Le mal ou le mystère de l’amour de Dieu

« Et à la neuvième heure Jésus cria d’une voix forte «Héloï, Héloï, Lamà sabacthàni », ce qui signifie « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

          Ces mots de Notre Seigneur au plus fort des souffrances de la Passion mettent en avant l’une des plus graves questions que l’homme se pose : celle de la nature du mal. Qui d’entre nous n’a jamais entendu cette phrase venant d’un ami non croyant : « Si Dieu existe et qu’il est bon, comment peut-il permettre le mal ? », ou cette autre que nous nous disons souvent à nous-même : « Mais qu’ai-je fait au Bon Dieu pour mériter cela ? ». La question du mal est centrale pour l’être humain dans sa quête de sens à donner à sa vie, essayons donc d’y apporter une réponse en dégageant une définition du mal, une raison de son existence et surtout un remède.

Qu’est-ce que le mal ?

Avant d’établir une distinction dans le mal, nous pouvons déjà établir qu’il ne s’agit de rien d’autre que d’une absence de bien. Est bien ce qui correspond à sa nature, ce qui atteint son but propre : le corps humain est « bon » quand il est en pleine santé, la maison est « bonne » quand elle est stable et assure un confort de vie à ses habitants, une loi est bonne quand elle protège le bien commun. Le mal sera que ce corps soit malade, c’est-à-dire privé de santé, que cette maison soit fissurée, que cette loi nuise au bien commun. Ces choses seront « mauvaises » parce que privées de leur fin, de leur raison d’être, parce qu’elles brisent l’ordre propre à chaque être.

Nous pouvons ensuite distinguer deux sortes de mal : le mal sensible et le mal moral. Le mal sensible est la souffrance que nous vivons lorsque nous nous blessons physiquement ou lorsque nous éprouvons de la tristesse. Cette souffrance est liée à notre nature humaine limitée, imparfaite, soumise à la matière. Elle nous permet d’apprendre ce qui est bien pour nous et ce qui nous nuit, elle nous est une sorte de guide dans notre vie. Nous pouvons le constater avec l’exemple de l’enfant qui doit se brûler à la flamme de la bougie pour comprendre que le feu peut être source de danger, ou encore avec la règle d’or « Ne fais pas à autrui ce que tu n’aimerais pas que l’on te fasse », qui sous-entend une volonté d’éviter de faire du mal à autrui parce que l’on connaît soi-même le prix de la souffrance. Cette sorte de mal revêt un caractère « social », guidant l’homme dans ses rapports aux autres mais aussi dans ses rapports avec lui-même en lui faisant sentir dans son être les conséquences de ses excès (boire jusqu’à l’ivresse, manger jusqu’à la maladie, …).

La seconde sorte de mal, le mal moral, établit une relation directement avec Dieu : il s’agit là du péché. On peut certes souligner que voler, mentir, tuer a des conséquences négatives pour la société, mais ce n’est que secondaire car il est directement une rébellion de l’homme contre Dieu, créateur de toutes choses et législateur suprême. Le péché est un refus de la Loi naturelle disposée par Dieu dans chaque être humain, cette Loi qui instinctivement fait comprendre à chacun la bonté ou la malice d’un acte par des sentiments tels que le plaisir ou le remords.

Que ce soit sous l’une ou l’autre forme, le mal semble s’opposer à la finalité de l’homme : le bonheur. Comment donc Dieu, lui qui est la Bonté infinie, peut-il permettre que nous souffrions et que nous l’offensions ?

Pourquoi le mal  ?

Ce « pourquoi » n’est pas une question en l’air car il est le principal obstacle à la venue de la Foi dans beaucoup d’âmes révoltées par cette apparente injustice. En effet, la réponse que nous entendons bien trop souvent est que l’existence du mal est incompatible avec l’existence d’un Dieu bon, ou même d’un Dieu tout court. On se réfugie alors dans le déisme (Dieu nous a créé mais il ne s’occupe pas de nous), dans l’agnosticisme (Dieu existe, mais il ne s’est pas révélé à nous et nous ne pourrons jamais le connaître même imparfaitement), ou encore dans l’athéisme pur. Le mal nous révolte parce que nous ne le comprenons pas, et pourtant il a tout à fait sa place dans l’ordre voulu par Dieu.

En ce qui concerne le mal sensible, nous savons par les Ecritures Saintes qu’il s’agit d’un châtiment voulu par Dieu pour punir Adam et Eve du péché originel. Ceux-ci bénéficiaient de certains dons tels que l’immortalité, l’intégrité (les passions sont soumises à l’intelligence, elle-même soumise à Dieu) et l’impassibilité (Ils ne peuvent pas connaître la souffrance). Ces dons, appelés préternaturels, ont été perdus avec le péché originel et il s’ensuit que tout homme est condamné à connaître la souffrance quotidiennement (« Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front » / « Tu enfanteras dans la douleur »). Le mal donc apparaît comme un désordre mais il permet de replacer l’homme dans un état de dépendance par rapport à Dieu. La souffrance est le prix à payer pour la faute de nos premiers parents, un moyen de remettre de l’ordre dans la Création : la faute appelle une punition qui remet le coupable à sa place de dépendance envers son supérieur et fait justice à ce dernier. Le mal sensible est donc une bonne chose puisqu’il maintient l’homme dans la considération de sa faiblesse et le pousse vers Dieu.

Que la souffrance soit permise par Dieu comme châtiment pour les péchés des hommes, soit. Mais alors, comment Dieu peut-il laisser l’homme l’offenser ? Comment peut-il laisser l’infiniment petit défier l’infiniment grand ? La réponse en un mot : liberté. La liberté est l’une des preuves de l’amour de Dieu pour nous, car elle sous-entend la faculté de connaître et donc d’aimer également, et donc d’être heureux. Or l’amour cherche naturellement à se diffuser, à se transmettre. Les passionnés le savent, eux qui ont une soif intarissable de partager ce qu’ils aiment, de le faire connaître à leurs amis. Mais aimer n’est pas du seul ressort des passions, il faut aussi une adhésion de la volonté, il faut vouloir aimer, il faut pouvoir choisir d’aimer, et c’est bien là qu’est le problème : je peux choisir d’aimer comme je peux le refuser. Refuser d’aimer Dieu, lui préférer des plaisirs passagers et vains tient plus souvent à l’ignorance et à la faiblesse qu’à de la véritable malice de notre part mais le fait est là : nous offensons délibérément un père qui nous a donné absolument tout ce que nous avons et ce père nous aime tellement qu’il se laisse écarter sans rien dire, ou presque.  Mais dans ce cas pourquoi ceux qui font le mal sont-ils si prospères, si heureux alors que les justes ne cessent de rencontrer les difficultés et la souffrance ? Si Dieu est un père aimant, ne doit-il pas combler ceux qui l’aiment de biens et priver les autres de tout ce qu’ils ont ? N’y a t’il aucune solution au mal ?

Le remède au mal

Le grand danger qui nous guette lorsque nous nous interrogeons sur la nature du mal est de le regarder sous un point de vue naturel, humain. Rien d’étonnant alors à ce que nous soyons perdus et doutant de la bonté de Dieu. Comprendre le mal, si tant est que l’on puisse réellement le comprendre, nécessite de regarder au-delà du plan terrestre, de se projeter dans l’éternité.

Nous savons par l’intelligence et par la Foi que chacun de nous sera récompensé ou puni de sa vie terrestre en allant au ciel ou en enfer ; par l’intelligence parce que la vie terrestre est absolument inconcevable sans cette éternité, et par la Foi parce que Notre Seigneur lui-même n’a cessé de nous le dire lorsqu’il était avec nous : « Bienheureux les pauvres, car ils auront le royaume de Dieu », « En vérité je vous le dis, vous pleurerez et vous souffrirez, tandis que le monde se réjouira. Mais votre tristesse sera changée en joie ».

Il est nécessaire qu’il y ait de la souffrance sur Terre pour nous rappeler que nous sommes pécheurs et pour nous élever vers Dieu. Il est nécessaire qu’il y ait de l’injustice et que les hommes de mal triomphent sur Terre pour que les justes grandissent en Foi et en Charité : Notre Seigneur lui-même a dit « Il faut qu’il y ait des scandales ». St Paul nous en donne l’explication : « Il faut qu’il y ait des hérésies parmi vous, afin que les frères qui sont d’une vertu éprouvée soient manifestés parmi vous », et St Thomas d’Aquin ajoute : « Les bons sont en effet incités au bien par les mauvais. S’il n’y avait pas eu les hérétiques, la science des saints, comme celle de St Augustin et de tant d’autres, n’aurait pas brillé dans le monde ». Dieu laisse la Terre à ceux qui le rejettent, car son royaume « n’est pas de ce monde ». Ils paieront le prix de leur infidélité dans l’éternité. A ceux qui le suivent il envoie les embûches et les souffrances sur la Terre pour les purifier, comme on purifie le métal en le faisant passer dans le feu. Mais jamais il ne les abandonne et chacun des actes d’amour qu’ils posent augmente leur part du Ciel. Et en cela nous pouvons reconnaître à quel point est grand l’amour de Dieu pour nous : plus nous rencontrons d’épreuves, plus nous avons l’occasion de gagner en « capital céleste » en renouvelant notre soumission à la volonté de Dieu.

  « Si tous les maux étaient empêchés par Dieu, il manquerait beaucoup de bien dans l’univers. Le lion ne vivrait pas, s’il ne tuait pas certains animaux ; et il n’y aurait pas la patience des martyrs s’il n’y avait la persécution des tyrans ». C’est ainsi que St Thomas d’Aquin résume la question du mal. Depuis le péché originel le mal fait partie de notre lot. Nul ne peut y échapper et la seule attitude digne d’un chrétien est de le supporter comme Notre-Seigneur a supporté sa Croix et de l’offrir comme participation à son œuvre de Salut des âmes. Ainsi le chrétien achète le Ciel pour lui mais également pour les autres, et cela n’a pas de prix :

« Vivre d’amour, C’est essuyer ta face,

C’est obtenir des pécheurs le pardon.

O Dieu d’amour ! Qu’ils rentrent dans ta grâce

Et qu’à jamais ils bénissent ton Nom. »

(Ste Thérèse de l’Enfant Jésus)

              RJ

Inhumation, incinération ou humusation… A vous de choisir!

En ce mois de novembre où l’Eglise nous fait honorer nos morts, une question revient souvent : pourquoi préférer l’inhumation à l’incinération ?

Les principes écologiques nous répètent à qui mieux mieux combien l’incinération préserve notre planète[1] ; nous avons même entendu récemment des nouveautés en la matière qui montrent que le pire est à venir : « Faisons don de notre corps à la terre en faisant de notre dépouille du… compost ! » Cela a pour nom l’humusation : un an après la mort de notre proche ce système nous permettra de récupérer 1 m3 d’humus pour fertiliser notre jardin… On entend parler aussi de liquéfaction par une dissolution du corps dans un bain chimique qui serait transformé en engrais… Jusqu’où irons-nous ? Pour l’instant en France, seules deux solutions sont autorisées par la loi : l’inhumation ou la crémation (nouveau nom donné au mot incinération utilisé davantage pour les déchets…).

