans la vie quotidienne, voilà le secret pour développer cet amour ! Cette règle s’applique à l’amour humain, comme à l’amour de Dieu.

A contrario, il est évident que la faiblesse détruit l’amour. Nous appelons faible, un mari ou un père inconstant dans l’épreuve, tombant trop facilement dans les tentations. L’amour impur rend faible, esclave des passions charnelles. Il est un faux amour.

Apprendre la force de l’amour

   Quels que soient notre âge et l’état de notre famille, apprenons la force qui nous aidera à mieux aimer et utilisons notre amour pour développer notre force de caractère ! Plus nous pratiquerons la force par amour, plus la force deviendra une habitude. Cette habitude libèrera notre volonté qui pourra s’employer, par un nouvel élan, à conquérir des qualités nouvelles et toujours plus élevées.

La force, qui est une qualité de la volonté, ne doit pas être confondue ni avec l’entêtement, ni avec l’énergie. Elle ne se conquiert que lentement et doit être éclairée par l’intelligence sur les buts à atteindre.

La rentrée scolaire peut être une bonne occasion de prendre quelques résolutions pour développer notre force par amour : amour de notre épouse, de la famille, de Dieu.

Au-delà des services ou des signes d’amour que nous pouvons mettre à notre programme, souvenons-nous que l’Eucharistie est appelée « le Pain des Forts » ! Quoi de mieux pour progresser, que la communion chaque dimanche, et pourquoi pas une messe en semaine cette année ? Une messe par amour de notre famille, ainsi confiée au Bon Dieu ; une messe pour mieux accomplir notre rôle de père ! 

Hervé Lepère

 

1 La Charité se résume en ce commandement : tu aimeras le Seigneur ton Dieu, et ton prochain….

2 Au creuset de l’amour, Alice von Hildebrand-2002

 

 

De l’huile répandue …

Au secours !!!

C’est un peu la catastrophe… Vous avez malencontreusement renversé de l’huile sur le sol de votre cuisine, dans un moment de maladresse, ou parce que vous étiez un peu pressée ?

Il va en falloir du temps pour éponger et retrouver un sol sec, sur lequel on ne risque pas de choir !

 

La solution la plus rapide est de retirer le plus gros avec du papier absorbant, et de répandre (de nouveau) un peu de farine sur la surface huileuse. Attendez quelques instants que la farine ait « pompé » l’huile et vous allez retrouver un sol presqu’impeccable, sans risque d’accident ! Cela gaspille un peu de farine, bien sûr, mais économise beaucoup d’eau chaude, de nettoyant et de temps.

 

 

Vous appréciez cette rubrique ? Vous trouvez ces astuces intéressantes ou vous en connaissez de bien meilleures ? Alors … partageons nos talents ! N’hésitez pas à écrire au journal.

 

L’invention de la Sainte Croix

L’Invention de la Sainte Croix (du verbe latin : INVENIO, IS, IRE, VENI, VENTUM, tr : trouver) est fêtée le 3 mai ; c’est Sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin qui retrouva la Sainte Croix sous le temple consacré à Vénus. Les païens avaient construit ce temple au-dessus pour que les chrétiens venus en prière en ce lieu paraissent adorer Vénus.

L’église catholique célèbre le 14 septembre la fête de l’Exaltation de la Sainte Croix. Quand les Perses restituèrent en 628 la sainte Croix à l’empereur Héraclius, celui-ci voulait transporter lui-même la Sainte relique, mais une force invincible l’empêchait d’avancer. C’est seulement quand il se fut dépouillé de ses vêtements précieux qu’il put porter la Croix jusqu’au calvaire.

La liturgie de la fête de la Sainte Croix nous fait considérer le Christ, divin roi glorifié mais aussi le Christ comme homme avec les cruelles souffrances de la Passion.

Rome se glorifie encore aujourd’hui de conserver le plus grand fragment de la Croix dans la basilique Sainte Croix de Jérusalem, élevée par Constantin sur l’emplacement du palais de sa mère, sainte Hélène.