Ces quelques lignes vous aideront à argumenter les discussions avec ceux qui, autour de vous, cherchent des réponses.

Penchons-nous tout d’abord sur la pratique de la crémation.

La crémation est un acte d’une rare violence qui réduit le corps du défunt en un peu de cendres. Entouré jusqu’alors des meilleurs soins et affections, ce corps est livré au supplice du feu, dans un four préchauffé à 850°C en soixante-quinze minutes…

Ne veut-on pas par là détourner le sens de la mort et éloigner des hommes les salutaires pensées qui le font réfléchir régulièrement à sa destinée ? Ne veut-on pas nous faire croire par cette destruction que tout s’arrête après la mort ?

63 % des personnes interrogées préféreraient être incinérées qu’enterrées.[2] 

37 % des défunts sont aujourd’hui incinérés ; cette pratique rentre dans les mœurs progressivement avant de parvenir à l’humusation…

Certes l’intention de tous ceux qui se font incinérer aujourd’hui n’est pas de nier la résurrection des corps. Dieu est Tout-Puissant et saura reconstituer les corps pour la résurrection finale ; mais cette pratique ne participe-t-elle pas à la perte de la foi et de l’espérance après la mort en manquant aussi à la charité chrétienne qui réclame le respect dû au corps, temple du Saint-Esprit ? Que répondre à l’argument « tu es poussière et tu retourneras en poussière » ?!

27 % des « utilisateurs » de cette méthode le demandent pour participer ainsi à « sauver la planète ». 31 %[3]  le font afin de ne pas embarrasser leur famille : la mort serait-elle un fardeau qu’il faudrait alléger pour laisser tranquille nos proches ? L’hygiène, l’économie sont aussi invoquées. On sait qu’au moment des grandes épidémies la crémation fut une pratique visant à éviter la contagion ; mais est-ce bien d’actualité ?

Si c’est parfois l’ignorance qui est à l’origine de cette pratique, on ne peut nier que cela devient un acte public ayant une grande force symbolique dans le cœur des hommes, visant à détruire la civilisation chrétienne en laissant croire que tout s’arrête à la sortie du funérarium. Il ne nous reste plus qu’à « faire notre deuil » et l’on oublie que la vie n’est pas terminée, qu’on a le devoir de prier pour nos défunts qui sont peut-être au purgatoire et réclament nos supplications. Cette disparition totale trouble d’ailleurs certains endeuillés qui se plaignent d’avoir l’impression de s’être débarrassé de leur défunt… Il ne restera plus qu’une petite boîte dans « le jardin du souvenir » ou le « colombarium » : doux mots qui veulent faire oublier la violence du feu mais qui font renier en acte les trois vertus théologales de foi, d’espérance et de charité.

Cherchons plutôt à savoir d’où vient cette mise à l’honneur et quels sont les véritables penseurs qui ont abusé les esprits crédules.

La pratique de la crémation devint à la mode en Europe à la toute fin du XIXe siècle quand les sociétés de franc-maçonnerie obtinrent du gouvernement la reconnaissance officielle de ce rite : « Nous devons employer tous les moyens pour répandre l’usage de la crémation. L’Eglise en défendant de brûler les corps, affirme ses droits sur les vivants et les morts, sur le vulgaire, les vieilles croyances aujourd’hui dissipées à la lumière de la science, touchant l’âme spirituelle de la vie future.[4]»

C’est encore une des conséquences de la Révolution dite française qui parvint à changer les esprits à force d’autoriser des actes impies.

 Notre Dame libératrice des âmes du purgatoire-Montligeon

Ne voudrait-on pas faire croire que l’homme doit maîtriser sa mort comme sa vie ? Il se croit maître de tout et voudrait oublier la Toute-Puissance de Dieu, alors les saintes pensées sur notre propre vie éternelle s’échappent en fumée…

 

Pourquoi préférer  l’inhumation ?

L’inhumation est tout d’abord un acte de Foi, Foi en la vie éternelle et dans la résurrection finale à la fin des temps.

C’est le rite qui respecte le mieux ce corps autrefois animé par l’âme chrétienne ; l’Eglise elle-même l’encense et le bénit par respect pour celui qui fut, par son baptême, le temple du Saint-Esprit. Le prêtre accompagne ce corps jusqu’à sa dernière demeure ; en grec cimetière signifie dortoir, lieu où l’on dort en attendant le réveil éternel. C’est un lieu d’Espérance

Ce corps a combattu pour remporter la victoire finale. Il était joint à l’âme pour conquérir le ciel. Ce n’était pas une simple enveloppe et l’Eglise nous dit qu’il participera plus tard au sort éternel heureux ou malheureux de l’âme. Il mérite donc notre respect.

Ensevelir les morts fait partie des miséricordes corporelles ; c’est un acte de charité que nous accompagnons de nos prières pour l’âme de notre défunt.

Par l’inhumation le corps retourne à la poussière, cette dissolution n’atteint pas le principe de la vie car notre âme est immortelle.

Que disent les traditions et l’Eglise du respect dû aux corps de nos défunts ? 

Déjà l’Ancien Testament nous parle de Tobie qui ensevelissait les morts au péril de sa vie. L’Antigone de Sophocle préfère mourir que de laisser son frère sans sépulture. Sous Charlemagne en 789 la crémation est interdite et est un châtiment réservé aux hérétiques. Ce n’est que lors des périodes de décadences que les Romains ont adopté la crémation. Cet usage a été conservé sans interruption et universellement dans l’Eglise.

Le droit Canon[5] stipule qu’« il est interdit à un chrétien de demander à être incinéré et nul n’est tenu de respecter cette volonté. »

Le 19 mai 1886, le Saint Office[6] promulgua un décret interdisant la crémation des corps. Le Pape Pie XI écrit le 19 juin 1926 que la crémation est « un rite barbare, impie et scandaleux, gravement illicite qui répugne non seulement à la piété chrétienne mais à la piété naturelle[7]. »

Dans le code promulgué par le Pape Jean-Paul II en 1983, on trouve cette nouvelle loi, contradictoire avec la tradition constante de l’Eglise : « l’Eglise recommande vivement que soit conservée la pieuse coutume d’ensevelir les corps des défunts ; cependant elle n’interdit pas l’incinération, à moins que celle-ci n’ait été choisie pour des raisons contraires à la doctrine chrétienne[8]. »

            Préférerons-nous obéir à la tradition millénaire ou sacrifier au nouveau dieu de l’écologie par un retour anonyme dans le giron de la Terre-mère ?

            Face à un monde de plus en plus hostile au christianisme et à ses pratiques, ne cédons pas aux forces occultes qui voudraient nous faire perdre de vue la vie éternelle qui n’aura point de fin.              Marguerite-Marie

[1] Argument très discutable  si on compare avec une inhumation en pleine terre.

[2] Le Monde – 4/10/2018

[3] CAIRN Info

[4] Note de Mgr Chollet, archevêque de Cambrai – 1887

[5] Droit canon 1917

[6] Congrégation de la Curie romaine

[7] Actes de Pie XI, T. III

[8] Canon 1176

Vous avez des soucis?

« Le règne de Jésus Christ reçoit sa force et sa forme de l’amour divin : aimer saintement et dans l’ordre, voilà où il se fonde et se résume. Le reste en découle nécessairement : être inviolablement fidèle au devoir, n’attenter en rien au droit d’autrui, mettre les soucis terrestres à leur juste place, donner à l’amour de Dieu la priorité sur tout le reste[1] »

Voilà tout un programme que le Pape Léon XIII, comme un bon père, a établi pour ses enfants. C’est le secret du bonheur.

Cependant aujourd’hui lors des discussions avec les uns ou les autres, on peut constater, que, quelque soit le milieu social ou l’âge de l’interlocuteur, tous, nous avons tendance à nous laisser submerger par nos soucis.

Impossible alors de trouver la liberté d’esprit pour mettre chaque chose à sa place et parvenir à la joie des enfants de Dieu. Joie de s’émerveiller des beautés de la nature, paix donnée par l’amitié avec Dieu, sérénité devant l’avenir comme un enfant abandonné sur l’épaule de son père, bonheur d’appartenir à la grande famille que forme l’Eglise catholique, reconnaissance devant tous les dons reçus….

Non, tout cela échappe de plus en plus aux esprits envahis par l’angoisse de l’avenir, la peur de l’autre, la crainte de perdre, l’amertume vis-à-vis de la société et l’inquiétude pour ses enfants…

Pour faire simple, classons en trois parties les soucis qui se présentent :

A) Ceux qui rongent et qui nous font perdre de vue l’essentiel : Le réchauffement climatique, la pollution,… On dirait qu’on essaie de nous distraire en nous assénant avec force et ténacité ces assertions plus ou moins vérifiées… Certains en ont fait un véritable « dada » et y consacrent toutes leurs conversations ; ils en oublieraient même l’essentiel…

Combien de fois par jour consultons-nous notre téléphone portable, que – par un tour de force extra-ordinaire- nous autorisons à nous communiquer des informations « choisies »qui vont augmenter notre taux de cortisol[2] ?

B) Les considérations sur les mœurs actuelles, et même les questions politiques peuvent nous apparaître comme des questions essentielles et il est bon que ceux qui ont les moyens d’action fassent tout ce qu’il leur est possible mais quand nous sommes impuissants, n’oublions pas que le grand moyen accessible à tous, reste la prière. Dieu nous a montré de multiples fois dans l’histoire de l’humanité les vertus de ce moyen qui apaise le cœur en suppliant Celui qui est le maître de toutes choses.

C) Ceux qui nous touchent personnellement : problèmes personnels, famille, santé, travail, …

            Certains portent réellement une lourde croix : la perte d’un être cher, la maladie ou des épreuves fort douloureuses les accablent. A ceux-là nous ne pouvons que conseiller de pratiquer la dévotion aux Saintes plaies de Notre-Seigneur et de se mettre sous la protection de Notre-Dame avec confiance.

            D’autres se croient vraiment très éprouvés mais ne se rendent pas compte qu’ils se sont fabriqué à eux-mêmes une « croix »…  En effet en recherchant dans un moment de calme, la racine de tous nos soucis, nous nous apercevons que celle-ci se trouve bien souvent en nous-mêmes : nous ressassons comme des slogans des paroles de culpabilité, de manque de confiance, d’esprit vengeur, de regrets…

            – Prenons le temps  de retrouver la paix. C’est en particulier lors d’une bonne retraite[3] que nous pourrons faire un retour sur nous-mêmes en analysant les véritables causes des maux qui nous rongent.  

Avez-vous remarqué combien souvent quand nous analysons notre colère nous nous apercevons que, bien plus que le prochain, c’est nous-mêmes qu’il faudrait accuser ? Car bien souvent c’est nous qui, à l’origine, nous y sommes mal pris… 

Avez-vous noté combien de fois nous nous sommes fait des soucis inutiles en imaginant tant et tant de catastrophes, d’accidents ou de maladies qui pourraient arriver à l’un ou à l’autre, en prêtant tant et tant d’intentions à des gens qui n’en ont pas la moindre idée, en anticipant tant et tant d’événements sans penser que le pire n’arrive pas toujours… Si Dieu prenait au mot les fruits de notre créativité en matière de catastrophes… que d’épreuves !! N’oublions jamais quand « la folle du logis[4] » se met en route de la faire taire immédiatement en récitant lentement un Ave Maria qui nous remettra les idées en place ou la Prière à Saint Michel [5] qui saura éloigner les tentations et les dangers !

            – Ensuite prenons l’habitude de pardonner à tous ceux qui  nous ont blessés : « pardonnez-nous comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés »… Disons-nous vraiment cette prière avec sincérité ? L’être humain est capable de tomber gravement malade rien qu’en ressassant des amertumes…

            – Enfin demandons pardon à Dieu de tout notre cœur et soumettons-nous  à sa divine volonté.

En réalisant avec lucidité cette démarche nous nous exerçons à un véritable esprit de pauvreté : parvenir à nous détacher de notre volonté propre pour adhérer à celle de Dieu. Offrir son avenir à Dieu, non pas en se cachant la tête sous l’aile mais, après avoir fait tout ce que Dieu nous demande, Lui abandonner le reste en s’en détachant. Ne pas se laisser gouverner par nos incohérences mais commencer sa journée par un véritable acte d’abandon et la récitation de la Prière des Apôtres de tout notre cœur.

Mettons de l’ordre dans ces « soucis » pour ne pas perdre de vue l’essentiel et prenons conscience que notre seule véritable préoccupation doit être celle de notre vie éternelle en premier lieu, avec notre époux (se). Prions ensuite pour ceux qui sont sous notre responsabilité directe (enfants) et indirecte (parents, famille, amis, paroisse, voisin, village, collègues, Eglise, pays). Faisons en effet tout ce qui est en notre pouvoir  mais au seul niveau qui nous concerne : prière, sacrifice, exemple, devoir d’état et enfin confions tout  au Sacré-Cœur. Notre-Seigneur a gagné la course de relais : c’est notre secret puisque personne ne le sait plus et c’est ce qui nous aide à garder le sourire au milieu des pires tribulations !

Rayonnons de la vraie joie en esprit de gratitude envers notre Dieu qui nous a tant donné ! « Vis le jour d’aujourd’hui, Dieu te le donne, il est à toi.
Vis le en Lui.[6] » Le démon, quand il a épuisé toutes ses autres armes sans succès envoie l’épreuve du découragement… Alors ne nous laissons par prendre dans ce filet et recourons à la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus :

«  Le Sauveur nous a avertis : A cause des progrès croissants de l’iniquité, la charité d’un grand nombre se refroidira. En présence de tant de maux qui, aujourd’hui plus que jamais, troublent si amèrement les hommes, les familles, les nations, le monde tout entier, où chercher un remède, Frères ? Peut-on trouver une dévotion qui l’emporte sur le culte du Cœur de Jésus, qui réponde plus parfaitement au caractère propre de la foi catholique, qui soit plus apte à subvenir aux besoins actuels de l’Église et du genre humain ? Quelle dévotion plus noble, plus douce, plus salutaire que celle là, dont l’objet est la charité divine elle même ?[7] »

Confiance ! Un jour le Sacré-Cœur reprendra ses droits sur la terre toute entière ! Il viendra juger les vivants et les morts et son règne n’aura pas de fin.

Espérance Clément

[1]Encyclique «Tametsi futura prospiscientibus » du 1er novembre 1900 Sur Jésus-Christ Rédempteur – Léon XIII

[2] Le cortisol est considéré comme l’hormone du stress.

[3] Calendrier de retraites sur : https://laportelatine.org/activites/retrait/retrait.php

On peut aussi s’adresser au Couvent Saint François, 78 passage de la Marcille 69910 Villiers Morgon

[4]« L’imagination est la folle du logis.» Malebranche

[5] Prière à Saint Michel Archange que vous trouverez sur notre site : http://foyers-ardents.org/dans la rubrique : Les prières des familles catholiques.

[6] http://foyers-ardents.org/category/les-prieres-des-familles-catholiques/

[7] Encyclique Haurietis Aquas du Pape Pie XII sur le Culte du Sacré Cœur de Jésus

Témoignage

« La retraite pour les couples nous paraît très importante, indispensable après quelques années de mariage. Elle n’est pas du tout conçue uniquement pour des couples qui seraient en crise. Elle a pour but premier de remettre les époux devant les grandes réalités et les belles grâces de leur foyer. De leur faire découvrir ou redécouvrir la vérité de la parole de saint Paul : « Ce sacrement est grand, dans le Christ et dans l’Eglise. » 

Ces mots résument parfaitement ce que nous avons vécu en ces quelques jours passés à Enney[1].

Mon époux avait pris l’habitude, depuis notre mariage en 2012, de faire une retraite de St Ignace chaque année ou presque. Quel vertueux mari, me direz-vous ! Oui, mais quel décalage quand il rentrait ! Il était tout plein de belles et bonnes résolutions et évidemment il ne pouvait pas tout me raconter par le menu. De mon côté, je restais platement avec les bébés et je n’avais pas grandi du tout spirituellement. La seule chose que j’avais fait, c’était d’accepter de le laisser partir, et quand il s’agit du lendemain de Noël, ce n’est pas évident.

Donc, nous nous sommes dit qu’il fallait faire une retraite de couple, pour être tous les deux devant le Bon Dieu et en ressortir ensemble sanctifiés.

Bien sûr, ne croyez pas que ce soit facile de partir en retraite de couple, il faut « caser » tous les enfants, (merci aux amis du MCF), prendre une semaine qui n’est pas une semaine de vacances, et le diable n’est que trop heureux de nous ennuyer jusqu’au dernier moment.

En France, Mérigny[2] propose des sessions de foyers, où on peut venir avec son bébé qui est gardé le temps des méditations. A Enney, en Suisse, il s’agit d’un vrai temps de retraite en silence et les couples sont séparés. Nous nous retrouvons aux mêmes endroits (chapelle, salle d’instruction, réfectoire…) mais nous ne sommes pas l’un à côté de l’autre, nous n’échangeons pas nos impressions. Nous réfléchissons seuls pendant nos méditations, nous préparons notre confession sans être dérangés, nous écoutons pendant les repas des textes de Mgr Lefebvre ou de M. l’Abbé François Dantec, qui a beaucoup écrit sur le mariage. Ce silence est très important et très salutaire. C’est un silence qui concerne la voix, mais aussi les yeux et surtout l’imagination. Bien sûr, pas de téléphone ni d’internet et, en guise de récréation, soit un livre pieux, soit la montagne sur laquelle est bâti le grand chalet qui nous accueille. C’est très bon pour l’humilité car finalement le monde continue de tourner sans nous, et nous, nous sommes juste préoccupés du Bon Dieu.

Dès le 2ème jour, on se prépare à la confession, (générale ou non, comme les retraitants le souhaitent) et le 3ème jour, après le repas de midi en silence, les couples se retrouvent durant une heure et demie pour faire le point sur leurs résolutions, d’une part personnelles, car le conjoint peut beaucoup aider à mieux les appréhender, (on est parfois très indulgent sur nos propres défauts et intransigeant sur ceux des autres), d’autre part résolutions conjugales, avec les lumières déjà reçues pendant le début de la retraite, souvent via le prêtre. Ensuite, silence à nouveau, jusqu’après le dîner où nous retrouvons ensemble le prêtre qui va nous écouter et nous aider.

Chaque jour, nous pouvons voir individuellement le prêtre. Pour ma part, j’avais l’impression que tout allait bien dans ma petite vie et que je n’aurais rien à dire. Au final, heureusement qu’on a un temps imparti pour parler, sinon j’y serais encore !

Nous terminons la retraite par un Salut du Saint Sacrement, très profond et recueilli, un vrai cœur à cœur avec Jésus pour lui confier ce temps béni et le remercier. Puis il y a le dernier repas pris en commun avec les autres retraitants.

En ce qui concerne le contenu spirituel et concret, nous n’allons pas vous faire le plan exact des instructions, vous le découvrirez par vous-mêmes quand vous irez sur place.

Avant tout, je veux redire à quel point cette retraite est concrète. Elle a les aspects d’une retraite de St Ignace mais en « plus facile » peut-être, en moins formelle plutôt. Déjà il n’y a pas d’élection, car comme disent les prêtres, c’est déjà fait, nous sommes mariés pour la vie ! Mais surtout les prêtres qui nous parlent, ou ceux que nous écoutons pendant les repas, donnent beaucoup d’exemples vrais, tirés de leur grande expérience des foyers qu’ils ont côtoyés. Bien sûr, le meilleur exemple reste la Sainte Famille, mais nous avons eu vraiment des instructions spécialement axées sur la pratique des sacrements jour après jour, sur la tendresse entre époux et l’amour conjugal, sur les principes d’éducation chrétienne selon les âges. Quand je suis sortie, j’ai dit à mon mari: « C’est fou, j’ai tout compris. » J’avais peur qu’on s’égare dans la Somme Théologique. On s’appuie dessus, mais on reste bien les pieds sur terre.

Quelques points qui nous ont semblé importants et enrichissants :

La création de la famille

Nous devons aller au Ciel ensemble, l’un ET l’autre, l’un PAR l’autre et pas l’un sans l’autre ou l’un à côté de l’autre. Il nous faut nous attirer l’un par l’autre au Ciel, l’objectif est de rentrer là-haut dans la grande famille de Dieu. Nous devons donc imiter Dieu tout particulièrement par le don : échange des consentements qui est la manifestation de notre amour réciproque, par la vie matrimoniale et par l’œuvre de procréation et d’éducation. Vous connaissez tous, les deux piliers du mariage : la procréation et l’amour mutuel, remède à la concupiscence. Il y a un ordre mais les deux sont très importants.

A partir de là, nous pouvons déjà entrevoir que la famille est la base de la société, que toute l’humanité dérive de ce modèle-là et qu’il faut donc la défendre encore plus aujourd’hui, défendre la vie naissante et aussi défendre le sacrement du mariage, non seulement par son caractère hétérosexuel mais aussi pour son indissolubilité.

La collaboration des époux

L’union fondée sur l’amour mutuel a pour but de combler le nombre des élus au Ciel, d’où procréation et éducation, et cet amour aide les époux à se sanctifier dans la vie commune. Dieu a élevé cette union au rang de sacrement et le signe sensible de ce contrat est l’alliance.

« Femmes, soyez soumises à vos maris… et vous maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Eglise ». On oublie souvent la fin de la phrase et souvent les cœurs féminins regimbent un peu contre le début… Déjà il faut appréhender tout cet enseignement, ensuite en vivre : avoir cette vraie unité de cœur et d’esprit, Dieu a voulu cette union supérieure. Ne faire qu’UN. C’est important de renouveler son consentement tous les jours. Nous avons un but commun : faire notre salut, ensemble. Sans compter que nous sommes les collaborateurs du Christ pour le salut de nos enfants également.