« Ave Crux, spes unica. Oui, saluons la Croix qui est notre unique espoir. C’est par la Croix que les apôtres ont sauvé l’Église, qu’ils ont planté l’Église. C’est par la Croix que Constantin a vue apparaître dans les cieux avec cette phrase : In hoc signo vinces : Par ce signe tu vaincras. Et c’est par le signe de la Croix que Constantin a vaincu et que l’Église est devenue triomphante. C’est par ce signe de la Croix que les armées catholiques ont vaincu les musulmans à Lépante. Le pape avait demandé que l’on mette la Croix sur toutes les voiles des bateaux, partout, et que l’on prie avant de combattre. Et ils ont eu la victoire. Ils ont empêché l’Europe de devenir musulmane.

C’est par la Croix que Jeanne d’Arc a sauvé la France et si elle n’avait pas sauvé la France, la France serait aujourd’hui protestante, sous la domination anglaise.

C’est donc par la Croix que Dieu veut que les âmes se sauvent ; que Dieu veut que l’erreur soit condamnée. C’est par le Croix qu’il a vaincu le démon, qu’il a vaincu le monde ; qu’il a vaincu le péché. Nous sommes à un temps où nous devons combattre, pas seulement nous lamenter, pas seulement nous plaindre du malheur des temps, du malheur de l’Église, de la destruction de l’Église, mais que nous devons combattre contre l’ennemi, contre l’ennemi traditionnel qui est Satan. Et qui avec tous les scandales du monde, cherche à nous faire tomber dans le péché et à nous entraîner avec lui en enfer. Nous devons donc combattre. Avec quels moyens ? Mais précisément avec les moyens traditionnels de toujours. L’Église a vaincu par sa foi. Elle a vaincu par le signe de la Croix. Et le signe de la Croix, c’est précisément notre Sainte Messe, qui est la Croix vivante que Notre Seigneur nous a laissée.

Alors, avec Notre Seigneur, nous vaincrons. Nous ne savons pas comment, ni quand, ni de quelle manière, mais si nous nous confions à Notre Seigneur Jésus-Christ, nous pouvons être certains d’avoir la victoire1

 

Douceur de la virilité et virilité de la douceur

       N’en déplaise aux tenants de l’idéologie du genre, les garçons se montrent aussi naturellement fiers de leur force physique que les filles le sont de leur beauté. C’est bien en vain que l’on voudrait lutter contre ces tendances qui sont celles mêmes des sexes. Loin de les rejeter, que les éducateurs les identifient comme de précieux fils d’Ariane qu’ils doivent saisir pour conduire leurs enfants sur les chemins de la vertu.

Montrons d’abord que tous leurs premiers soins consistent à expliquer à leurs garçons que la transposition de leur force physique sur le plan moral se nomme le courage, et à leurs filles que la douceur est le mot qui désigne la beauté de l’âme. Voilà les vertus qu’ils doivent conquérir ! La tâche est si ardue qu’ils ne peuvent y parvenir par leur seule bonne volonté. Voyons alors comment les éducateurs doivent indiquer à leurs enfants le secours nécessaire de la grâce dont ils ont besoin pour progresser sur leur sentier chrétien et la splendeur spirituelle des vertus qu’ils sont appelés à pratiquer. Terminons cet exposé en leur dévoilant la récompense que mériteront leurs efforts. Le cheminement viril de leurs garçons en fera des doux comme l’adoucissement vertueux de leurs filles permettra bientôt de les louer comme la femme forte de nos Ecritures. La douceur de la virilité et la virilité de la douceur, n’est-ce pas ainsi que doit s’harmoniser la sainte complémentarité des hommes et des femmes ?