Voyons comment agir au quotidien avec son conjoint : la collaboration entre époux est une science et il faut y travailler en ayant une inviolable fidélité à tous les devoirs de notre état.

L’imitation

L’enfant apprend en voyant ses parents vivre leur mariage au quotidien. L’abbé ajoutait : « on peut être une maman qui prie toute la journée et court partout faire ses bonnes œuvres, mais ce n’est pas cela être une sainte maman. Une sainte maman sait faire la cuisine chez elle tout d’abord ! ». Les premières années sont souvent pleines d’élan et de générosité, ne laissons pas la routine et la tiédeur (conjugale et spirituelle) s’installer ! Il y aura les défauts de l’autre, les petites déceptions, le naturel qui revient au galop, mais soyons bienveillants et charitables. La vie intérieure nous y aidera beaucoup.

Quelques pistes concrètes pour ce thème (ce sont aussi des vertus de la famille chrétienne) :

  • le respect de Dieu et de ses propres parents (respect aussi de la hiérarchie, surtout cléricale et religieuse)
  • l’obéissance prompte et joyeuse (pour se lever le matin par exemple)
  • l’esprit de sacrifice (montrer l’exemple pour internet / la télévision…)
  • l’amour de la pureté (la chair doit être disciplinée – alcool, tabac…)
  • la joie familiale (« Un saint triste est un triste saint »)

Nos abbés ont insisté sur un dernier point qui est l’équilibre : celui du couple, de la famille. Attention à une trop grande rigueur et à un trop grand laxisme.  L’important est que tout le monde puisse s’épanouir sous le regard du Bon Dieu. Ne pas hésiter à encourager ses enfants. Oui, le monde qui nous entoure n’est pas facile, mais ensemble et surtout avec la grâce du Bon Dieu qui aide tous les parents du monde, nous pouvons et nous devons y arriver.

La tendresse entre époux

C’est assez surprenant de la part de prêtres, mais nos prédicateurs ont énormément insisté sur ce point

Ne pas laisser se coucher le soleil sur une colère dans le couple, un malentendu, c’est si important. Déjà pour bien dormir et ensuite pour la construction du foyer. Bien sûr, le couple, ça s’entretient.

Le don total des deux époux est magnifique, c’est une image très lointaine du don de Dieu. Mais il y a aussi toutes les petites attentions, la tendresse, l’affection, les petits riens qui agrémentent les journées. (Ne pas enfoncer l’autre qui rentre d’une journée difficile et a besoin de se reposer un peu, encourager l’épouse qui a passé une grosse journée à faire son ménage…) C’est aussi une manifestation de l’amour du Christ et de sa bonté, dont nous avons une petite idée dans l’Evangile. Tout simplement, cette bonté, cette humanité, cette bénignité de Dieu : tout ce qu’on peut faire par charité envers l’autre est imitation de Jésus-Christ.

                Enfin, il y a ce fameux « devoir de s’asseoir » qui ne devrait justement pas être un devoir, mais un vrai plaisir ! Joie de se retrouver, juste tous les deux sous le regard du Bon Dieu, sans les bébés qui hurlent, s’apprêter, se faire belle pour sortir en amoureux avec son mari, mettre pour une fois les pieds sous la table si on va au restaurant, ou tout simplement préparer un bon petit dîner à la maison, une fois les enfants couchés, prendre ce temps là au moins une fois par mois, pour parler de tout mais surtout pour prendre soin de notre couple. C’est un véritable tremplin pour mieux repartir, avec courage et confiance !

 Que de grâces !

Nous pouvons parler de grâces de la retraite bien sûr, mais celles-ci vont rester personnelles et ne pas se voir automatiquement et immédiatement dès notre sortie. De plus, le diable qui était déjà bien assidu à nous empêcher d’aller en retraite, est de retour après cette parenthèse divine, et il ne perdra pas une minute pour nous mettre des bâtons dans les roues.

Le chapelet à genoux

Une remarque tout d’abord très pratique et très concrète me vient : bien sûr, nous disions chaque jour notre chapelet, mais souvent dans les transports, c’est-à-dire assis en allant à l’école ou au travail ou alors le soir, assis sur une chaise devant l’oratoire familial parce que nous sommes fatigués. Rentrés à la maison, nous décidons de garder cette position à genoux qui honore Dieu. Une fois de plus, montrons aussi l’exemple à nos enfants. Bien sûr, à 2 ans et demi, un enfant ne va pas rester à genoux sans broncher et réciter son chapelet médité. Nous avons décidé de dire avec nos 4 petites entre 6 ans et 10 mois, une dizaine de chapelet avec elles. Le secret, c’est de chanter le dernier « je vous salue Marie », elles aiment beaucoup ce moment. Et la Sainte Vierge doit sourire là-haut d’entendre ce chœur qui chante un peu faux…      

La méditation

Pensons aux invités que nous recevons et que nous choyons autant que nous pouvons ; faisons de même avec Dieu, ne le laissons pas tout seul, surtout après L’avoir reçu dans la communion.

Cet aspect de la méditation, nous l’apprenons à la retraite. S’arrêter, réfléchir, prier, adorer Dieu, le remercier pour tous ses bienfaits passés et à venir. Je le répète : nous avons des vies à cent à l’heure, encore plus aujourd’hui avec les progrès techniques, les voyages quasi instantanés, internet où d’un clic vous pouvez acheter la lune. Comme cela fait du bien d’être juste avec le Bon Dieu, et un petit peu son conjoint, de se recentrer sur l’essentiel, d’être dans le silence pour contempler ne serait-ce que la neige qui recouvre le chemin qui mène au chalet. Comme tout nous paraît clair et pur !

L’examen de conscience

Pour nous, l’examen de conscience se résume souvent à celui des enfants ; chaque soir, nous disons tout fort : « est ce que j’ai bien travaillé à l’école, est-ce que je suis venu mettre la table quand maman me l’a demandé… » ? Mais l’examen de conscience des adultes est plus sévère forcément et il faut donc s’y remettre, au quotidien, pour ne rien oublier et avoir une vraie horreur du péché.

On trouve dans le petit livre bleu un petit examen à faire quotidiennement pour se maintenir en componction : d’abord remercier Dieu pour la journée reçue, demander la grâce de reconnaître ses péchés, examiner concrètement ce que j’ai fait dans ma journée (par exemple n’ai-je pas manqué à mon devoir de prière, de charité, d’état), demander pardon à Dieu pour ses péchés (il ne faut ainsi jamais s’endormir sans un acte de contrition) ; enfin prendre des résolutions pratiques pour se corriger et éviter de retomber dans le péché.

L’examen particulier chaque jour permet donc de se corriger sur tel défaut précis en trouvant le moyen concret pour s’en défaire. La pénitence nous y aide puisqu’il s’agit de se priver de quelque chose pour l’amour de Dieu. Avec le ferme propos et en posant des actes renouvelés, on peut devenir meilleur. Et il ne faut pas oublier que plus nous sommes malheureux plus la miséricorde de Dieu se penche vers nous. Pensons à Jésus et ne nous habituons jamais à Dieu fait homme pour nous (pour les païens c’était une folie d’admettre cela !).

Les résolutions

Si tout ce que nous venons de dire vous semble impossible, que vous êtes loin du tableau du couple idéal (du moins c’est ce que vous pensez), que vous avez l’impression d’avoir raté l’éducation de vos enfants, il ne faut pas oublier l’amour infini de Dieu, son infinie Providence.

Faites une bonne retraite de couple si vous le pouvez, écoutez, méditez, adorez le Bon Dieu et prenez des bonnes résolutions bien concrètes pour vous et votre famille. C’est le clou de la retraite, nous en parlons longuement avec le prêtre. Elles nous permettent de nous libérer de certains « esclavages », n’ayons pas peur des mots, sur des points très concrets comme le respect humain, la décence, le bavardage, la paresse, etc… Il y a trois sortes de résolutions : celles concernant la piété (la vie spirituelle), celles concernant l’étude (la formation doctrinale), enfin celles qui relèvent de l’action (devoir d’état mais aussi engagement associatif ou spirituel).

Nous terminerons avec les mots qui achèvent le manuel de M. l’Abbé Delagneau[3] :

                « Retenez quelques mots clés de cette plaquette, qui seront des mots d’ordre pour tous les jours :

                Ordre : Dieu premier servi et chacun à sa place complémentaire,

                Joie de vivre : se donner pour le bien des autres sans craindre le sacrifice de soi

                Equilibre : sur le plan humain et social

                Organisation : pour avoir une vie calme et paisible

                Se démarquer de l’esprit du monde, de ses modes, de ses suggestions, tout en vivant dans le monde.

                Que Dieu vous bénisse et vous assiste ! »

Voilà pour les grandes lignes de cette retraite de couple dont nous rendons grâces NUNC ET SEMPER.

Louis et Agnès Lafargue

[1] Enney : Lieu où se trouve une Maison de retraites spirituelles en Suisse – Domus Dei – Route de la Vudalla 30 – 1667 Enney

[2] Mérigny : Lieu de retraites spirituelles assurées par la Fraternité de la Transfiguration en France – Le Bois – 36220 Mérigny

[3]  Conseils pour réussir une famille chrétienne aujourd´hui  – M. l’abbé Delagneau – Marchons Droit N°124

Aimer l’Eglise en vérité

Pour ne plus savoir ce que veut dire aimer, nombreux sont ceux qui ne savent plus ce que signifie aimer l’Église. Parce qu’ils réduisent l’amour au seul sentiment, il n’est plus alors question que de se sentir en communion avec le pape, communion que certains vous reprocheront de ne pas avoir : « vous êtes contre le pape, donc vous n’aimez pas l’Église ! » Le comble apparaît lorsque ceux-là mêmes qui ainsi vous condamnent si promptement n’hésitent pas à s’affranchir des préceptes et enseignements de l’Église, arguant du primat de la conscience : ils ne réalisent pas combien ils crucifient l’Église !

Les trois premiers commandements l’ont suffisamment enseigné, tout amour authentique se décline en un triptyque : admirer, respecter, et servir jusqu’au don total de soi. Ainsi en va-t-il de l’amour de l’Église.

Aimer l’Église, c’est d’abord adorer la transcendance divine qui la constitue, pour en devenir participants. En tout lieu et à travers tous les temps, L’Église n’a d’autre raison d’être que de transmettre Notre-Seigneur Jésus-Christ à tous les élus de Dieu afin que ceux-ci, engendrés dans l’Église, soient incorporés au Christ par la foi, et ainsi rendus participants du royaume de Dieu. A cette fin, l’Église garde et transmet fidèlement les vérités divines révélées par le Christ, vérités qui comme lui sont les mêmes hier, aujourd’hui et toujours[1]. Transcendant la vie humaine, l’Église transmet donc la foi vive, ou vie de la grâce, véritable participation à la vie filiale qui habite le Verbe éternel de Dieu fait chair. Aimer l’Église, c’est se prosterner devant ces immenses réalités, pour les recevoir à deux genoux. Faut-il détailler quelque peu ?