  1. Ton âme est plus que ton corps :

Le garçon triomphe d’avoir remporté la course, jeté sa pierre plus loin que les autres, terrassé son frère dans une mémorable bagarre ! La force bouillonne en lui. Qu’il soit vigoureux ! Ne méconnaissons pas les bienfaits des efforts physiques auxquels il se livre naturellement. Voilà qu’ils vont servir de point de comparaison pour l’ouvrir à la découverte de la force morale. Le voici en effet tout piteux d’une grosse bêtise garçonnière qu’il a commise. Avouera-t-il sa faute ? Sera-t-il faible ou fort ? Le moment est précieux pour que l’adulte évoque cette autre force spirituelle qui doit le déterminer à la franchise. Ou bien le voilà sur le point d’éclater dans une terrible colère parce qu’il a perdu au jeu. Céder à cette passion doit lui être indiqué comme un signe de faiblesse. La force morale consiste ici à garder la maîtrise de soi et même le sourire. Cette continuelle transposition du physique au moral doit lui être familière et devenir un ressort de ses combats contre lui-même.

La fillette passe et repasse devant la glace qu’elle a découverte et raffole de s’entendre dire qu’elle est mignonne. Mais la maman qui a bien repéré son petit jeu devra saisir l’occasion où elle est « affreuse » de jalousie, de gourmandise ou de coquetterie pour lui montrer que la beauté de l’âme vaut mieux que celle du corps. Comment faut-il l’appeler ? La douceur, je crois. Non pas encore dans un sens très rigoureux mais dans le sens large de l’affinité qui existe entre cette vertu et le soin déjà maternel qu’elle doit prendre de ses poupées. Elle ne sera en réalité mignonne que par son abord calme, avenant et souriant. L’idéal de cette beauté morale – qui redonde d’ailleurs sur les traits de son visage ! – doit la porter et la charmer.

  1. Rien sans le Christ :

 Faut-il le préciser ? L’accoutumance des enfants à cette transposition fondamentale de l’ordre physique à l’ordre moral ne peut bien réussir qu’avec l’aide de la grâce. Bannissons le naturalisme persuadé que les succès éducatifs ne dépendent que du talent à toucher les cordes psychologiques des enfants !

S’il est vrai qu’il les faut connaître, n’oublions pas que l’archet qui en tirera les sons harmonieux doit être chrétien.

Le garçonnet qui veut être fort et courageux doit s’éprendre des modèles de sainteté qui lui révéleront des profondeurs insoupçonnées. Qu’il découvre, par exemple, en lisant la vie de Léon De Corte, l’existence de ces athlètes dépourvus des muscles corporels. Qu’il lise la victoire d’un François de Sales colérique devenu le plus doux des saints. Qu’il remplisse son âme de la Passion du Christ, fort de la force de Dieu et victime volontaire pour nous sauver de nos péchés. Qu’il prenne conscience du néant d’une vigueur corporelle qui n’est pas accompagnée de celle de l’âme. Qu’il sache coupable la force qui n’est pas protectrice des plus faibles. Et, qu’à la vue de ses échecs pour devenir fort, le garçon s’humilie devant Dieu en demandant son pardon au confessionnal et vienne mendier au banc de communion le pain des forts. Qu’il se jette enfin dans l’amour filial d’une Mère forte comme une armée rangée en bataille.

Quant à la fillette conquise par l’idéal de la douceur, qu’on l’aide vite à l’intérioriser ! La douceur n’est pas douceâtre, encore moins doucereuse. Elle n’est pas une simple apparence que donnent les traits du visage. Elle n’est réellement que si, intérieure, elle se répand sur l’extérieur. Autrement dit, pas plus que la force, elle ne doit être réduite à l’horizontalité des relations avec les autres êtres humains. Si Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui est Dieu, a pu dire de Lui : « Je suis doux et humble de cœur1 » , c’est que Dieu « est la Douceur par essence2 » . Nous ne serons des doux qu’en nous approchant de Dieu et en participant de sa douceur. Alors, qu’est-ce que la douceur ? Elle est avant tout la soumission humble et patiente au bon vouloir divin à l’origine de l’équanimité que l’on conserve dans ses rapports avec le prochain alors même que l’on doit supporter les maux qu’il nous inflige.

Que l’on parle de la force ou de la douceur, il faut un peu déplorer une littérature abondante, d’avant le Concile déjà, qui cherche à peindre de beaux portraits chrétiens de jeunes gens et de jeunes filles, à exalter leur rayonnement. Mais l’on cherche souvent en vain la racine et la sève de leurs nobles comportements. Ils nous paraissent d’une autre espèce que nous car ils développent d’admirables vertus comme si elles leur étaient naturelles. Ne nous illusionnons pas ! Nos modèles chrétiens sont toujours des âmes à la vie intérieure profonde, qui ne trouvent pas ailleurs que dans l’union à Notre-Seigneur, par l’oraison et par les sacrements, l’abnégation et la charité que nous leur voyons.

III. Deux itinéraires pour un même sommet

 Le jeune homme habitué à se vaincre lui-même devient réellement fort. Il comprend que le véritable courage consiste d’abord dans cette lutte incessante qu’il doit mener au-dedans de lui contre les mouvements désordonnés de ses passions pourtant parfois si violentes. Maître en sa demeure, il est aussi ce qu’il doit être dans l’existence, dans l’accomplissement de ses différents devoirs, dans l’exécution persévérante de ses obligations. Les conversations avec lui ne dégénèrent pas en disputes. S’il tient ferme à la vérité de ce qu’il pense, il sait céder paisiblement quand les opinions sont légitimement diverses sur un sujet.

Ne croyez pas que cette maîtrise que vous admirez en lui soit l’effet d’un bon tempérament ou de quelques efforts isolés de son adolescence. Elle est le résultat d’une conquête laborieuse à laquelle se sont associés ses parents et l’un ou l’autre prêtre. Elle est surtout le fruit d’une habitude d’union à Notre-Seigneur Jésus-Christ qui s’est traduite par l’exercice régulier, quotidien, de l’oraison.

Cette force intérieure, parce qu’elle jaillit du Christ, ne risque pas de dégénérer en dureté. Chez l’homme, elle revêt un caractère naturellement protecteur et cette propension s’accentue encore chez l’homme chrétien. L’idéal chevaleresque de la défense des plus faibles s’impose à lui. Une volonté de bienfaisance est le fruit spirituel de sa force. Or, qui prend soin des plus faibles apprend vite la nécessité de condescendre, de se mettre à leur place, d’user de mansuétude.

Et c’est par cette passerelle que l’homme découvrira la douceur et apprendra à unir en lui deux vertus qui lui paraissent presque opposées. Il n’est pas encore au bout de ses surprises ! Il expérimentera alors cet empire des doux sur les cœurs de ceux qui les entourent : « Bienheureux les doux car ils possèderont la terre en héritage3 ». La douceur a le don de désarmer les courroux et de gagner les cœurs. Après avoir fait la conquête de lui-même, l’homme fort qui s’adoucit fait celle de ceux qui l’entourent.

La jeune fille chrétienne qui s’exerce chaque jour à la douceur, comme à la pratique de la vertu qui symbolise la féminité et qui est exigée par la maternité, comprend vite l’harmonisation qui doit se produire entre son extérieur et son intérieur. Elle ne peut se contenter d’une contention qui s’afficherait dans les attitudes et dans le langage mais ne correspondrait pas à ses sentiments intimes. L’intériorisation s’impose à elle si elle veut être réellement douce. Le secret de la douceur, elle le trouvera dans son imitation du Christ et de la Très Sainte Vierge Marie, dans le bienfait de ses communions eucharistiques, dans la dévotion à la Passion de Notre-Seigneur. L’école de l’héroïsme chrétien, de sainte Blandine à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, se manifestera à elle dans sa beauté.

Mais que cette conquête est douloureuse ! Comme il faut de la vertu pour demeurer en toutes occasions patiente, charitable, toujours prête à s’effacer, toujours là pour pacifier. Quelle abnégation ! L’idéal est très élevé et ne s’atteint que par d’âpres combats qui demandent une grande générosité. La force fait irruption dans sa vie d’abord comme le moyen indispensable pour demeurer douce. A l’instar des saints, il s’agit de rester dans la douceur dans des circonstances parfaitement contraires. Mais la force apparaît également comme le trophée qu’elle emporte en même temps que la douceur. Si elle est devenue une vraie douce, c’est qu’elle est alors aussi une « femme forte », car la douceur signifie un tel empire sur soi-même qu’elle suppose la pratique constante de la force. Elle aussi rayonne alors d’une personnalité supérieure, celle de sainte Geneviève devant les Huns, dont l’autorité incontestée est celle de la douceur.