L’amour authentique de l’Église consiste à recevoir filialement ce que cette Mère et Maîtresse des âmes transmet, quels que soient les temps ; sa Tradition donc. Aussi n’aime-t-il pas l’Église en vérité, celui qui prétend faire évoluer la Vérité éternelle au gré des hommes, plutôt que de faire évoluer les hommes vers la Vérité éternelle. A plus d’une reprise, saint Paul, le grand prédicateur de l’Église, condamne ces derniers[2]. Ainsi donc, la première marque d’un amour authentique de l’Église est la fidélité à l’enseignement pérenne de l’Église. Cette allégeance filiale, saint Paul l’appelle l’obéissance de la foi[3]. Sans elle, il est impossible de plaire à Dieu[4].

  • Aimer l’Église, c’est encore adorer ce qui la vivifie entièrement, à savoir le sacrifice de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; c’est vouloir tout rassembler à l’ombre bienfaisante de la Croix rédemptrice. Tout restaurer dans le Christ, disait saint Pie X ; et nous pourrions préciser avec saint Paul : tout restaurer dans le Christ crucifié[5]. A l’inverse, celui qui à coup de sagesse humaine tend à rendre vaine la croix du Christ[6] ne peut prétendre aimer l’Église : aux dires de saint Jean, il dissout le Christ, et relève donc de l’antéchrist[7].
  • Aimer l’Église, c’est aussi se prosterner devant le mystère d’Incarnation que Dieu continue en ses ministres, précisément en tant qu’ils nous transmettent l’enseignement pérenne de l’Église et la vie de grâce découlant de la Croix du Christ. Plus que l’amour du pape, des évêques, et des prêtres, il s’agit donc de l’amour de la papauté et de la romanité jusqu’en ses dernières fibres, quelle que soit la faiblesse des pasteurs ; il s’agit de l’amour du Christ représenté par ses vicaires, et non des vicaires lorsque ceux-ci évincent le Christ : seul le Christ est la véritable tête de l’Église.

Tout amour d’admiration s’incarne dans une attitude de respect. A ce dernier aspect peut d’ailleurs se mesurer l’authenticité d’un amour, ici de notre amour pour l’Église. Ainsi, parce qu’elle aime, l’Église développe un culte à l’endroit de ses dogmes. La non incinération ou la vénération des reliques sont par exemple un culte rendu au dogme de la résurrection des corps, tout comme la génuflexion et le respect entourant la communion magnifient le dogme de la présence réelle. Toujours, l’Église a entouré de respect l’exercice de sa piété, fût-elle populaire. Et si l’on en vient au renouvellement non sanglant du sacrifice de la Croix offert quotidiennement sur les autels, alors l’Église démultiplie les marques extérieures d’adoration et de respect, car nulle part son amour n’est plus intense. Indépendamment de toute donnée doctrinale – qui garde son importance première – on ne peut donc dire qu’il relève de l’amour de l’Église de désacraliser la liturgie à coup de danses, de rap ou de guitares, fût-ce en présence du pape. Ils ne sont pas plus amis de l’Église, ceux qui ont méprisé la piété populaire, au point de la faire mourir en nos contrées. Les tristes exemples, hélas, pourraient-être multipliés…

L’admiration comme le respect peuvent rester extérieurs. S’ils sont au fondement de l’amour, ils ne sont pas encore l’amour dans sa plénitude : l’amour engage. Il s’épanouit donc dans le service, jusqu’au don total de soi. « Il n’y pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime[8]». Cela s’applique encore à l’amour de l’Église. Le chrétien n’est pas seulement appelé à recevoir de l’Église, mais à s’y donner ; car il n’est pas seulement appelé à être aimé, mais à aimer. Il s’y donne ordinairement dans la vocation concrète qui est la sienne, de père ou de mère de famille chrétienne par exemple, sans oublier pour autant le service paroissial. Si vivre au quotidien cette vocation réclame courage et don de soi, il en faut bien davantage encore pour continuer à transmettre aux siens cette vie ecclésiale pure de toute compromission avec le monde, malgré les courants dominants qui ont envahi tant de chaires et de sanctuaires ! Ils s’avèrent être les véritables fils aimants de l’Église, ceux qui ainsi persévèrent à temps et à contre temps, en une époque où les hommes, pour ne plus supporter la saine doctrine, se donnent des maîtres à foison [9]. En eux l’Église se perpétue, en leurs foyers apparaîtront les vocations de demain ; pourvu que de tous ces trésors, ils ne se fassent pas les propriétaires arrogants, mais les bénéficiaires pleins de reconnaissance.

Et si pour leur fidélité ils sont persécutés, bienheureux sont-ils. Oui, « Heureux êtes-vous, lorsqu’on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.  Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux : c’est ainsi qu’ils ont persécuté les prophètes qui ont été avant vous[10] ».

Abbé  P. de LA ROCQUE


[1] He 13, 8

[2] Ga 1, 6-9 ; Ro 16, 17-18 ; 1 Co 15, 1-3, etc.

[3] Ro 1, 5 ; Ro 16, 26 ; 2 Co 10, 15).

[4] He 11, 6

[5] 1 Co 2, 2.

[6] 1 Co 1, 17

[7]  1 Jn 4, 3

[9] Jn 15, 13  [9] 2 Tm 4, 2-4

[10] Mt 5, 11-12

La littérature, lieu de rencontre. Se construire par la fréquentation des auteurs

« La lecture de tous les bons livres est comme une conversation avec les plus honnêtes gens des siècles passés »

René Descartes, Le discours de la méthode (1637)

            Pourquoi la littérature ? Pourquoi, depuis l’aube de la civilisation, ce besoin, plaisir pour beaucoup, de se plonger dans la parole héritée du passé?

            Car la littérature est avant tout une parole : parole travaillée, polie par l’art, étudiée pour porter au mieux et jusqu’au cœur de l’homme l’idée qu’elle exprime. Mais de parole, notre époque n’en retient qu’une : celle qui produit. Efficace, elle ne fait son retour dans les pédagogies et les compétences à maîtriser en université que pour assurer à l’élève ou à l’étudiant un pouvoir de conviction ; autrement dit, on ne lui voit d’utilité qu’en tant qu’outil (en tant qu’arme ?) pour assurer sa domination. L’avocat parle pour utiliser le droit à l’avantage de son client : parole souvent creuse bien qu’habile, dénuée de morale, fruit d’une justice qui a perdu son sens. Le commercial parle pour enrichir son entreprise : parole intéressée, restreinte aux choses matérielles, ne voyant l’homme que comme un rouage au sein d’une industrie. Le politicien parle pour séduire : parole mensongère, souvent terre-à-terre, faite d’apparences, de mots qui sonnent, orpheline d’une vraie pensée et ennemie de la véritable intelligence. Que dire encore ? La seule parole appréciée pour elle-même serait-elle celle du rire et des comédiens ? Ou bien la vénalité et la soumission aux poncifs idéologiques sont-ils parvenus à museler ce dernier rempart de l’homme contre la loi du plus fort, l’humour qui touche juste ?

Étrange paradoxe ! Notre siècle est bavard, verbeux, insupportable dans ses insipides logorrhées ! On nous sert de belles paroles, des discours et des mots, quand nous avons soif de sens, de conversations et de paroles belles. Radio, télévision, Internet, journaux, répandent dans nos cerveaux mille mots mal choisis, pleins de vide, abordant pour thèmes les plus élevés les dernières manifestations, les scandales de la scène et je ne sais quelle crise géopolitique incompréhensible au profane, mais dont, rassurez-vous, on nous livre aussitôt l’interprétation orthodoxe. Violence tyrannique à nos intelligences, et pourtant, il faut l’admettre, à laquelle on s’accoutume bien trop facilement.

            Que faire alors ? Comment assainir nos esprits et leur redonner goût à la belle pensée ? Comment prémunir nos enfants contre la laideur confortable des mots creux qui s’enflent ? C’est bien évident, me dira-t-on. Il faut lire, faire lire, et bien choisir les livres. Il faut mettre nos enfants dans les bonnes écoles, chasser les moyens modernes qui déversent dans la maison, la voiture et ailleurs leurs inépuisables insanités. Il faut s’assurer que personne ne soit en anémie intellectuelle et lui fournir le livre qu’il faut, qui lui plaira et saura l’enrichir.

Je suis bien aise de vous l’entendre dire ! Toutes ces résolutions sont justes, nécessaires et salutaires, et je ne vous ferai pas l’injure de tenter de vous en convaincre à nouveau. Mais j’aimerais réfléchir un peu plus loin avec vous, afin de découvrir les causes profondes de l’amour des lettres et leur effet sur la formation de la personnalité.

            Pourquoi la littérature ? me suis-je demandé. Pourquoi cet instinct, auquel nos générations semblent se soustraire, de reprendre pour soi les mots du passé ? Pourquoi ce désir, moins général mais constant, d’écrire à son tour ?

            C’est, me semble-t-il, que notre nature humaine nous y pousse. Sous la motion d’un désir inhérent à ce que nous sommes, nous recherchons la compagnie de nos semblables. Or que fait-on, lorsqu’on ouvre un livre ? On s’ouvre à la pensée d’un homme. Ceci n’est qu’un constat : l’homme possède, radicalement, fondamentalement, ce besoin de communiquer avec les autres hommes. Oh, mais pas seulement pour s’assurer la survie, loin de là ! Non, avant tout, l’homme sait instinctivement qu’il doit aller vers son semblable pour devenir homme lui-même, et se connaître en connaissant l’autre. Il va vers l’autre parce que toute perfection, tout bonheur, toi achèvement se fait avec l’autre, à l’occasion de l’autre. Quelle vertu y aurait-il sur terre si l’homme naissait et vivait solitaire ? Quelles qualités développerions-nous ? Songez-y, non sans trembler : quelle humanité (au sens de capacité pour chacun d’être pleinement homme) sera la nôtre, lorsque notre monde aura atteint le but ultime de son prétendu progrès, faisant de chaque individu un atome isolé, sans parents, sans famille, sans aucun rapport naturel à l’autre, complètement restreint à son plaisir égoïste ?

            Bien comprise, la littérature est une échappatoire à l’individualisme et au cercle restreint de nos fréquentations, qui ne peuvent pas toujours suffire à nous parfaire en tant qu’homme. Qui peut prétendre avoir autour de lui suffisamment de maîtres pour se passer des leçons des anciens ? Et quel manuel de cours peut oser dire qu’il nous apprendra mieux à goûter le tragique de la condition humaine qu’une pièce de Sophocle ? Bien plus que le savoir théorique, la littérature apporte une manière d’être, face aux questions qui importent ; elle nous fait sentir, parfois à coup de contre-exemples, la juste attitude des meilleurs tempéraments face aux passions, aux joies, aux peines, à soi-même, à la mort, à Dieu…

            Dans un livre, ces petits caractères imprimés sur la page sont autant de clés discrètes qui autorisent le miracle : entrer dans une âme en action, en réflexion, vivante. Beaucoup de philosophes ont ressenti l’angoisse de l’infranchissable fossé qui sépare deux individus, deux altérités irréconciliables. Mais leurs esprits se seraient bien vite tranquillisés s’ils avaient vu dans la littérature l’ouverture d’un esprit et d’un cœur à un autre. Les mots sont maladroits lorsqu’ils sont parlés. On s’embarrasse de tout cet appareil corporel qui parasite l’essentiel de nos échanges, et c’est souvent la déception qui teinte l’arrière-goût des conversations que nous rêvions faciles, profondes et lumineuses. Mais la parole écrite est maîtrisée par l’art. Elle cultive le mot juste, la traduction exacte d’une personnalité.

            Il est beau de songer, après nos plus ou moins pénibles scolarités, que nous pouvons encore aujourd’hui nous faire une idée du caractère d’un Molière, d’un Corneille, d’un Racine, non pas tant par les éléments de biographie qu’on nous aura fournis à leur sujet que par la couleur de leurs mots, le contour de leurs personnages, le geste de leur plume. Même sans parler d’eux-mêmes, les auteurs disent dans leurs écrits quelque chose de leur âme. Pensons à la fine gaieté de La Fontaine, à cet esprit souple et joyeux qui, se riant des vices et des lourdeurs des hommes, nous rend plus moraux sans froideur et plus lucides sur nous-mêmes. Rien d’emprunté dans les fables, rien de comparable aux sermons bien-pensants de nos pieux journalistes ou à l’humour gras des chroniqueurs sans vergogne. Rencontrer La Fontaine dans ses poèmes est déjà une richesse humaine, car on s’y prend de sympathie pour un type d’homme où prédomine l’intelligence fine, la clairvoyance sans amertume et la joie sans illusion. N’avons-nous pas besoin de redevenir de tels hommes ?

            On fréquentera par ailleurs avec profit des auteurs comme Corneille et Racine, tempéraments forgés par la grandeur de sentiment et la compassion aux états d’âmes du prochain. Les classiques, en général, offrent ce type de caractère équilibré, salubre et fort, qui manque tant à notre siècle de névrosés sentimentaux et médiocres. Il faudra être plus prudent avec certains auteurs romantiques et modernes ; facilement déséquilibrés, ils ne sont pas de bonnes fréquentations si le sens critique n’est déjà solidement ancré. Combien de jeunes n’a-t-on pas vu s’enticher sans discernement d’un auteur torturé et ténébreux à souhait, où ils croyaient percevoir l’essence même du génie ?

            En un mot, les auteurs peuvent être les parents, les frères et sœurs qui manquaient à la personnalité pour atteindre la note juste de l’homme accompli. Il est très beau de voir cette influence qu’un bon livre peut avoir à travers les siècles. Il est beau également de cultiver la littérature comme l’activité désintéressée par excellence, et donc éminemment éducative ; car tout ce qu’il y a de grand, de beau et d’humain ne se fonde que sur un certain détachement, une quête gratuite de perfection. En cela, la littérature est et restera toujours une résistance à la corruption du monde, une proclamation de la spiritualité de l’homme au milieu des marées du matérialisme.

Bastien Précoeur

Comment parler à un musulman ?

Les citations des Ecritures nous incitant à être apôtres sont légion. Qu’il nous suffise de citer Saint Paul, dans sa première Epître aux Corinthiens, qui déclare : « malheur à moi si je n’annonçais pas l’Evangile » (9,16) et bien sûr, Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même qui nous appelle à aller « par tout le monde prêcher l’Evangile à toute créature » (Mc 16,15).

Notre époque moderne a ceci de merveilleux que, la mondialisation aidant, nous n’avons plus, comme les apôtres, à parcourir des milliers de kilomètres, notre baluchon sur l’épaule, pour aller à la rencontre des nations, puisque ce sont les nations qui viennent pour ainsi dire aujourd’hui jusqu’à nous. Et elles arrivent charriant dans leurs bagages leurs coutumes et religions, au premier rang desquelles la religion musulmane.

On pourra le déplorer ou s’en réjouir, il n’en reste pas moins que les faits sont là et que le chrétien qui est appelé à tendre vers la sainteté, l’atteindra d’autant plus sûrement qu’en bon homme de terrain qu’il est, il ne la basera par sur des spéculations ou des pieux désirs mais l’ancrera dans la réalité (conformément aux enseignements du « doctor communis », Saint Thomas d’Aquin).

Il pourra donc être difficile de tendre de nos jours vers cette sainteté, si nous adoptons vis à vis de l’islam une attitude de fuite ou d’évitement. Nous ne pouvons plus en effet ignorer, au sens apostolique du terme, cette réalité toujours croissante de la présence de l’islam en France, à commencer par le nombre conséquent de ses adeptes, et ne pas y voir une invitation de la Providence pour apporter la bonne parole à des populations dont certaines en furent privées par les pouvoirs publics qui se sont succédés en France depuis la conquête de l’Algérie en 1830.

Dès lors, il convient de s’intéresser à ce sujet, car tous, que ce soit à l’école, au travail, ou à travers notre engagement dans des œuvres de bienfaisance ou d’apostolat, nous sommes amenés à côtoyer des coreligionnaires de confession musulmane que la Providence a placés à portée de nos mains. Peut-être sommes-nous en effet les instruments de salut qu’elle leur a prédestiné de toute éternité. Quelle responsabilité alors si nous venions à ne pas répondre, sciemment ou par négligence, à ce plan divin ?

Car le musulman, – contrairement à la plupart de nos contemporains dont le relativisme dissolvant vient étouffer dans l’œuf toute tentative de discussion sérieuse- s’affiche comme un croyant et ne manquera pas de le faire savoir à qui voudra bien l’entendre. Faites l’expérience. Vous avez un collègue musulman et ne savez comment aborder le sujet de la foi avec lui ? Posez-lui simplement la question : « Est-ce que tu crois en Dieu ? »  Sa réaction ne se fera pas attendre, presque choqué qu’il sera que vous puissiez douter de sa religiosité. Et trop heureux de vous démontrer également que « sa » religion « dépasse » toutes les autres.

Pourra venir ensuite la deuxième question : « Pourquoi es-tu musulman » ? A travers cette interrogation, vous pousserez votre interlocuteur à se poser la question de la raison de son adhésion à cette religion. Peut-être ne se l’est-il jamais posée en fait…

– Est-ce la sublimité de sa doctrine (loi du talion, lapidation de la femme adultère…) ? Vous pourrez l’inviter à comparer avec le message évangélique (pardon des offenses, « que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre »…).

– Peut-être alors la rapidité de sa diffusion ? Mais la religion vraie a-t-elle besoin des armes pour s’imposer (cf. les guerres de conquêtes fulgurantes de l’islam au premier siècle de l’Hégire jusqu’à Poitiers en occident et en Inde en Orient) alors que sa seule force de persuasion devrait suffire, y compris au milieu des persécutions, comme ce fut le cas durant les trois premiers siècles qui virent le catholicisme convertir l’empire romain ?

Les miracles alors viendraient apporter leur secours à une raison en proie au doute ? Contrairement à la religion catholique qui foisonne de miracles attestés, y compris contemporains, l’islam est une religion sans miracle. Allah ne dit-il d’ailleurs pas à son prophète dans le Coran qu’il n’aura d’autre signe à apporter à ceux qui lui en demandent que la force de ce livre ? Bizarrement, dans les hadiths (faits et gestes du prophète) ou dans la sira (vie de Mahomet), écrits quelque 200 ans après les faits qu’ils sont censés relater, les miracles attribués au prophète sont légions (il se met à multiplier les dattes, de l’eau coule de ses doigts…). Outre l’historicité plus que douteuse de ces récits, rien en tout cas qui s’apparente de près ou de loin à des cas comme les guérisons de Lourdes, l’exacte conformité du Saint Suaire avec les Evangiles et son origine inexpliquée, à l’instar de l’image de la Vierge de Guadalupe.

Pour finir d’instiller le doute dans son esprit, il pourra être de bon ton de souligner quelques contradictions (en 41:9 la création se serait faite en 2 jours, contre 6 jours en 7:54… ) et erreurs (la Trinité des chrétiens serait ainsi de croire au Père, au Fils et à … Marie – 5:116…) dans le Coran, qui dit pourtant de lui-même qu’il est un livre infaillible (17:88). Mais il faudra toujours veiller à être délicat avec son interlocuteur et ne pas attaquer frontalement et grossièrement son livre et son prophète (ce qui n’empêche pas de dire la vérité), au risque de le voir sinon se refermer (à juste titre) comme une huître.

Car c’est sans doute la Charité qui est la clé de voûte de cet apostolat. Et il faudra en outre que cette Charité soit presque palpable dans votre conversation à tel point que votre interlocuteur devrait en venir à se demander : quel est cet homme (certains penseront peut-être ce « mécréant ») qui porte un tel regard d’amour sur moi ?

La grâce maintenant ne force pas le libre-arbitre. Au musulman qui refusera d’aller plus loin ou qui s’enfermera dans une argumentation stérile du style « le Coran est la parole de Dieu car c’est le Coran qui le dit » (ne riez pas, c’est le type de démonstration que l’on retrouve dans ce livre), il ne vous restera plus que la prière… Et à cet égard, nous pouvons faire nôtre cette belle prière de monseigneur Pavy, l’un des premiers évêques d’Alger au XIXème siècle. Puisse à travers sa pieuse « récitation » Notre-Dame d’Afrique palier alors nos faiblesses et nos limites dans cet apostolat à la fois si sublime et si ardu: « Cœur Saint et Immaculé de Marie, si plein de miséricorde, soyez touchée de l’aveuglement et de la profonde misère des musulmans. Vous, la mère de Dieu fait homme, obtenez-leur la connaissance de notre sainte religion, la grâce de l’embrasser et de la pratiquer fidèlement, afin que par votre puissante intercession, nous soyons tous réunis dans la même foi, la même espérance et le même amour de votre divin fils, Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui a été crucifié et qui est mort pour le salut de tous les hommes et qui, ressuscité plein de gloire, règne en l’unité du Père et du Saint-Esprit, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il ».

 Jean Félix

Le Christ-Roi, remède à la déchristianisation de la France

Que se passe-t-il aujourd’hui ? « Le présent, c’est Jésus-Christ chassé de la société, c’est la sécularisation absolue des lois, de l’éducation, du régime administratif, des relations internationales et de toute l’économie sociale » (Cardinal Pie, V, 172). C’est ce que l’on désigne par le terme de « déchristianisation », et celle de la France semble accomplie[1] en ce début de 21ème siècle. La majorité des français ne baptise plus ses enfants, ne fréquente plus les sacrements. 4% seulement de la population va à la messe le dimanche. La société et les institutions politiques se sont détachées de Jésus-Christ et cela affecte les personnes dans leur vie intérieure, dans leur vie familiale et professionnelle et dans leur pratique religieuse. Les effets en sont visibles. Ce sont tous les signes de décadence et de décomposition de la société qui en découlent et qui sont incontestables au plan naturel : avortements de masse, naissances majoritairement hors mariage, suicides des jeunes, vagabondage sexuel et pornographie répandue, divorces dans les familles et polygamie successive (par les remariages), abandon des campagnes et du travail de la terre, chômage et précarité de millions de gens dans les villes, abandon et isolement des personnes âgées, pour finir par la destruction des corps dans le feu de la crémation… La cause principale et première de ces fléaux ne fait pas de doute : c’est la Révolution qui a entraîné en 1789 l’apostasie de la nation. La déchristianisation s’est poursuivie par la loi de séparation de l’Église et de l’État promulguée en 1905 et enfin par le Concile Vatican II qui a promu la liberté religieuse par la déclaration Dignitatis humanae. Examinons ces trois crimes et voyons leurs remèdes.