Nous n’avons certes pas voulu dire ni que l’éducation des garçons se résume à l’acquisition de la vertu de force, ni que celle des filles doit seulement s’attacher à la formation de leur douceur. Mais si ces deux qualités sont, comme nous le croyons, celles qui conviennent le mieux, soit à la masculinité, soit à la féminité, nous pensons qu’elles possèdent un rôle à part pour conduire les uns et les autres. Le savoir, c’est découvrir des ressorts bien précieux de la psychologie des garçons et des filles. L’ignorer, c’est s’exposer à beaucoup de maladresses et de récriminations dans l’art déjà si complexe de l’éducation.

            Père Joseph

1 Mt 11, 29

2 J.J Olier, Introduction à la vie et aux vertus chrétiennes.

3 Mt 5,4

 

 

 

La vertu de force

          

Chers amis,

           Vertu morale surnaturelle mais aussi don du Saint-Esprit, la force est indispensable au catholique aujourd’hui autant qu’hier et peut-être même davantage. En effet, c’est la ruse du démon d’être parvenu à nous faire croire que nous sommes forts par la technique, les moyens de communication et d’information… tous ces procédés actuels qui nous donnent cette impression de tout connaître, de tout savoir et donc par là de posséder une certaine puissance : « Vous serez comme des dieux ! »  N’est-ce pas ce qu’avait promis le serpent à Adam et Eve ?

Ce péché d’orgueil – toujours le même – ne nous atteint-il pas tous ?

Mais ne sommes-nous pas plutôt devenus immensément faibles ? Incapables de poser des actes de volonté, très influençables, laissant libre cours à nos émotions, impuissants à brider notre imagination, ignorants, sensuels et sentimentaux ?

N’est-ce pas la vertu de force qui seule pourra affermir notre âme, nous faire rechercher le bien, combattre le mal, lutter contre nos peurs, garder la tête froide en ces temps de panique générale et même au besoin voir venir la mort sans la craindre ?

De quelle vertu avons-nous besoin quand la tentation « de faire comme tout le monde » nous guette ?

Quand nous sommes lassés du combat et que nous aimerions relâcher un peu la tension ? Quand ce serait si facile de fermer les yeux sur tel ou tel acte et de « laisser faire » ?

N’est-ce pas elle qui nous donnera la générosité et la grandeur d’âme nécessaire pour nous dépasser toujours plus ? Par la crainte, ne veut-on pas paralyser nos efforts, et essayer de nous faire rentrer dans un moule uniforme ? 

La force est là pour nous aider à surmonter les obstacles qui barrent notre chemin vers le ciel ; elle nous aide à supporter toutes les épreuves qui émaillent notre vie : maladies, épreuves multiples, humiliations… Elle nous donne aussi la capacité de fuir… car c’est parfois la seule solution pour ne pas tomber ! Elle est là aussi pour nous aider à entreprendre car il ne s’agit pas de rester cachés la tête sous l’aile en attendant que les moments difficiles passent. « Le royaume des cieux est emporté de force, et les violents s’en emparent1. »

Nous avons besoin de cette vertu qui modère en nous la peur, en même temps qu’elle tempère la confiance que nous serions portés à mettre en nous-mêmes. Elle nous soutient dans notre lutte contre le respect humain qui fait tant de ravages et essaie de nous mettre dans les filets des considérations mondaines et vaines.

Demandons chaque jour à Dieu qu’il répande cette vertu sur les hommes ! Que Notre-Seigneur qui le Vendredi Saint, plus que tout autre, fut le modèle des forts, nous nourrisse de son Eucharistie, pain des forts et que Notre-Dame, image parfaite de la femme forte au pied de la Croix, soit notre modèle.

Marie du Tertre

1 Evangile selon Saint Matthieu, chap.11- Verset12