La Révolution a commis un crime politique et religieux : l’exécution du roi chrétien Louis XVI allant de pair avec la négation de Dieu. La conséquence immédiate en a été le rejet de la souveraineté de Notre Seigneur Jésus-Christ sur la France et la perte de la paix : guerres civiles, persécutions, instabilité des gouvernements successifs depuis deux siècles… Comme l’a souligné Léon XIII, « les sociétés politiques ne peuvent sans crime se conduire comme si Dieu n’existait en aucune manière, ou se passer de la religion comme étrangère ou inutile.[2] »

La tentation de ce rejet de Dieu semble avoir toujours existé : Nolumus hunc regnare super nos ![3]. Mais l’incarnation de cet athéisme politique en France est en réalité un phénomène spécifiquement moderne, d’une nouveauté inconcevable par les civilisations du passé qui elles, n’affirmaient pas que l’homme est créateur de toutes choses. Cet aspect de la Révolution a été bien mis en lumière par Jean Ousset avec son maître-livre Pour qu’Il règne. « Dieu est Roi des nations, « Rex Gentium » (Jerem X, 7). La modernité le nie. »[4]. Ainsi cette négation de Dieu au plan politique ne provient pas seulement de la perte de la foi : il s’agit d’un crime prémédité par lequel les philosophes des « Lumières » ont sciemment refusé les choses qui sont prouvées au sujet de Dieu. La raison, par les seules forces de la raison naturelle, est apte à démontrer l’existence de Dieu, en particulier par l’utilisation des cinq preuves lumineusement expliquées par Saint Thomas D’Aquin au début de la Somme théologique.

Le deuxième crime, celui de la séparation de l’Église et de l’État, prétend s’appuyer sur le fait que ceux qui ont perdu la foi ou ne l’ont jamais eue, ne peuvent savoir quelle est la vraie religion et que pour cette raison il ne peut y avoir de religion officielle dans la société. Là encore Léon XIII a montré combien cette opinion est erronée : « Si l’on demande, parmi toutes ces religions opposées qui ont cours, laquelle il faut suivre à l’exclusion des autres, la raison et la nature s’unissent pour nous répondre : celle que Dieu a prescrite et qu’il est aisé de distinguer, grâce à certains signes extérieurs par lesquels la divine Providence a voulu la rendre reconnaissable, car, dans une chose de cette importance, l’erreur entraînerait des conséquences trop désastreuses. […] Puisqu’il est donc nécessaire de professer une religion dans la société, il faut professer celle qui est la seule vraie et que l’on reconnaît sans peine[6], surtout dans les pays catholiques, aux signes de vérité dont elle porte en elle l’éclatant caractère.[7] » Or il est aisé de reconnaître quelle est la vraie religion, notamment grâce aux nombreux miracles de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Il a affirmé à ce titre à propos des pharisiens : « Si je n’avais pas fait parmi eux des œuvres que nul autre n’a faites, ils n’auraient pas de péché ; mais maintenant ils les ont vues, et ils ont haï et moi et mon Père.[8] » Ainsi tout État, même s’il est païen au départ, a le devoir de rendre un culte public à la seule religion catholique et de prêter à l’Église son appui quand elle en a besoin. Au plan personnel, l’un des meilleurs moyens de combattre le crime du laïcisme est la pratique des Exercices spirituels de Saint Ignace qui montrent bien qu’il n’y a pas de troisième voie possible entre l’étendard du démon et celui du Christ-Roi. C’est la pratique régulière (chaque année) des Exercices selon la méthode du Père Vallet qui a soutenu Jean Ousset et ses compagnons dans la réalisation de l’une des plus belles œuvres contre-révolutionnaires françaises de ces deux derniers siècles : la Cité Catholique.

Le troisième crime est celui du découronnement[9] de Notre-Seigneur Jésus-Christ par les plus hautes autorités de l’Église à partir de Vatican II et notamment de la déclaration Dignitatis humanae. Cette déclaration affirme que « la personne humaine aurait droit, au nom de sa dignité, à ne pas être empêchée d’exercer son culte religieux quel qu’il soit, en privé ou en public, sauf si cela trouble l’ordre public[10] ». Dans cette conception, l’espace public devient neutre, ouvert à toutes les religions, et les États ne peuvent plus rendre de culte officiel à la seule vraie religion en raison de ce relativisme religieux généralisé. C’est pourquoi, au nom de cette fausse liberté religieuse, de nombreux prélats demanderont aux derniers États catholiques de supprimer toute référence à Notre-Seigneur Jésus-Christ et à sa royauté sociale dans leurs constitutions. Cette Révolution dans l’Église a provoqué l’apostasie des dernières nations catholiques (en particulier dans le monde hispanophone) et la progression fulgurante des fausses religions dans ces pays (par exemple le développement accéléré du pentecôtisme au Brésil et en Amérique du Sud). Ce crime ne se combat à nouveau que par la réaffirmation des droits de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui Lui seul est la Vérité (l’erreur, elle, n’a aucun droit).

Le Pape Benoît XV indiquait en pleine 1ère guerre mondiale que « c’est l’athéisme légal érigé en système de civilisation qui a précipité le monde dans un déluge de sang[11] ». Les faits lui ont malheureusement donné raison puisque les États n’ont toujours pas proclamé depuis les droits de Jésus-Christ sur la société et de nombreux autres désastres ont eu lieu (notamment la 2ème Guerre Mondiale, le communisme, etc.). Tant que cette situation durera, nous ne retrouverons pas la véritable paix. Citons à nouveau Pie XI: « Voulons-nous travailler de la manière la plus efficace au rétablissement de la paix, restaurons le Règne du Christ. Pas de paix du Christ sans le règne du Christ. » Confions-nous pour cela à la Très Sainte Vierge Marie, Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui participe à la Royauté du Christ et y dispose les cœurs : Regnum Christi per Regnum Mariae.

Louis Lafargue

[1] C’est l’affirmation de l’historien Jean de Viguerie, dans un article paru dans le quotidien Présent en 1995.

[2] Léon XIII, Immortale Dei (1er novembre 1885).

[3] Nous ne voulons pas qu’Il règne sur nous !, Saint Luc, 19, 14.

[4] Expression tirée de la brochure Peut-il exister une politique chrétienne ? de Bernard de Midelt, AFS, 2011.

[6] Ainsi l’État reconnaît sans peine la vraie religion, même s’il n’est pas « catholique » au départ.

[7] Léon XIII, encyclique Libertas, 20 juin 1888.

[8] Saint Jean, 15, 24.

[9] Lire à ce sujet l’ouvrage magistral de Mgr Marcel Lefebvre, Ils l’ont découronné, éditions Fideliter, 1987.

[10] Dignitatis humanae, 2.

[11] Benoît XV, Allocution au Sacré Collège, 1917.

Spiritisme, néo-spiritisme… Pour aller plus loin.

Qu’est-ce que le « spiritisme » ? :  c’est l’art d’invoquer les esprits, principalement ceux des morts, avec pour fin principale de deviner par leur moyen et celui d’un « médium » des choses occultes[1].

– « par spiritisme on entend proprement le commerce avec les esprits, l’évocation des esprits[2] »

– On parle aujourd’hui des  « néo-spirites » ; ces nouveaux évocateurs des défunts, d’une part, n’acceptent pas d’être rangés parmi les spirites et confondus avec eux et, d’autre part, se disent conformes à l’orthodoxie catholique dans leurs modes d’évocation des morts comme dans les messages qu’ils publient, et ils prétendent ainsi échapper aux réfutations des doctrines spirites antérieures et même aux condamnations répétées de l’Église catholique[3]. Il est cependant démontré[4] que les procédés d’évocation, même si la terminologie qui les décrit a changé, sont exactement les mêmes que ceux dont se servaient les fondateurs du spiritisme. Les « néo-spirites » tentent alors de rassurer les catholiques en avançant que la différence essentielle qui les distinguerait des spirites tout court, résiderait dans le contenu doctrinal des messages ; est rejetée en bloc toute la doctrine spirite concernant les Esprits, leur évolution, leur réincarnation… et est admise la doctrine catholique sur la grâce, la rédemption, les sacrements, l’enfer…

On assiste à une déviation croissante par rapport à la pensée catholique et à une adhésion de plus en plus évidente à la doctrine spirite originelle.

Nous trouvons dans la doctrine spirite :

– une croyance à la possibilité d’établir des communications régulières et organisées avec les morts.

– la négation des peines éternelles de l’enfer. «Voilà le dogme par excellence du spiritisme. Il semble que cela obtenu, tout est obtenu. Le reste n’est là que pour l’encadrement[5] ».

En effet pour le spiritisme, le corps humain n’est qu’un vêtement provisoire dont l’âme change successivement : il s’agit de la réincarnation, élément essentiel de sa doctrine.

« La religion spirite n’est qu’un déisme vague, un protestantisme rationaliste, sans rêve, sans chaleur de vie, où abondent les affirmations et les négations hérétiques, démunies de toute efficacité pour élever les âmes à Dieu. Religion sans esprit religieux…sans idéal…à la mesure d’une humanité très mesquine et très vulgaire[6]».

Dieu dans la Sainte Écriture condamne avec une sévérité extrême ceux qui provoquent ou entendent provoquer l’apparition d’âmes désincarnées, qu’elle soit vraie ou présumée: « Qu’on ne trouve chez toi personne … qui s’adonne à la divination, aux augures, aux superstitions et aux enchantements, qui consulte les évocateurs et les sorciers, et qui interroge les morts. Car tout homme qui fait ces choses est en abomination à Yahweh[7] ».

Il faut bien saisir par là le fond du problème : immédiatement après la mort, selon le dogme catholique, le sort de chaque âme est fixé pour l’éternité ; chacune d’elles « rentre » alors dans le plein pouvoir du Bon Dieu. Ce pouvoir divin sur les âmes désincarnées est absolu et différent de celui que Dieu se réserve sur les vivants, leur permettant une plus grande « latitude ».

  • NATURE de ce péché[8]:

Il s’agit d’une faute par excès contre la vertu de religion. Il fait donc partie des péchés de superstition. De même que la divination, la vaine observance,  la magie, la pratique du spiritisme met expressément ou implicitement en relation avec une « fausse divinité » en attribuant à une créature des pouvoirs que, d’après l’ordre de la nature et de la grâce, elle ne peut avoir.

A cela s’ajoute, pour un « néo-spirite » catholique :

– une faute contre la vertu de Foi : la pratique du spiritisme tendant à la négation de dogmes catholiques, comme la création de chaque âme, la grâce sanctifiante, le sort définitif à la mort, la Communion des Saints…

– une faute contre la vertu de Charité : « le spiritisme, en matérialisant ou du moins en faisant évaporer le dogme de la Communion des Saints en des rapports sensibles ou en sentimentalisme luxuriant, est aussi un péché contre la vraie piété et la charité envers les défunts. »[9]

De plus, la charité envers soi-même est aussi lésée : « dès les débuts, les médecins ont alerté de leur côté sur les effets nocifs de la pratique du spiritisme quant à la santé mentale de nombreux adeptes…

Toute conversation provoquée et vaine avec des esprits d’un autre monde, est absolument et gravement illicite.

« ITA omnes Catholici sertire debent… »

« Notre but n’est pas d’expliquer en détail l’action sensible et multiforme des princes de la cité du mal sur l’homme et les créatures. Toutefois les  circonstances actuelles ne permettent  pas de passer sous silence certaines manifestations démoniaques, d’autant plus dangereuses qu’on s’efforce d’en nier la véritable cause »[10]. Ce qu’écrivait Monseigneur GAUME en 1864, nous devons le reprendre comme tout-à-fait applicable de nos jours et même davantage. En effet, par la faute de l’homme, le monde est de plus en plus livré au pouvoir de Satan. Le RP. MATHIEU, exorciste capucin réputé, affirmait dans les années 1975 : « Malheureusement à Rome, ils ne croient plus à la possession diabolique ». Le RP. AMORTH parle dans le même sens : – « j’estime que 99% des évêques ne croient plus à l’action extraordinaire du démon » ; et à une autre occasion : « en France les évêques ont accepté de nommer des exorcistes, mais sur la centaine d’exorcistes français, il n’y en a que 5 qui croient au diable et font des exorcismes ; tous les autres envoient ceux qui s’adressent à eux au psychiatre »[11].

Gardons la tradition catholique qu’est la prière pour les défunts et l’assistance à la Sainte Messe qui reste un puissant exorcisme. Et si nous avons succombé à cette tentation                      :

  • Renonçons à Satan.
  • Pardonnons à ceux qui nous ont fait du tort.
  • Repentons-nous
  • Confessons-nous.
  • Implorons avec confiance Notre-Dame et Saint Michel pour qu’ils nous soutiennent à l’avenir et nous préservent de tout mal.

La miséricorde de Dieu est infinie, ne l’oublions jamais.

Capucinus

[1] ROJO MARIN T.I n° 365. 4

[2] DTC art. « spiritisme »

[3] RP. RÉGINALD ibid. p. 135 sq

[4] cf.  ibid p. 140 sq

[5] (DTC ibid. Col 2518)

[6] Dictionnaire de théologie catholique   – Col.25,19

[7] Deut. 18, 10-12  – Toute la Bible nous transmet des condamnations analogues : voir les textes suivants, Es. 22,17 ; Lév. 19,31 ; I Reg 28,3-7 ; Os. 4,12 . Is. 2,6 ; 3,2 sq ; Jér. 27,9 sq ; Zac. 10,2 ; Mal. 3,5 ; Act. 8,9 sq ; 13,8 ; Gal. 5,20 ; cf. aussi Act. 19,19 ; Apoc. 21,8.

      [8] MÜLLER «  Somme de théologie morale » n° 216+224+226.

 [10] Monseigneur GAUME « Traité du St Esprit » t. p. 250

[11] In « trente jours » n° 6 Juin 2001

Que reste-t-il du communisme aujourd’hui ?

            De toutes les révolutions politiques connues dans l’histoire humaine, la révolution d’Octobre rouge en Russie en 1917 est la pire. Les communistes ont persécuté les chrétiens et exterminé des dizaines de millions de personnes dans le monde pendant tout le 20ème siècle (plus que tout autre totalitarisme). Encore aujourd’hui plus d’un cinquième de l’humanité vit officiellement en terre rouge. Nous pouvons citer des pays comme la Chine (1 milliard et demi d’habitants), la Corée du Nord, le Vietnam, ou Cuba. Mais au-delà des persécutions, la Sainte vierge, lors de ses apparitions à Fatima au Portugal, à l’été 1917, a précisément désigné les erreurs communistes comme celles qui feront le plus souffrir les hommes et l’Église. De l’Orient à l’Occident,

Le projet communiste, qui s’appuie sur l’œuvre de Karl Marx (révolutionnaire allemand d’origine juive né en 1818 et mort en 1883), est la forme la plus aboutie, la plus claire des utopies subversives qui visent à détruire l’homme. Marx a publié avec son ami Engels en 1848 le Manifeste du Parti Communiste pour préparer l’avènement de cette révolution satanique. Marx l’annonce : « le communisme commence dès que commence l’athéisme ». Dans plusieurs pays de l’Est devenus communistes, les enfants devaient apprendre dès le plus jeune âge à l’école un catéchisme révolutionnaire à l’envers, sous la forme de questions-réponses : « Est-ce que Dieu existe ? Non Dieu, n’existe pas, etc. ». La République populaire d’Albanie se déclarera, le 29 décembre 1967, le premier État officiellement athée de l’histoire. Nous devons bien voir que l’idéologie marxiste qui est à la source du communisme est une erreur de nature d’abord religieuse. Elle prétend disposer d’une explication complète de la réalité et offrir le « salut » ici-bas, par des moyens humains, sans Dieu.ces erreurs sont non seulement toujours présentes mais continuent de se répandre et de détruire de l’intérieur les dernières bases de nos sociétés autrefois chrétiennes comme celles de l’Église Catholique. Ou en sommes-nous de la révolution communiste aujourd’hui ?

En effet, pour Marx, « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses manières ; ce qui importe, c’est de le transformer ». L’objectif est clair. Il s’agit de construire un monde nouveau, un homme nouveau, une société nouvelle et un dieu nouveau, la collectivité, à partir des seules exigences de la raison humaine. Afin d’édifier ce monde nouveau, les communistes ont élaboré une doctrine économique qui prône la suppression de la propriété privée au profit de la propriété collective. Dans ce système social, tous les biens matériels sont mis en commun (d’où le nom de communisme) ainsi que les moyens qui ont permis de les produire (usines, exploitations agricoles, entreprises). L’objectif est de parvenir à l’égalité absolue de tous en instaurant une société sans classes sociales. Dans la société communiste, il ne doit plus y avoir d’inégalités de richesses entre les hommes (suppression du profit), ni de rapports de domination entre eux. Il faut donc faire disparaître les patrons et les ouvriers, les gouvernants et les gouvernés, et surtout les familles, car ces communautés naturelles sont foncièrement inégalitaires et fondées sur le pouvoir d’un chef, le père de famille. Pour les communistes, l’égalité de tous les hommes ne pourra se faire que dans une confrontation violente, appelée « lutte des classes », à l’issue de laquelle la classe des propriétaires, désignés par « les bourgeois capitalistes » (parce qu’ils possèdent le capital), sera renversée par les ouvriers dits prolétaires (ne possédant pas de capital) : ce sera la « dictature du prolétariat ».

Enfin, le communisme est international, c’est-à-dire sans identité nationale (« les prolétaires n’ont pas de patrie »). Comme le relève P. Bernardin, l’État-parti marxiste en Russie et en Chine a conduit à :

  • L’abolition de l’héritage et la disparition du droit d’aînesse
  • La confiscation des biens de tous les rebelles au système
  • Un impôt lourd progressif
  • La centralisation du crédit entre les mains de l’État, au moyen d’une banque nationale, dont le capital appartiendra à l’État et qui jouira d’un monopole exclusif.
  • La combinaison du travail agricole et du travail industriel ; mesures tendant à faire graduellement disparaître la distinction entre la ville et la campagne, puis dans nombre de pays communistes, extermination de millions de paysans.
  • Une éducation publique et gratuite de tous les enfants. […] et la combinaison de l’éducation avec la production matérielle.

 Et aujourd’hui ?

Le mur de Berlin est tombé le 9 novembre 1989, l’URSS s’est effondrée en décembre 1991, le parti communiste n’existe quasiment plus dans le paysage politique français et la Chine communiste s’est largement ouverte au marché et aux économies occidentales. Est-ce la fin de l’histoire communiste ? Les erreurs répandues par la Russie n’ont pas simplement cessé d’exister une fois l’Union soviétique officiellement dissoute. La version actuelle du projet communiste s’appelle le marxisme culturel, et cette idéologie est promue partout dans le monde. Ce marxisme culturel se manifeste aujourd’hui comme étant encore plus révolutionnaire que le marxisme classique — il prétend réinventer la famille, l’identité sexuelle et la nature humaine, alors que le communisme économique prétendait réinventer la société d’abord sur la base d’une violente captation de la propriété. A l’Est, la Russie ne s’est pas convertie à la seule vraie religion catholique. Ce pays continue de connaître l’un des taux d’avortement les plus élevés au monde. La gestation pour autrui y est légale et profite notamment aux homosexuels (rappelons que Lénine avait dépénalisé l’homosexualité et l’avortement dès les années 1920). Le divorce y est endémique… Enfin, la Russie perd 1,7 millions d’habitants tous les ans du fait d’un taux de natalité très bas. En France, l’athéisme virulent de notre système républicain reformé en 1945 par les communistes et les gaullistes, conformément au projet marxiste, a expulsé Notre Seigneur Jésus Christ et la religion catholique de toutes les institutions publiques, des cours de justice comme des écoles, des hôpitaux comme des administrations ou des entreprises au nom du laïcisme. L’institution naturelle de la famille a été détruite dans le droit (on ne reconnait plus un père et une mère) et plus de 60% des enfants naissent hors mariage chaque année d’après l’INSEE. L’éducation publique totalitaire crée et conditionne des millions d’enfants. Dix millions d’enfants sont scolarisés chaque année dans les écoles athées de l’Éducation Nationale, les deux millions restants étant instruits d’une religion libérale dans des écoles privées appliquant le même programme d’enseignement public. La paysannerie est quasiment morte et moins d’un pour cent de notre population travaille encore la terre (on compte un suicide de paysan pratiquement tous les deux jours en France). Enfin l’identité nationale et la mémoire de notre peuple ont été largement dissoute par une immigration massive depuis 50 ans, surtout africaine et musulmane, qui a changé en profondeur notre population. Un véritable totalitarisme de l’égalité est aujourd’hui véhiculé par la propagande médiatique qui entretient encore le mythe révolutionnaire en créant artificiellement des classes, des catégories d’individus en lutte pour les mêmes droits (par exemple les migrants, les femmes, les homosexuels) afin d’achever la destruction des dernières communautés naturelles restantes. L’analyse le montre indiscutablement : c’est bien la dialectique marxiste mise en œuvre par le projet communiste qui est depuis un siècle le dissolvant le plus puissant des restes de notre civilisation.

Louis Lafargue